Chronique de voyage.
28-29-30 mars
Au bout l’écurie….
28 mars, Bordeaux. Enya est bien au rendez-vous. Bien installée dans un bel appartement de Talence. Semble apprécier la vie étudiante et c’est parfait ainsi. Le soir, sortie au restaurant Isshin, spécialités ramen de Kyushu. Il pleut pour y aller et il pleut au retour. Et toujours pas de “kapouche” pour protéger les beaux cheveux d’Enya. A croire que c’est une survivance d’une pratique antique lorsque les humains n’avaient ni parapluie ni chapeau ni bonnet pour protéger la tête des intempéries. Mais cela n’empêche pas d’avoir de superbes boucles tombant en cascade sur les épaules.
29 mars, Rennes. Enora et Clément nous attendent. Ils habitent un bel appartement tout neuf, tout blanc. Enora, qui cultive les problèmes à la cheville droite vient tout juste de poser ses béquilles. Ce qui ne l’empêchera pas de se tordre à nouveau la cheville dans le métro à l’occasion d’une accélération brutale. Espérons que ce sera bénin cette fois-ci..
Direction le quartier Sainte-Anne / Les Lices pour un diner au restaurant. Après quelques hésitations, arrêt dans un restaurant savoyard. Heu, copieux et bon. Mais pas vraiment léger. Après quelques mois sans excès, est-ce bien raisonnable? La nuit donnera la réponse: non.
30 mars, Landerneau, où nous aurons le plaisir de revoir Enzo et Noah, en forme, ainsi que Môn et Greg. Concentrés sur le nettoyage et l’aménagement du jardin et de la maison.
Puis ce sera Brest, terme du voyage. Quand nous arrivons, Kilian et Mahé sont devant l’atelier, en train de bricoler sur les motos. Quelques larmes furtives et une belle émotion.
Il nous reste à passer chez Emgan et Hélène pour compléter le circuit “famille”, avant d’aborder le circuit “amis”.
La boucle se termine. Une boucle en forme de patatoïde… Il est probable que les souvenirs prennent, au fil du temps, des allures de topinambours, avec des creux, des bosses, des oublis et des rajouts, voire des souvenirs réinventés en des versions totalement différentes entre Florence et moi-même. De quoi alimenter les discussions futures sur “mais oui, mais non”…
Reste à mettre ce fatras de phrases en forme et remettre la chronique à l’endroit, avec un calendrier interactif permettant de s’y retrouver facilement.
Retour sur terre.
Ou comment se faire à l’idée du retour…
Après une excellente nuit, quoique fraiche (3°C) dans le magnifique site de la Quinta das Quichães au bord ‘un affluent du Douro, on a repris le chemin du retour. Pour commencer, visite d’un bourg célèbre de la vallée du Douro Pinhão, d’où partaient les bateaux chargés de vin pour Porto. A noter:
– que l’on est à 200 m d’altitude et qu’il y a quelques écluses à franchir;
– qu’une voie ferrée dessert le patelin et que les touristes s’y déversent;
– que Florence y était déjà venue avec Hélène et Enora un jour de septembre et avaient eu très froid.
Après un rapide déjeuner, on a repris le chemin en passant par les routes en lacets au milieu des terrasses sur lesquelles sont cultivées les vignes. Ces paysages font partie des merveilles résultant du travail patient des viticulteurs au fil des siècles.
Puis nous avons vraiment repris la route en suivant le fleuve Douro, qui en Espagne gagne le nom de Duero. Arrêt dans la ville de Tordesillas. Le camping Orbitur El Astral est situé au bord du fleuve en crue, mais apparemment le niveau ne monte plus. La pluie s’est arrêtée aujourd’hui sur la région, par contre les jours précédents ont été bien arrosés. Le camping est parsemé de flaques d’eau entre lesquelles il faut slalomer. Première visite rapide de la vieIlle ville. Le niveau du Douro est critique et les jeux d’enfants sur les berges sont noyés. Les abords en sont interdits. La ville possède une place magnifique, mais encombrée de voitures et de camionnettes, et des rues d’une autre âge ainsi que des églises romanes austères.
Après une nuit au camping du coin, sous la pluie, je suis retourné avec Florence visiter la basse ville où des scolaires costumés démarraient les célébrations de la semaine sainte en compagnie de leurs enseignants. On ne rigole pas avec la religion catholique dans le coin, encore que la longueur des jupes de certaines adolescentes démontrait clairement que la répression n’était plus de mise.
Un petit tour dans un vignoble proche, à Protus, et quelques bouteilles de Ribeira del Duero entassées dans le camping car, et nous voila sur l’autoroute en direction de Valladolid et de Burgos. Traversée de Valladolid, et rapide aperçu du centre historique, qui mériterait mieux que cela…
Mais il faut avancer. On poursuite jusqu’à Vittoria où on a repéré un camping konokoncard dans la Sierra de Urbasa. Cette sierra est un haut plateau montagneux avec de magnifiques forêts de hêtres et des mousses extraordinaires sur les roches des sous-bois. Le site est fort apprécié à l’automne lorsque les feuilles de hêtre passent par les nuances de jaune, d’orange et de rouge. Malheureusement, il pleut, il fait froid et il y a du brouillard. 3°C sous la pluie et dans le brouillard, ça nous rappelle des jours sombres de Leintan quand la météo était bloquée sur Miz Kerzu.
Le camping n’était pas vraiment opérationnel. Des fuites d’eau chaude aux robinets d’évier, pas de chasse d’eau opérationnelle, etc… Tellement peu opérationnel que l’on n’a trouvé personne pour payer avant de partir….
Direction le Pays Basque…
Les routes et les paysages jusqu’à Irun sont moches, encombrés. En plus d’une circulation extrêmement dense, la densité de poids lourds rend la conduite pénible et dangereuse. Inintéressant au possible comme exercice. L’intérieur du pays doit être autrement plus intéressant.
On franchit la frontière à Irun, et le même merdier se retrouve du côté français.
En prenant la route du littoral, c’est un autre type d’exercice qu’il faut affronter. La densité de ronds-points et de ralentisseurs est ahurissante. De quoi donner le tournis et un sacré mal de dos. De quoi avoir envie de fuir et de prendre l’autoroute. Après l’arrivée sur un camping annoncé ouvert, mais fermé pour cause de travaux, on poursuit jusqu’à Hossegor où il y a des places libres dans une aire du réseau Camping-car Park. Correct, mais aucun endroit pour la vaisselle, pas même un robinet d’eau froide et un évier. Pas de douche. Trop cher pour les services rendus.
Le lendemain, à savoir le jeudi 27 mars, départ pour la dune du Pilat (Pyla sur les panneaux de signalisation locaux). Florence ayant quelques difficultés à marcher dans le sable, elle renonce à une balade sur la dune. Par la même occasion je serais seul à faire la montée et la descente en courant pour fêter l’anniversaire des 51 ans de notre première visite des lieux. Cela a bien changé. Le site est devenu extrêmement fréquenté et les aménagements pour accueillir le flot de touristes sont à la hauteur. En haut de la dune, le spectacle est toujours aussi magique. Le vent est un artiste exceptionnel et ses fantaisies au sommet de la dune sont infinies. Le vent lève le sable au sommet et les rivières de sable franchissent le bord sommital pour retomber en pluie du côté forêt. Laquelle forêt a été sévèrement brulée et porte encore les stigmates des destructions.
La dernière fois que nous étions venus ici, je pouvais encore faire la course avec Emgan (3 ans) et le pousser dans la pente. Cette année, rien de tel et les enfants présents sont des inconnus. Pas question de les pousser dans la pente, sous peine de finir avec une plainte pour mise en danger…
Florence a trouvé un “camping” à Gujan-Mestras: le centre de vacances ANAS. Le confort assuré. On va pouvoir prendre une douche et peut-être faire une lessive. La dernière de ce voyage.
Nazaré.
En attendant les vagues.
Météo pourrie la nuit dernière. Avons essuyé une tempête et pour ne pas être en reste, nous étions dans un camping (Orbitur Valado), sous les pins. Sachant que les pins, c’est génial quand il fait beau et chaud, on aurait dû activer le translateur iatrogénique de saison pour rejoindre l’été. On a bien essayé de l’activer, mais dans la confusion de la nuit on n’a jamais été fichu de retrouver la manivelle.
Résultat 1: nous avons été victimes d’un traître bombardement de pommes de pins en pleine nuit.
Résultat 2: cabossage réussi du capot et quelques impacts supplémentaires sur le toit. Compte-tenu de l’optimisme du camping quand à la prise en charge par leur assurance, nous sommes ravis.
Et il pleut, il pleut, comme dans toute l’Ibérie, mais toujours pas de vagues dignes de Nazaré. “Surf Forecast” donne une hauteur de 2 m aujourd’hui, 3 m demain avec pluie et 7 m samedi matin.
Donc, pour l’instant on fait ce que font tous les amateurs de vagues: on attend.
Pour celles et ceux qui se hasarderaient à dire que les photos de vagues sont retouchées et que ce contraste est factice, j’ai un témoin. Florence. A certains moments, les grains en approche, sur la mer, plombaient le ciel et permettaient de saisir des images contrastées à la prise de vue.
Le 21 au soir nous sommes rejoints, à la gare routière de Nazaré, par Eléanor qui vient de Gandra, à côté de Porto.
Après le diner, préparation du couchage sous une pluie battante. Le sommeil va être compliqué car il y a encore beaucoup de vent. Et le toit étant ouvert, la pluie vient frapper la toile de tente en faisant un bruit qui finit par être énervant.
Le samedi 22, on range et on file vers la Praia do Norte. La hauteur de houle prévue est de 7 m. Quand on arrive, la lumière est médiocre et les déferlantes s’écrasent très vite, laissant peu de place à de beaux rouleaux et encore moins à de vrai tubes. D’ailleurs, dans cette écume généralisée, pas de surfer en vue. Peu importe, c’est magnifique. Sauf quand se pointent les grains. Certains sont sévères et laissent peu de chance d’échapper à la douche tant leur déclenchement est affaire de secondes.
Puis, déjeuner à Nazaré, dans un restaurant en front de mer. Sur la plage, les vagues viennent éclater pratiquement au bord, avec écume et embruns au menu. En de rares moments la lumière est belle, et à d’autres, les grains noient le paysage dans un gris sombre baigné d’embruns.
Bizarrement les vagues entre la plage sud et la plage nord sont complètement différentes. On aperçoit aussi, devant la pointe de Nazaré, le creusement puis la montée des déferlantes qui s’écrasent sur les rochers de la pointe.
Sachant que les vagues sur ce site allaient progressivement perdre en hauteur, on reprend la route, direction Figueira da Foz. Arrêt au camping Orbitur Gala, situé à proximité immédiate de la Praia da Cova. Le site est balayé par les grains et les flaques d’eau sont partout. Difficile de rester sec. Surtout qu’à un moment ou un autre on est piégé sous la pluie. La plage est accessible par un portail ouvert sur demande à la réception du camping. Les dunes qui bordent la plage portent des squelettes de pins envahis par le sable. Le paysage est sinistre et on a l’impression très nette que la mer est en train de reprendre ses droits.
Impossible dans ces conditions d’entraîner Florence et Eléanor dans une marche le long de la plage. Et d’ailleurs, tout est trempé dans le camping-car. Les passagers, les tapis de sol. Et la nuit n’est pas plus sèche. Au contraire, nous avons droit à des grains répétés et violents avec des rafales de vent. Quand en pleine nuit, je dois me rendre aux toilettes, le camping-car est au milieu d’un grande mare et il faut regarder attentivement le sol pour trouver un passage avec moins d’épaisseur d’eau.
Au matin, grand soleil. Princesse Eléanor prend un bain de soleil sur le lit du haut, la fenêtre laissant la lumière selon un angle quasi-parfait. Un moment de répit bienvenu.
Vers 11 h on tente une sortie vers la plage. A peine arrivés en bord de mer, un grain se pointe. On doit rentrer précipitamment. Trop tard. Arrivés au portail, nous sommes trempés. On ne gardera pas un souvenir impérissable des lieux…
Départ pour Aveiro. Le cordon littoral qui limite la lagune (Ria d’Aveiro) est bordé par des maisons dont certaines sont peintes avec des bandes de couleurs. Souvent verticales, quelquefois horizontales. Toujours très gaies et originales.
Après un déjeuner dans un restaurant italien (Pizzeria Zazzaro) correct, on reprend la route pour Gandra. Le navigateur, programmé pour éviter les routes à péage, nous fait passer par des routes improbables. On dépose Eléanor et on reprend la route.
Le 23 au soir, arrêt dans une aire de Camping-car (gérée par l’hôtel rural Quinta das Quintães). Site relativement neuf, aux équipements d’excellence qualité, en comparaison avec ce qui a précédé. Mais trop cher (25 € après négociation, sinon, 30€). Quelques fautes de goût regrettables: pas d’eau chaude pour la vaisselle, pas d’eau chaude aux lavabos. Ce n’est pas grand chose, mais certains détails sont bien pratiques quand les plats sont gras…
Au bout de tout ça, on ne voit plus les vagues. Et ce n’est pas la suite, à savoir la remonté de la vallée du Douro qui va améliorer les choses.
On va regretter les embruns… Quant aux grains, une prière pour que ça se calme. Pas cher, mais hautement aléatoire.
Et il va falloir penser à une autre corvée: la lessive, sous peine d’emporter d’étape en étape, un parfum de vagabond.
18-21 mars
Ou comment les âmes dansent sur les vagues…
Nous avons poursuivi notre lente remontée le long des côtes du Portugal. Pays béni pour le surf. Vent, vagues et l’espoir parmi toutes ces vagues d’avoir LA vague. Pour l’instant, le site de Nazaré tient le record avec une vague de 26 m surfée un jour d’immenses vagues. A l’occasion de notre passage la météo surf prévoit des vagues de 2 m (demain) à 4,5 m le 21 mars. Rien d’exceptionnel.
Mais pour l’instant restons à Peniche où nous avons passé la nuit du 17 au 18 dans un “camper-park” (ASA motorhome). Rangés têtes bêches comme des sardines en boite, les lieux sont sécurisés, et disposent de douches et toilettes pour les nomades. Coût: 11,5 €, électricité incluse. Douche à 1 € pour 6 min et WC à 0,50 centimes, durée illimitée et compatibles avec lecteur au long cours de BD.
Et tout ça en ville, à 200 m de la mer, plus précisément près d’un des sites emblématiques de Peniche: Papôa.
Une fois rangé le carrosse, et ici il faut souligner l’infinie patience de Florence capable de remettre chaque chose à sa place quand je suis incapable de savoir où j’ai mis les miennes, on passe aux choses sérieuses.
– Florence, tu as vu mon téléphone?
– Là, sur la tablette, il charge.
Ça, c’est un miracle, non? Non seulement Florence sait où est mon téléphone, mais en plus elle sait qu’il est en charge.
– Et mes chaussettes?
– Sur tes pieds!
Et en plus, notons ici un sens de l’observation sans égal. Il faut dire que le sommeil de la nuit a été léger ainsi qu’en atteste la montre connectée: 30% de sommeil profond, mais un taux d’oxygène au plafond. Ce qui démontre qu’un sommeil léger a un effet direct sur la capacité à retrouver les chaussettes.
Bobby Lapointe aurait sûrement apprécié cette qualité et fait une chanson pour célébrer la chose.
Première chose sérieuse: rendre visite à Papôa. Cette presqu’île vaut bien la visite. Un pilier haut d’une vingtaine de mètres résiste encore et toujours aux assauts des vagues. Pour rejoindre l’extrémité de la presqu’île, il faut emprunter un chemin tapissé d’argile ocre, ramollie par les pluies de la veille. Ça colle aux semelles et ça garnit même les côtés des semelles. Un vrai bonheur d’emporter avec soi une parcelle de la terre du Portugal quand dans tant de pays, la collecte d’échantillons de roches est strictement interdite.
Sur le bord des falaises, quelques pêcheurs moulinent, mais vu le bouillon qui s’épanouit en contrebas, nul doute qu’ils doivent taquiner le bar. On pourrait ainsi rester assis, regarder l’océan se fracasser sur les falaises. Mais comme on a déjà notre brevet supérieur d’observateur de vagues décerné par un jury qualifié de la Presqu’île St. Laurent, à Argenton même, on sera dispensé. On peut donc passer au “spot” suivant.
– Florence: tu crois qu’il y a des toilettes au Continente?
– Vu la taille du magasin, oui, aucun doute. Cap sur Continente de Peniche.
Quelques minutes plus tard…
– Ils sont dégueulasses leurs sanitaires. Des papiers qui débordent des toilettes, de l’eau partout…
– Tu es sûre que la clientèle de ce matin n’était pas française?
– C’est malin. Tu as toujours dit que la richesse intérieure d’un pays se mesurait à l’aune de ses toilettes… Non?
– Et si on allait acheter du poisson?
– Où?
– Ben, dans le magasin, voyons.
– Et c’est ainsi que la phrase “Pouvez vous me lever les filets de ce bar?” traduite en portuguèche sur mon smartphone, toute prête, avec le son prêt à démarrer, je fais la queue pour acheter du bar d’aquaculture à 12,99 €/kg, prix imbattable qui aurait ruiné les aquaculteurs français, s’ils n’étaient déjà morts. Quand je déclenche la lecture en portugais de Google, le poissonnier me fait un grand sourire et me dit:
– “We speek english here. This fish?”
– Euh, si, oui, yes, this roballo.
– Yes, nice seabass!
Et en un clin d’œil, le poisson se voit la tête, les nageoires tranchées, la peau écaillée, et les filets levés. Le pauvre, il n’avait aucune chance d’en réchapper. Il n’a même pas eu le temps de prévenir ses congénères qu’il fallait fuir de la cage d’élevage. Que déjà le rire du poissonnier résonne dans le magasin. Les poissons sur l’étal tentent désespérément de se cacher sous la glace. Mais d’un geste habile, il les rattrape par la queue et fait briller leurs écailles au milieu des cristaux de glace. Alors, seules les gouttes d’eau s’écoulant de l’étal font office de larmes. Poissons, aux yeux tous ronds, qui jamais ne se ferment, on vous aime avec du citron (dixit Bobby).
– Florence: tout ça pour acheter un poisson? Quelle affaire.
– Non, parce que j’ai aussi acheté du thon rouge pour faire des tatakis.
– Alors, tu les fais.
– Pas de problème. D’ailleurs, tataki t’a quitté, tataki t’a quitté…
Reprenons: les poissons au frigo, plus rien ne nous empêche d’aller voir le port de pêche de Peniche.
Plus rien? Et bien si. Car sur place, on découvre qu’il s’agit d’un espace clos, dédié aux professionnels. Comme dans beaucoup d’endroits, ils ont dû en avoir marre de se faufiler entre des touristes désœuvrés. Qu’à cela ne tienne, on poursuit jusqu’à la dernière jetée accessible en voiture, car on a calqué notre comportement sur celui d’un touriste normal. Arrivés à la jetée, on sort, on regarde la plage, ses rouleaux et au loin son attroupement de surfers agglutinés en haut de plage. Comme nous sommes plus que des touristes normaux, on voyage avec une paire de jumelles. Utiles pour surveiller les voisins dans les campings, mais aussi pour regarder les surfers dans les vagues. Il y a manifestement une compétition en cours. Car la plage que nous observons n’est pas n’importe laquelle. Il s’agit de ¨Praia dos Supertubos”, la plage des super-tubes.
Mais aujourd’hui, le vent de sud-ouest écrase le sommet des rouleaux et les surfers ont à peine eu le temps de prendre la vague qu’ils sont écrasés et brassés. Mais ils doivent aimer ça, car ils recommencent.
Port de pêche fermé, compétition contrariée. On passe à l’étape suivante. Cap à l’ouest: Revelia do Remédios. Ici le littoral est le résultat d’une curieuse érosion. La roche sédimentaire est fracturée en galettes empilées sur des hauteurs improbables. Issues d’une sédimentation il y a quelques 180 à 200 millions d’années, elles s’exposent aux vagues, à la pluie et aux vents. Le résultat est saisissant, mais peu engageant, car il y a des trous partout. Et au pied des falaises, le fracas incessant des vagues qui déferlent.
Sur un rocher, un peu plus loin, un cormoran huppé et des mouettes se racontent leurs parties de pêche.
– Les mouettes, dubitatives: “tu as déjà réussi à attraper un seul poisson avec des ailes aussi mal foutues et complètement trempées?
– Le cormoran: oui les commères, car moi, je plonge. Et devinez? C’est kika attrapé la maman des poissons?
Ici, une digression s’impose: Bobby Lapointe aurait eu 100 ans cette année et un stationnement à Peniche rappelle son impérissable vers :
[Mon père est marinier. Dans cette péniche. Ma mère dit la paix niche. Dans ce mari niais. ]
Dans le même ordre d’idée, en forme d’hommage:
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– F: Ton tataki de thon est toc, tic toc, tic toc, ton veau doux est tout mou et mon vaudou itou, ton tataki de thon ne vaut pas mon veau doux…
– J: Ton veau doux va à l’eau et ton eau étalée t’a toute éclaboussée tic toc tic toc
– F: Tataki t’a quitté tataki acquitté, tataki attaqué tic toc,
-J: Je sais, ta tata est atteinte aux mollets, qu’elle a de poulets, cot cot, cot cot…
– F: Nananère, ton tataki de thon est raté, raté, et ton poulet loupé, loupé
-J: Ah de ce riz de veau je ris, je ris, et de ta tarte tatin aussi, qui vaut pas ton gratin, gratin.
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Reprenons. nous sommes déjà le 19, avec toutes ces zanneries, on ne voit plus les secondes passer.
Nous avons repris notre course sans fin vers le nord. Nord sur lequel Nazaré a jugé bon de se poser. Alors, à Nazaré, on a garé. Face à la mer. D’abord aux abords du Faro, puis face à la plage du nord, la célèbre Praia do Norte, celle qui accueille les compétitions internationales de surf extrême.
D’extrême, il n’y avait que notre patience. Devinez, il pleut, il y a du vent et même des nuages. Mais pas de vague géante, moins encore de vague moyenne. Non, rien que des petites vagues, selon les standards du coin.
Alors, après une petite marche sous la pluie, on a hésité avant de tenter une marche sur l’eau. Mais l’eau est froide. A défaut, on a pris notre petit déjeuner sur un parking, face aux déferlantes, sur la Praia do Norte. Quel plaisir de voir ces rouleaux s’écraser en nuages d’écume, sans avoir besoin de mettre une pièce de un euro dans la machine! Et aussi quel plaisir de manger dans notre maison quand les autres sont encore sur la plage, arrosés.
La pluie redoublant d’intensité, on s’est replié sur le campismo local. Pour prendre un thé. Florence confirmera.
14-17 mars
Ou comment le tram 28 donne un coup de jeune aux vieilleries.
Comme pour Barcelone, nous avons décidé de consacrer quelques jours à la visite de la capitale du Portugal. Pour cela, on a posé le véhicule au camping Orbitur de Costa Caparica et utilisé les transports en commun. Un peu plus compliqué cette fois-ci.
Prendre d’abord un bus (n°3011) devant le camping, jusqu’au terminal du ferry de Cacilhas. Puis prendre la navette Cacilhas – Cais do Sobré de l’autre côté du Tage, puis les transports en commun de Lisbonne, ou user les semelles. Idem en sens inverse en fin d’après-midi. Pour Lisbonne, nous avons pris des cartes “Lisboa Card” 72h qui donnent accès à tous les transports en commun, plus des accès à une douzaine de monuments emblématiques.
Par contre, pas d’interconnectivité avec le ferry, pas davantage avec les bus de Caparica. Il reste quelques améliorations à apporter au confort des voyageurs. Mais surtout, ne rien changer au tram n°28. Une antiquité jaune, emblème de la ville. Datant des années 30 et bientôt centenaires, les voitures de ce tram voyagent à l’unité, et passent dans des rues et des virages inaccessibles aux trams modernes.
Par contre, se faire vacciner au préalable contre l’allergie aux queues, car la cohorte de touristes semble inépuisable. En fait, pour ne pas faire la queue, il suffit d’aller 3 ou 3 stations après le départ…
Le tour de tram donne un aperçu rapide des quelques quartiers du centre ville. Premières impressions: c’est très animé, encombré, mais c’est variable selon les heures, c’est déconseillé pour les fragiles du dos. C’est pittoresque à souhait, mais il faut croire que la capacité d’attention des touristes est inversement proportionnelle au temps qui passe. En fin de voyage, une bonne moitié des voyageurs avait sorti l’incontournable mobile et ne regardait plus au dehors… Un tram hors d’âge, parfaitement opérationnel avec des couinements d’origine très typés.
A noter que cette démarche consistant à garder des moyens de transports anciens en service est aux antipodes de ce que font les japonais. Dans ce match entre la valeur ajoutée de l’ancien et celle du moderne, Lisbonne est la gagnante.
Et maintenant, place aux visites des sites remarquable de la ville.
Méthode de sélection:
– Florence, tu veux faire quoi demain?
– Ben je sais pas.
– Ben, moi non plus alors.
– Pourquoi pas la Tour de Belem et le couvent de Jeronimos à côté?
– Pas de problème. C’est quoi le métro ou le bus pour y aller?
– La ligne pâle ou le bus 15.
– Ah, c’est mâle, ce pâlin qu’on voit à peine. Pouvaient pas mettre des couleurs franches? On va en crever de cette pâlitude imbécile.
– Ce pâle est très visible.
– Oui, je sais, tu es et mes yeux et mon guide. On va où?
– Prend donc tes médicaments Papy…
Bon, d’accord, il y a d’autres méthodes de sélection plus efficaces, mais celle-ci est originale, opérationnelle, et autorise toutes les boucles inutiles.
On a fait notre boulot de touristes:
– Tour de Belem: il faut tout d’abord trouver le “kiosque du jardin” pour retirer les billets. Une fois les billets en poche, il faut faire la queue pendant au moins deux heures pour avoir le droit, toujours dans la foule, de visiter des vieilles pièces en pierre, des escaliers en colimaçon. On a renoncé. Tourisme de masse, c’est la poisse.
– Monastère des Jeronimos. On fait la queue au kiosque ad hoc pour retirer les billets et quand c’est notre tour on nous dit que là, il n’y a pas besoin de billets, la carte Lisboa suffit. Grrrr. Logique locale.
On arrive pour la visite: l’église est fermée pour restauration. Seul le cloître peut se visiter. Ce que l’on fait. Mais comme on est des enfants gâtés et que l’on a visité le cloître du Mont Saint Michel il y a quelques années, celui-ci nous parait chargé, lourd, pesant. Sans doute est-ce remarquable. On a juste un peu de mal à s’en convaincre… Par contre, pas trop de monde. Une surprise.
– Château de Saint Georges (Castello São Jorge). Beaucoup, beaucoup de monde dans les rues sur le chemin du château. On emprunte le bus 737 pour y monter. Il prend le même chemin que les touristes à pied, les touristes en tram 28, les touristes en tuk tuk, les touristes en carrosse des années 1920, mais version électrique. Un grand bravo au chauffeur qui avec un vrai bus passe dans des endroits où il ne reste pas 10 cm à gauche et pas davantage à droite. Les piétons sont contraints de s’écarter ou de se planquer dans les portes cochères.
Arrivé là-haut, la vue sur Lisbonne est magnifique. Rien que pour cela, la montée est conseillée. Le château lui-même est un peu… vide. Heureusement, quelques paons mâles font le spectacle, sans trop se faire prier.
L’un d’eux fait régule d’ailleurs le flux de touristes dans la descente d’escalier donnant accès aux toilettes. On se demande qui est le dresseur?
Vers 15 h, il commence à faire froid et la pluie se met à tomber. La descente en bus 737 est encore plus impressionnante que la montée. Sans que l’on sache très bien s’il y a une relation de cause à effet, on constate d’ailleurs que le bus est vide sur toute la section très pentue.
Direction le métro, d’où l’on rejoint l’hôtel Exe Saldanha où l’on se pose pour la nuit.
Pour les 74 ans de Florence, on va s’offrir un lit et une douche confortables.
La pluie a redoublé d’intensité. On se croirait dans un pays d’Europe du Nord. Selon certains portugais, nous aurions un printemps pourri. Nous, on ne voit pas trop la différence avec la Bretagne. Le vent est peut-être moins fort ici?
Pour finir la journée du 16, on va diner dans un restaurant asiatique/fusion. Fusion veut dire, que c’est supposé être moderne, que c’est une cuisine revisitée et qui si les goûts sont médiocres, c’est parce que c’est expérimental… Finalement, ce n’esst pas trop pire, mais quand on a connu l’original, les copies approximatives ont peu de chance de rivaliser.
– Le serveur: c’était bon?
– le touriste: la version originale au Japon est, comment dire, plus simple, plus délicate au goût, mais ça va. On n’est pas au Japon.
– le serveur: thank you.
– le touriste: obrigado.
– Florence: tu lui as dit quoi?
– que c’était bon et que tout va bien. Bon, d’accord, ça uarait pu être mieux pour ton anniversaire, mais à 6 min à pied de l’hôtel, sous la pluie, les miracles se font rares. Tu vas régler?
– Comment ça, pour mon anniversaire? Il ne manquerait plus que ça!
– OK, ok, pas de fâcherie, je m’en charge. Tu passes ta carte?
17 mars au matin, il pleut des cordes. Voila qui va compliquer toute visite à Lisbonne. Et comme nous sommes lundi, c’est jour de fermeture sur les sites publics. Les musées, c’est pratique quand il pleut. Tant pis, on va demeurer aussi bête ce soir que ce matin. L’avantage, c’est que l’on ne risque pas d’oublier ce que l’on n’a pas vu.
– C’est important de ne rien oublier, pas vrai Florence?
– Qu’est-ce que tu dis?
– Que l’on ne risque pas d’oublier ce que l’on n’a pas vu aujourd’hui.
– Et qu’est-ce que l’on n’a pas vu aujourd’hui?
– Le musée national des Azuleiros, la Tour de Babel…
– Pour la Tour de Babel, pense à prendre un traducteur.
– Pourquoi? Et ça se dit comment en portugais? Tour de baleine?
– Faudrait pas exagérer, je n’ai pas encore un tour de baleine. Non, pas Babel, pas baleine, Belem.
– Oui, bien sûr, Belem. Au fait, tu as ton ticket que l’on a pris samedi pour la visite?
– …on est lundi et le lundi, qu’est-ce qu’il y a le lundi?
– c’est la rentrée des classes.
– OK, alors prend ton cartable!
Comme on peut ici le constater, un séjour à l’hôtel, c’est très dangereux. On se ramollit dans des draps. On passe des plombes sous une douche bien réglée dans une pièce chauffée. On va y remédier. Ce soir, pause dans un lieu spartiate. Eau froide à la douche, aux toilettes, à l’évier histoire de reprendre le rythme. Enfin, peut-être on verra.
La pluie dessine un long chemin mouillé sur lequel les phares des voitures font des traînées sales. On va ainsi découvrir les routes de quelques sites bien traités dans les guides: Cascais, Cabo de Roca, Ereceira, Lourinha et pour finir, Peniche.
Nous n’aurons pas la même tendresse. C’est moche, sans aucune unité architecturale ou urbanistique. Et c’est… comment dire? Humide, c’est humide. Et c’est vert, vert tendre même là où les jeunes feuilles des arbres dessinent de grandes taches sur les collines.
Demain matin, si la météo le permet, visite du port de pêche de Peniche, le plus important du Portugal. Et après on dira que l’on ne fait pas dans le culturel!
Arrivé à ce stade d’inanité dans le récit, il est temps de procéder à un test d’instantanéité:
– Question: quoi de marquant aujourd’hui sur le littoral de Peniche?
– Réponse: les plis sédimentaires où un artiste maçon à alterné les couches avec notamment plusieurs couches couleur brique. Une merveille. A condition d’être sensible à la mise en plis.
13 mars
Ou comment Google et les sociétés autoroutières nous plument…
Avant de visite Lisbonne les jours prochains, nous avions prévu de consacrer la journée à la péninsule de Setubal et à la Costa de Caparica, du moins si la météo le permettait.
Cela semblait très mal parti. A 8h du matin, une pluie n’annonçait rien de bon, pas plus que les flaques d’eau autour du véhicule, témoins des précipitations de la nuit.
Au menu du jour, la visite d’un petit village au pied de la Serra d’Arrabida: Portinho da Arrabida, puis la pointe de la presqu’ile, le Cabo Espichel, avant de terminer par la lagune d’Albufeira (Lago de Albufeira). L’itinéraire envisagé devait plus ou moins décrire un triangle.
Activation des outils de pilotage, à commencer par Waze. En dépit du paramétrage d’exclusion des autoroutes, les itinéraires proposés incluaient soit une section autoroutière, soit des détours absurdes décrivant des passages multiples sous les sections d’autoroute. Nul. Essai avec Maps, qui appartient à la même compagnie à savoir Google. Même scénario. Jusque là, c’est cohérent avec la logique qui consiste à envoyer les voyageurs sur les autoroutes pour améliorer les profits des sociétés autoroutière.
On prend la route. On boycotte systématiquement toute tentative de nous faire rentrer sur une autoroute. Hélas, ça se paie. L’itinéraire que nous suivons est urbain, saturé de rond-points et de ralentisseurs, le tout sur des chaussées défoncées. De quoi mettre de mauvaise humeur.
Quand enfin nous quittons les zones urbaines et la proximité des autoroutes, la navigation redevient “normale”. Au total il nous aura fallu 90 min pour parcourir 50 km.
La descente sur Portinho de Arrabida est… intéressante. Le final est à sens unique avec une série de chicanes en descente raide, pour arriver sur un parking minuscule en bordure de mer, au fond d’une crique où deux restaurants captent les visiteurs. C’est beau, mais sans intérêt, à l’exception du départ de randonnées que nous ne pouvons faire.
Intérêt très limité, peu conforme aux commentaires des guides. La remontée pour aller vers Sesimbra et Cabo Espichel est sans problème, par contre le reste de la route est assez défoncé et très inconfortable, surtout lorsque les lombaires ont déjà fait du chemin.
Le Cap Espichel est par contre spectaculaire. Pelouse maritime rase dominant des falaises abruptes et déchiquetées par la houle d’ouest. Goélands, vent violent, église et monastère en ruine, l’ambiance est quelque peu sinistre. Par contre dès que l’on pose le regard par terre, la pelouse maritime livre quelques petites merveilles, avec notamment une colonie de magnifiques petites fleurs bleues avec des plages blanches. L’identification avec Plantnet indique qu’il s’agit très probablement de Moraea sisyrinchium (L.), ou moréa faux sisyrinchium (cela ressemble à un petit iris).
Un peu à l’écart des narcisses sont également en fleurs (Narcissus bulbocodium (L.), dont le nom proposé en français est trompette de méduse.
Et pour couronner le tout, sur un talus en direction du phare, une petite colonie d’orchidées en fleurs achève de compenser la médiocrité du trajet de la matinée. Il s’agit très probablement de l’orchis d’Italie (ou orchis de l’homme nu, Orchis italica) commune aux pays du pourtour méditerranéen et attestée au Portugal.
Les falaises sont également spectaculaires avec des plis sédimentaires dans la roche, inclinés et torturés par les mouvements tectoniques.
Seul bémol: le vent fort et continu qui achève de fatiguer Florence. On quittera les lieux avec soulagement. Prochaine étape, la lagune d’Albufeira.
Juste pour voir, nouvel essai des outils de navigation. Rebelote. Pour faire un trajet de 15 km ils proposent de rejoindre l’autoroute et effectuer une belle boucle inutile.
La solution: proposer aux outils de navigation des trajets fractionnés, où pour chacune des étapes l’évidence est quand même retenue: l’itinéraire sans péage et le plus court. Je re-précise que le paramétrage des outils excluait les péages, pas nécessairement les autoroutes en cas de section gratuite.
Arrivés à la lagune d’Albufeira, on découvre le cordon de sable la séparant de la mer. Le site est de toute beauté, avec des langues de sable résultant des fantaisies des courants et des vents. Quelques rares promeneurs et kite-surfers font douter du fait qu’il s’agit d’un lieu consacré au tourisme. Un sentiment de plénitude s’installe progressivement lors de la contemplation du site. Seul le bruit des rouleaux qui s’écrasent accompagne les visiteurs.
Retour au camping de Caparica, navigateur éteint, en suivant la côte. Itinéraire à privilégier: plus court, beaucoup plus beau, avec moins de chaussées dégradées et de circulation.
Si l’on devait refaire la journée, on commencerait par la fin et on finirait par la fin. Ou mieux encore, avec une bonne vieille carte en papier qui rappelle lors du pliage que nous ne sommes pas des mutants (consulter ici la rubrique à brac de Gotlib).
Photos à suivre.
12 mars
La perfection est un mythe, le pire non.
Aujourd’hui, Costa da Caparica
Florence rêve d’arabica
Temps maussade
Saudade.
Coupez!
Non, attendez.
On peut toujours faire un effort
et mettre un soleil
qui brille très fort.

11 mars.
Le pire n’est jamais sûr, la perfection non plus…
Cette journée est l’une des plus inattendues du voyage. Non en raison des paysages, de la culture locale ou de rencontres extraordinaires.
Rien de tout ça.
L’ordinaire après quelques jours de remontée le long des côtes du Portugal ce sont de magnifiques plages désertes, balayées par les vents et l’écume des rouleaux qui déferlent. Le tout avec des noms exotiques, au moins vu de Bretagne: Praia de Malhão, Praia do Areão. Des sites magnifiques qui se méritent car les routes d’accès sont des pistes défoncées, avec des nids de poule incontournables. Une fois sur place, il ne reste plus qu’à admirer l’océan et le ciel changeant au gré des grains. Et entre les grains, pour celles et ceux qui sont intéressés par la botanique, à se précipiter dans les dunes où des plantes se battent pour s’implanter et survivre dans des conditions extrêmes. Au sommet des dunes, il est possible d’observer un lieu de torture végétal extraordinaire, la transition entre le “bush” composé de touffes d’espèces xérophiles (supportant bien le sec) et la forêt. Les pins à la frontière entre les deux ensembles sont, ras, tordus, difformes, pelés, mais porteurs d’une multitude de boules de pin. Quelques dizaines de mètres derrière ce front de colonisation, les troncs sont déjà droits et la forêt s’épanouit.
Bref, pour les amateurs de nature, les lieux sont intéressants. Malheureusement, en dehors des inévitables goélands, les oiseaux (plus de 20 espèces différentes selon les panneaux pédagogiques) sont invisibles. Le vent sans doute.
Après ce grand bol d’air, cap sur le nord. Direction la presqu’ile de Caparica au sud de Lisbonne.
Tout se serait bien passé si le chauffeur du véhicule n’avait pas quitté la route nationale pour prendre l’autoroute A2. Une fois sur l’autoroute la séquence vire au gag:
– on a dépassé la cible du jour (Alcacer do Sal) où un camping municipal repéré par Florence a de super-notes.
– qu’à cela ne tienne, on continue sur l’autoroute, mais comme il n’y a pas de sortie prévue à moins de 30 km au nord, on prend laa tangeante sur la branche qui se dirige vers l’est en direction d’Evora, en espérant une sortie plus proche.
– Bingo, la sortie est à 19 km, direction est-sud/est. Il ne reste plus qu’à parcourir le troisième côté du triangle.
– Ce que l’on fait. Route cheminant au travers de belles forêts, avec quelques nids de poules isolés, traitres à souhait. Tout va bien, 36 km et 27 minutes. Facile.
– On arrive au camping d’Alcacer do Sal. Ouf. Direction, d’un pas décidé: la recepcião. Et là un portugais, avant même toute question écarte les bras en signe d’impuissance et d’exaspération: “camping is full, full, full!.
– Ah, on a bonne mine. Florence veut se garer devant l’entrée à côté d’un camping-car déjà installé. Je ne suis pas d’accord. On cherche un camper-park dans les environs. Park4night évoque un parking proche, à côté des arènes. On y va. C’est glauque, pas d’eau, pas de toilettes, un cadre peu engageant. On fuit. A proximité du camping, le parking d’Intermarché. Non, d’autres ont dû quitter les lieux la nuit. Le parking à côté du camping. C’est plat? Presque. C’est bon? Oui, non? Peut-être.
– Après toutes ces hésitations, il est 19h30. J’appelle le camping Orbitur de Caparica pour savoir jusqu’à quelle heure la réception est ouverte. 21h30. On y sera en sécurité.
– 20h30, après avoir repris l’autoroute, être repassé où nous sommes égarés, après une conduite de nuit sur une branche d’autoroute merdique, mal éclairée, mal signalée, on arrive au camping de Caparica. Tout est parfait.
Ce soir, au menu: bacalhãu com natas.
Pour le trajet du jour, une aquarelle serait la bienvenue. Si certains lisent cette chronique, il faut envoyer une pétition à Florence et réclamer des aquarelles de voyage!
Vengeance:
– Tu sais combien les trajets d’autoroutes inutiles ont coûté aujourd’hui?
– mmm…
– 24 €.
– Bande de voleurs!
10 mars
Pluie, vent, tempête.
Tumulte au dehors.
Calme à bord
Dans nos têtes.
Trop long à lire
Mieux vaut en rire
Le calme rien de pire
Passe un vizir.
Trop long à dire
Cette histoire de vizir
Qui par amour d’Eleanor
A jamais dort, mort.
Trop triste pour rire
Cette histoire de vizir
Dont le lointain écho
S’entend à Porto Covo
Où un père imbécile
Furieux de cette idylle
Par le fil de l’épée
Mit fin à l’épopée.
A vous de rechercher et de compléter la légende du vizir de Porto Covo. Nous nous sommes trop fatigués pour vous la raconter. Il était une fois…
– Il y a de la soupe, ce soir?
– Oui, tu as déjà oublié? Elle est faite depuis hier.
– Et quoi d’autre?
– Des patates au lard.
– Ca, c’est le paradis, non?
– Tais-toi et épluche.
Une petite aide pour la légende du vizir, mais qui demandera un effort en anglais… Halte à la facilité!
Almir et Eleanor
Pour rajouter à la confusion ambiante, les photos présentées aujourd’hui délaissent la pluie et les vagues pour rêver dans le jardin du vizir.
Question: de quoi s’agit-il? Un tirage au choix pour le gagnant.
9 mars
Ou comment les vagues rendent fous les plus sages…
Après avoir rangé tout notre bazar, douché ce qui finit par avoir besoin d’une douche, nettoyé les vitres et le pare-brise à l’intérieur, car saturés de condensation, nous voilà prêts à quitter ce camping du bout du monde. Avec ses pins parasols à l’entrée et les pins maritimes dans la section camping-cars, il doit être très agréable lorsque la météo est plus clémente. Ce qui n’est pas le cas en ce moment. Par exemple, cette nuit, vers 4h du matin, une pause réveil activée, il m’a pris l’envie d’aller contempler le ciel et le bloc sanitaire. Balade en “yukata” avec ceinture ad hoc comme il se doit, pour impressionner les oiseaux de nuit. A peine avais-je parcouru 5 m sur les 30 à franchir, que le ciel s’est ouvert et que des trombes d’eau se sont abattues sur les arbres et les habitants du sous-bois. Malgré une accélération foudroyante, un saut de marche en pleine nuit , une course haletante dans les flaques d’eau et les ruisseaux nocturnes, j’arrivais au bloc (sanitaire) trempé. Et une fois arrivé, le franchissement imprévu d’un dégueulis de gouttière sournoise acheva de parfaire la douche. Coincé à 4 h du matin, trempé, avec pour toute perspective la contemplation d’un grain vicieux, voila qui donne l’impression de vivre des aventures…
Le souvenir d’une famille, sous une bâche sommaire, dans le camping de Lagos, me traversa l’esprit et la perspective d’une éclaircie et de la couette chaude dans le camping-car relativisa la situation du moment. Finalement, tout allait bien, la pluie finit par se calmer, la couette était bien chaude. Que demander de plus?
Le sommeil. Ce qui ne tarda pas.
Objectif du jour: remonter vers le nord en longeant la côte ouest du Portugal. Météo pluvieuse et grains annoncés, ainsi que vent fort. Le premier arrêt sera à Carrapateira où la ôte rocheuse cède la place, sur quelques kilomètres à une magnifique plage de sable.
L’arrivée sur les lieux est spectaculaire. La plage est blanche d’écume sur une plusieurs centaines de mètres en direction du large, les rouleaux se succèdent et s’écrasent en un vacarme infernal. Et un nuage d’embruns surmonte la scène, balayé par les vents vers l’intérieur des terres.
A l’extrémité sud de la plage, facilement accessible par une piste praticable, mais interdite aux camping-cars, les vagues viennent s’écraser sur les rochers en gerbes d’écume. Des passerelles en bois permettent aux visiteurs d’approcher les falaises rocheuses en toute sécurité. Des passages permettent aux plus téméraires de franchir les barrières et de rejoindre les sentiers piétonniers de long de la falaise. Des familles avec enfants se baladent ainsi auprès des tombants, sous la menace de gerbes d’eau dépassant la hauteur des falaises.
Excellent! Voila qui remplit la première condition pour faire des bonnes photos de vagues: avoir une échelle, pour que la taille des paquets de mer soit clairement visible au premier coup d’œil.
Pour le reste, les vagues défilent, les paquets de mer et les embruns aussi. Le bruit sourd des explosions de vagues sur le tombant des falaises accompagne le tout.
A un endroit précis, on a même le privilège de voir un soufflant en activité, donnant l’impression d’avoir un geyser en activité sur la falaise.
On déclenche, on déclenche. Car chaque vague est supposée être plus belle que la précédente. Voila qui promet une belle séance de tri de photos et d’élimination des réplicats sans intérêt.
Et puis , sans crier gare, un grain arrive du sud. En un instant nous sommes trempés, aucun abri à l’horizon, puis la grêle s’y met et ajoute une touche exotique à la punition. Ça dégouline. Et si ça suffisait pour aujourd’hui?
Florence décide que oui, et rentre au camping-car. Comme d’habitude, je pars du principe que plus loin, ce sera mieux. Et mouillé pour mouillé, ça ne risque plus grand chose, dès lors que le matériel est protégé.
Je ne serai pas déçu. Plus loin, c’est mieux: vagues plus hautes, plus fortes, plus dantesques. Pour tenter de saisir la succession de gerbes d’écume, je tente quelques vidéos au smartphone. Précisons ici que j’ai quitté la passerelle et rejoint le sentier piétonnier le long des falaises.
En cours d’enregistrement, un bruit sourd dans le dos m’indique qu’une vague plus puissante que les précédentes vient de s’écraser. Je pars en courant, objectif stupidement tourné vers le sol. Quand je reprends l’enregistrement normal, les paquets de mer s’envolent autour de moi et atteignent des hauteurs impressionnantes. Je file sans insister. Le train des 4 ou 5 vagues qui frappe le littoral est assez dingue. On va arrêter les photos de vagues pour aujourd’hui. Ça rend fous les photographes. Florence vous le confirmera. Elle qui aujourd’hui a succombé à la “déclenchite”, maladie des chasseurs de vagues.
Remarque sans importance: aujourd’hui, pas un surfer à l’eau. Houle courte, déferlantes pourries, laisse d’écume envahissante surplombée d’embruns. Magnifique mais peu praticable.
Photos de la galerie ci-dessus faites au smartphone Pixel 6 pro
8 mars
Pourquoi les pointes portent des noms de saints?
Camping d’Orbitur Valverde. On se gare d’abord sous de grands arbres, qui donnent une impression d’abri contre le pluie. Jusqu’à ce qu’une rafale de vent plus forte que les autres fasse tomber des tonnes d’eau sur le toit du carrosse. Ok, on change de place. En marche arrière sur l’un des emplacements proches. Pas plat. La roue arrière, en s’enfonçant dans le sol a creusé une rigole qui charrie déjà un petit ruisseau. On va avoir du mal à garder la moquette propre. Toute la nuit, le délicat bruit de la pluie sur le toit du véhicule va bercer nos rêves. Il ne manque plus que la cheminée et le feu dedans pour être au paradis.
Au petit matin, en ouvrant les volets et soulevant les rideaux pour surveiller les voisins (on suit scrupuleusement les instructions de Poutine pour être prêt au moment de la prise de pouvoir par Bolloré et son gang), on aperçoit un homme seul, bien couvert contre la pluie de la tête au pieds qui émerge d’une tente minuscule de 50 cm de hauteur baignant dans une couche d’eau et de boue. Philosophe, il prend le temps, de boire, de fumer, d’observer les étoiles, puis de retourner dans sa tente. Sortant de notre luxueux carrosse, je lui adresse un bonjour, en anglais, car je sais depuis la veille qu’il est allemand et parle aussi anglais et espagnol.
Je lui demande si la nuit n’a pas été trop difficile. Il me répond que ça aurait pu être pire. l’eau n’est rentrée que par le tapis de sol, mais il va aller acheter une bâche pour remédier au problème. Curieux, je m’enquiers des jours à venir qui sont annoncés au moins aussi, voire encore plus, pluvieux. Non, il n’a pas d’inquiétude car il devrait récupérer son véhicule en réparation la semaine prochaine.
Un peu plus tard, on devait le revoir, en pleine séance de yoga sur la plage de Praia de Luz, sous une pluie battante. Trempé dehors, pieds nus en l’air, seul humain perché sur un tas de sable… Indifférent à la marche du monde.
Franchement, vues les conditions dans lesquelles il affiche une sérénité incroyable, nous n’avons pas le droit de nous plaindre. Notre carrosse est étanche et grâce à notre cheminée, on peut passer des soirées d’hiver extraordinaires.
Au terme d’un petit-déjeuner laborieux, d’un rangement non moins laborieux des câbles électriques et des cales de niveau baignant dans la boue, on a le plaisir d’observer le manège des oiseaux du camping venant manger les miettes de pain mises à leur disposition. Moineaux, toujours aussi vifs, tourtererlles turques, pigeons, merles méfiants, et pie ibérique nous rendent visite. Cette dernière a un plumage magnifique, qui ne peut être confondu avec aucun autre. Et un cri aussi désagréable que celle de notre pie commune.
Au terme de tout ce travail (hum), on prend la route pour visiter la Pointe Saint Mathieu. Heu, non, la Pointe Saint Vincent (Sao Vincente). Pluie, sous forme de grains, vent fort avec rafales tumultueuses, houle formée de sud-ouest s’écrasant sur les falaises. Tout y est, on est chez nous, même les embruns viennent immédiatement recouvrir le pare-brise et la lentille frontale des objectifs des appareils photos.
Le vent rend fou, parait-il, mais nous n’en sommes pas là.
On tente une séance photos. Mais le souvenir des conditions nécessaires pour obtenir des photos correctes refait surface et il convient de ne pas se faire d’illusions. On va peut-être avoir quelques photos de touristes, mais certainement pas des photos d’artistes. Résumons: focale inadaptée (zoom bloqué à équivalent 75 mm), absence d’échelle évidente, contrastes faibles et dominantes de gris sales. Peu importe: c’est beau à l’œil.
Mais qu’est venu faire en ce lieu St. Vincent? Sans doute ce que Saint Matthieu est allé faire à la pointe du même nom, ou encore Sainte Marie (Cabo Santa Maria de Faro). Prier? Méditer? Évangéliser? A moins que cela ne soit plus simplement expier. Expier, mais quoi? Décidément, les traces chrétiennes sont partout. Même les vagues en parlent entre elles et quand elles s’écrasent sur les rochers, on entend les bribes des prières des saints qui s’envolent avec les paquets de mer, aspergent les visiteurs, le nez collé sur leur smartphone pour des selfies stériles, sourds à la poésie des embruns.
Les nuages passent.
C’est l’heure d’éternuer, et de rentrer.
– Florence? Ce soir, on fait de la soupe?
– Oui. Tu la fais?
– Euh, non, ce soir on n’a pas d’électricité, pas de mixeur.
– Et bien, on peut très bien ne pas la broyer.
– Euh… on verra.
Une rafale plus forte noie la suite de la conversation. Saloperie de vent. Il ne respecte même plus une conversation câline.
6 – 7 mars
Ou les errances de camping en camping alimentent la mémoire des parfums…
Après une nuit à Armaçao de Pêra, sur un camping qui gagne à être connu, si l’on recherche un exemple original de bordel spontané, chacun se positionnant où il veut et pratiquement n’importe où dans le camping. Il en résulte une certaine difficulté à se placer, car il est beaucoup plus difficile de respecter un désordre établi que de se conformer à une attribution préalable par la réception d’une place correspondant à une demande explicite.
Sanitaires vieillots, pour certains laissant à désirer, pas d’eau chaude pour la vaisselle, une douche sur deux sans eau chaude chez les hommes -du coup pas testé- des odeurs d’égout provenant des postes de vidanges des WC chimiques. Tout cela fait beaucoup, et pour finir, au lieu de rester deux nuits, on a filé dès le matin. Quand à Armaçao de Pêra, il y a une belle plage, des cabanes de pêcheurs sympathiques et des bateaux de pêche artisanale sur la plage. Sans doute tractés par des tracteurs agricoles. Mais on n’a rien vu de tel. La vieille ville ne nous a pas semblé très intéressante et est assez mal entretenue, traduisant une richesse toute relative.
Direction Lagos vers l’ouest.
En chemin, avant Lagos à Odiàxere, le long de la route, les anciennes souches de saules dans les champs servent de support aux nids de cigognes. Et pour le coup, on peut les observer de très près et à des niveaux au dessus du sol qui permet un angle de prise de vue tout à fait intéressant. On aura même droit à une scène d’accouplement. Rapide et très digne, on vous le garantit!
Le centre ville de Lagos est beaucoup mieux entretenu que celui de Faro et de Armação. La vieille est animée avec une rue principale où les multiples restaurants se font concurrence.
Et surtout, le littoral dispose d’une magnifique plage. Dans sa partie ouest, on trouve des falaises de grès, comme celles que nous avons déjà rencontrées plus à l’est. Les avancées en mer délimitent des falaises qui sont trouées de tunnels pour faire communiquer les plages entre elles. Original et efficace, car il n’y a pas besoin de faire des descente le long des falaises de grès pour chaque petite plage.
Au coucher du soleil, les falaises de grès se teintent d’ocre puis d’orange, donnant l’impression qu’un gigantesque metteur en scène a ordonné de saturer les couleurs.
Un chemin au sommet des falaises a été tracé et est constitué de passerelles avec escaliers là où les pentes sont trop raides. Pratique et efficace pour la balade et la protection des falaises.
Des balades en bateaux sont organisées pour visiter le littoral et les grottes dans les falaises de grès. Mais demain, la météo est très variable, avec averses probables. On verra.
Pour la nuit, on s’est posé dans un camping à proximité immédiate des plages. C’est le camping le plus vétuste et le plus pourri que nous ayons vu jusqu’à présent. Les installations sanitaires sont “collector”. On croirait rentrer dans un bunker, avec des chicanes, le tout carrelé en blanc. Des canalisations d’un autre âge… Des douches dont les pommes n’existent nulle part ailleurs, sauf peut-être dans des installations antiques d’une ancienne colonie portugaise (Angola, Mozambique). Mais, semble-t-il, il y aurait de l’eau chaude. Les miracles de l’hydraulique sans doute!
Comme il a plu ces derniers jours, comme dans le camping de la nuit dernière, il y a des flaques d’eau partout et le sol sablo-argileux colle aux basques.
Mais tout n’est pas si pire: le prix est bas, en rapport avec les services, et l’odeur n’est pas celle des égouts, mais celle des feuilles d’eucalyptus mélangée à celle des fleurs d’orangers du Mexique. Très appréciable, même si hier on a encore plus apprécié l’odeur des fleurs d’orangers au cours de la visite de la cathédrale de Faro
Le 7 mars au matin nous sommes retournés sur le sentier côtier pour poursuivre la balade commencée la veille en direction du sud, à savoir vers la Ponta de Piedade (Pointe de Piedade au sud de Lagos). La côte est toujours aussi belle et découpée. Les falaises de grès coquillier est particulièrement friable et les passerelles sont faites pour sécuriser les visites. Le bas des falaises est rongé par les vagues et les éboulements sont fréquents.
Vers midi, on hésite à pousser jusqu’à la pointe, la météo se faisant menaçante. On passe au déjeuner. On verra ensuite.
Fin du déjeuner et toujours aussi menaçant. On décide d’y aller. On a à peine parcouru 50 m quand la pluie et le vent se déchaînent. On bat en retraite dans le désordre et sans la moindre dignité. Arrivés au camping-car, nous sommes trempés, mais pas à l’intérieur. Comprendre, nos délicates peaux sont encore sèches, mais il s’en est fallu de peu. On prend la route en direction de l’ouest. Et après quelques km on s’arrête au camping Orbitur – Valverde. On n’y voit rien avec la pluie. Les routes en sable de terre compacté du camping dégueulent l’eau de pluie venant des parcelles. On se gare dans la boue. C’est bon pour l’agriculture!
1er au 5 mars
Ou comment les animaux domestiques reprennent leurs droits…
En arrivant au Portugal par la porte sud-est (Monte Francisco), nous nous sommes posés à Moncarapacho, patelin au nom improbable avant que l’on ne découvre que ce n’est improbable qu’en raison de notre ignorance du Portugal et de sa langue.
Dans le camping rural où nous avons trouvé un emplacement pour 3 jours, la majorité des touristes sont français. Cela ressemble même à une colonie française passablement âgée, avec au milieu quelques autres nationalités.
Pendant ces quelques journées, nous allons appuyer sur la touche “pause”. Pour remplacer les chroniques quotidiennes, j’ai suggéré à Florence de faire une reportage sur le camping rural, ses chiens, ses chats, leurs maîtres, sans oublier les poules et le magnifique coq du camping (qui vérification faite n’appartient pas au camping mais aux voisins).
La présence de toutes ces bestioles, combinée au fait que le sol des emplacements est agrémenté de gravillons, se traduit par la présence de mines masquées par de petits monticules. Attention à ne pas poser les pieds dessus, sous peine de libérer des senteurs délicates jusque là confinées.
Demandez à Florence ce qu’elle en pense!
Il faut dire que hier, au beau milieu de l’après midi , elle a pu expérimenter l’une ces armes de dissipation massive (d’odeurs fétides), et de tartinade pralinée garantissant aux semelles un pelliculage particulièrement résistant. Après une bordée d’injures auxquelles son éducation rigoureuse interdit normalement l’usage, elle n’a dû son salut qu’à la présence opportune d’un robinet d’eau destiné au rinçage des WC chimiques. Oui, parce que la vie dans un camping tourne aussi autour d’activités saines, comme le nettoyage des toilettes chimiques du camping-car, le remplissage des réservoirs, la promenade des chiens, la vaisselle, les courses et, pour celles et ceux qui vivent en colonies, l’apéritif et les éclats de rire.
Sans oublier, pendant ce temps, les roucoulades insistantes des mâles de tourterelles turques et de pigeons. Il faut y ajouter, la nuit, les aboiements des chiens des fermes du voisinage, et bien avant l’aube, les chants des coqs qui font assaut de virilité.
On l’aura compris, dans ce petit monde, les animaux reprennent leurs droits. Jusqu’à un certain point, car si certains se baladent en liberté, d’autres sont étroitement tenus en laisse par leur propriétaire. On n’a pas osé demander si c’est pour ne pas gêner les voisins (probable) ou pour éviter des contaminations raciales préjudiciables à la valeur de leur précieux toutou…
Bref, un camping est un petit monde constitué d’ilots qui communiquent plus ou moins entre eux. Des passages obligés, toilettes, douches, espaces vaisselle et lessive peuvent contribuer à favoriser des rencontres éphémères et de brèves discussions. Mais les ilots les plus importants sont constitués par les habitués du camping qui se retrouvent et forment des petites communautés. Nous ne faisons que passer et notre appartenance à ces communautés est exclue. Ni recherchée de notre part, ni attendue de la part des autres qui semblent se suffire à eux-mêmes.
Pour des raisons tenant à des problèmes de dos (une habitude), on va devoir stationner un peu plus longtemps que prévu dans ce camping. Et comme la météo pour toute la semaine est relativement médiocre, avec un épisode pluvieux affectant toute la partie sud-ouest de la péninsule ibérique, il n’est plus question de randonnées en montagne, de balades de plusieurs heures dans les marais. On va devoir faire local et restreindre les efforts. On reste donc deux jours de plus.
C’est l’occasion de prendre le temps de découvrir la région de Faro à petits pas. On va même peut-être se poser dans des chaises de camping sous les mimosas bleuâtres (Acacia saligna) dont les fleurs sont jaunes et le feuillage vert-bleu (glas en breton). Quelle horreur! Enfin, ceci n’est que mon point de vue et je sais qu’il n’est partagé que par très peu de monde…
A noter que le mimosa en question est une plante invasive originaire d’Australie, interdite en France. Mais il faut reconnaître qu’elle a un port séduisant et une magnifique floraison. Aux abords du camping il y a d’ailleurs une autre invasive que l’on retrouve sur les côtes de l’Andalousie: Lantana camara L. Cette dernière possède la particularité d’avoir des couleurs différentes dans son inflorescence: jaune au centre, puis rose saumon et glycine en couronne extérieure (couleurs certifiées par Florence). On dirait une fleur artificielle à la texture plastique. Sur les bords des chemins et dans les vergers, de nombreuses graminées (ou poacées) sont déjà en fleurs et les épis portent des étamines…
Ici, quand la météo annonce de la pluie, ce n’est pas comme en Bretagne où s’il y a une éclaircie, on annonce beau temps. Non, ici s’il y a une averse, ils annoncent pluie… Et aujourd’hui, qui est jour de pluie, nous avons du soleil pour l’instant, ce qui n’exclut pas une averse à un moment ou un autre.
Ce matin, nous avons eu la visite du coq et de la poule (Gallus gallus domesticus). Ils se souviennent apparemment très bien que la veille ils ont eu droit à une distribution de morceaux de noix de pécan, de miettes de pain des fleurs périmé. Constat, la poule est beaucoup plus vive que le coq. Est-ce que parce que ce dernier fait toujours très attention à son paraître, à sa prestance, crête dressée? Toujours est-il que la poule, elle, ne se pose pas de question: elle observe et réagit vite et bien. Quand le crétin de coq arrive à saisir un morceau, la poule en saisit trois. Mais, bien sûr, on ne peut pas généraliser à toutes les poules et tous les coqs, ni à l’espèce humaine chez qui le paraître n’est pas une préoccupation majeure, comme tout le monde le sait… (voir le chiffre d’affaire de la mode!).
Il serait possible de poursuivre avec les photos des différents chiens présents sur le camping. Mais cela risque de donner quelques raisons de penser que les sélectionneurs sont un peu fêlés. En effet, on trouve des chiens minuscules, bien plus petits que des chats standards, absolument ridicules (ce n’est pas de leur faute!), avec des tenues dignes de films comiques. Mais aussi des moyens, des gros, des hauts sur pattes. Mais aussi incroyable que cela puisse paraître, il n’y a pratiquement aucun aboiement. Il faut croire que la génétique a fait des miracles ou que leurs maîtres les ont bien dressés. Mais pour que ce soit intéressant, il faudrait faire ici le portrait du chien et de son maître. Et il n’est pas évident que les maîtres se prêtent au jeu. Difficile d’imiter ici le génial Elliott Erwitt.
Dans la mesure où chaque emplacement correspond à un “titre de propriété” temporaire, faire des photos des occupants avec leur chien reviendrait à une violation de propriété. Connaissant le caractère ombrageux des français sur ce point, on va éviter toute provocation. J’entends presque la grosse voix de Mélanchon tonnant sur l’intrus: “Monsieur, ici c’est la République Française”! Avec les anglais, on ne va pas risquer de compromettre l’entente cordiale au moment même où l’on a besoin d’eux pour défendre l’Europe. Et avec les allemands? Restons amis, on ne sait jamais, ça pourra servir.
Alors, que faire en photo? Mais bien sûr, Florence en train de lire, dans un cadre bucolique!
Et pour finir, au camping de Lagoão, nous avons eu le plaisir de faire la connaissance de Carla, la mascotte, une magnifique ara bleue.
En chemin, nous faisons une halte à Faro. La ville est séparée de la mer par le Rio Formosa, un complexe de bras de mer, et par des iles basses. La vue de la tour de la cathédrale sur la lagune est spectaculaire. La cathédrale est, comment dire? Originale. L’orgue ancien possède un coffre décoré de peintures d’inspiration chinoise, faisant directement référence à l’époque des comptoirs portugais en Asie.
Par contre, les collatéraux sont entièrement décorés de scènes d’évangile, dorées, saturées de détails dans une tradition baroque n’ayant rien à envier à celle des églises de Naples. “Too much, ad nauseum!”
Ici, mon amour immodéré des œuvres d’art de la religion catholique introduit un biais que je reconnais volontiers. Encore que, si ma mémoire est bonne à Naples, capitale du baroque saturé, il existe aussi des églises romanes d’une sobriété exemplaire et d’une beauté absolue.
A proximité immédiate de la cathédrale, une chapelle modeste attire l’attention. Il parait qu’elle est le plus souvent fermée aux visiteurs. Rien de tel lors de notre visite. La chapelle des os, puisque c’est d’elle dont il est question, est construite en mortier incrusté d’ossements, os longs rangés comme des buches, têtes visibles, cranes plus ou moins déglingués… Du meilleur goût, à l’image des ossuaires du Léon en Bretagne. Une fascination pour le morbide rappelant au peuple sa misérable condition et l’impérieuse nécessité de se soumettre pour gagner son salut. Merci!
Pas de photo. Sauf celle de la chapelle des os, réservée à Alain (Kervern) en souvenir de ses années de pensionnat à Lannilis, haut lieu du catholicisme froid et humide du Léon profond.
27-28 février
Ou être abonné à l’extraordinaire relève de l’impossible...
Après Rio Tinto, et la visite de Niebla et de ses remparts mauresques, nous avons passé la nuit dans une aire de camping-cars toute neuve du côté de Beas. Neuve et pas tout à fait finie, ce qui explique que le bloc sanitaire était limité à une portion congrue. Puis nous avons migré vers la rive droite de la rivière Odiel en face d’Huelva où se trouvent les marais d’Odiel. (Parque Natural de Marismas de Odiel). Le centre d’information ferme à 14h et cela limitait le temps de visite. Sans pouvoir dire si à d’autres moments de l’année la visite est plus riche et plus intéressante, il faut bien avouer que nous sommes restés sur notre faim. Les espèces d’oiseaux visibles sont peu nombreuses et surtout l’observation se fait de trop loin.
Le soir nous nous sommes arrêtés dans une aire pour camping-cars (Camper-park Playa de Luz) à Ayamonte, à la frontière avec le Portugal. Comme d’habitude, c’est comble. A notre droite à 10 m un camping-car immatriculé 29 stationne. Les heureux propriétaires viennent de Névez, à côté de Concarneau. Ils rentrent de deux mois de balade au Maroc. Monsieur a le même matériel photo que moi et s’intéresse aux oiseaux. Bizarre passion! Pour cela il dispose du Canon R7 , du zoom 100-400 mm (idem bibi) et en plus du nouveau zoom 200-800 mm. Plus un multiplicateur 1.4, ce qui fait qu’il atteint la focale de 800 x 1,4 x 1,6 = 1792 mm. Sur trépied avec de la lumière, pourquoi pas? Mais c’est probablement too much!
A proximité il y a un marais (celui de Isla Cristina). Là encore, peu d’espèces visibles, craintives et pas de poste d’observation protégé. Au milieu du marais, les ruines d’une ferme aquacole. Si l’on en juge par le nombre de bacs en forme d’entonnoir, il devait y avoir une écloserie, une nurserie. L’affaire a dû faire faillite et l’environnement est incroyablement bordélique et débordant d’objets en plastique: vannes et tuyaux en PVC, bacs en tout genre, câbles électriques, ferrailles etc. Ce n’est pas de bon augure pour le marais car les produits de dégradation du plastique sont drainés par les pluies dans les chenaux, puis dans les bassins, puis dans la lagune et pour finir, en mer.
Plus bucolique: au moment de quitter le site, un tintement de cloches se fait entendre. Un troupeau de moutons encadré par deux bergers est amené sur les berges de bassins pour paître. Diling di ling. Les chiens bergers veillent à éviter la dispersion du troupeau. Et pas de micro-plastique. Que des belles crottes de moutons, garanties biodégradables depuis au moins 5 000 ans.
Pendant la nuit la pluie est arrivée. On annonce une semaine de pluie…
Pour affronter cet épisode pluvieux, on file sur le Portugal, à la recherche d’un terrain de camping où l’on pourra se poser quelques jours. Ce sera le camping rural Lagoão, à côté de la ville de Moncarpaccio… Euh, non, pas tout à fait. Plutôt Moncarapacho.
Le camping est tenu par une française. Et pour une fois les français sont en nombre. Battus les allemands, les néerlandais, les britanniques… Tout ça pour un accueil en français garanti, sans effort de prononciation. Il n’y a pas que dans les marais qu’il y a des moutons!

25-26 février.
Ou comment les extrêmophiles reviennent au galop…
Pendant deux jours, on va vivre au paradis des extrêmes: Rio Tinto.
Une rivière toxique, aux couleurs maléfiques, dans un cadre tout en démesure où des hommes assoiffés de profit ont tenté de marier Prométhée et Sisyphe. Il ne pouvait en résulter qu’un immense chaos et une histoire quelquefois tragique comme le capitalisme minier peut en créer.
Il était une fois, des hommes qui recherchaient des minerais de métaux pour leur procurer un avantage sélectif face à la concurrence exercée par d’autres sapiens. La couleur rouge orange du Rio Tinto, en bordure sud de la Sierra Morena en Andalousie laissait entrevoir que les sols et les sous-sols contenaient quelques produits toxiques. Pas un poisson, pas un insecte aquatique, le seul bruit de l’eau qui ruisselle entre les roches. Les oxydes de fer trahissaient la présence de minerai de fer et de bien d’autres. Aussi n’est-il pas étonnant que les collines des contreforts de la Sierra Nevada au niveau des sources du Rio Tinto intéressèrent successivement les Phéniciens, les Romains, les Wisigoths, les Ibères, les Maures, puis les Espagnols, les Anglais et aujourd’hui les actionnaires de Atalaya Mining Company.
Mais ce sont les Anglais, au milieu du XIXème siècle qui donnèrent à l’exploitation du site la dimension démentielle que nous connaissons. Pire que les Schadoks, ils creusèrent, creusèrent et creusèrent encore jusqu’à atteindre des profondeurs hallucinantes. Ils firent d’énormes trous. Enfin, ils s’arrangèrent pour que la main d’œuvre locale creuse pour eux. Le site d’Atalaya, toujours exploité aujourd’hui, est sans doute la plus grande mine à ciel ouvert du monde.
Atalaya Mining Copper Company n’est que l’avatar bien vivant de nombreuses entreprises qui se sont succédées sur le site.
Et elle soigne sa communication au travers d’une fondation qui fait connaître les bienfaits de la mine.
Le tourisme minier auquel nous avons participé est bien organisé. L’ancienne ligne de chemin de fer pour le transport des minerais a été reconvertie en “petit train” pour excursions. Le jour où nous sommes montés à bord du “Ferrocarril“, il y avait une palanquée d’adolescents accompagnés par leurs enseignants un peu débordés par les cris, les rires, les plaisanteries. Une excellente ambiance, mais 120 db dans les wagons avec des cris perçants d’adolescentes mal accordées dans les aigus… Florence me fait remarquer, à juste titre, que les garçons criaient aussi fort, mais avec des timbres moins marqués dans les aigus. Il eut fallu des boules Quies, mais les dépliants touristiques ne conseillent pas cet équipement. On a donc supporté les cris. Quand les ados se sont dispersés sur le bord du Rio Tinto, le calme est revenu pour quelques instants. Puis le vacarme a repris, bruits de wagons, grincements de roues sur les rails, rires et cris. Le tout, de plus belle. Lors de la sortie du wagon on a vraiment apprécié l’absence de vacarme, du moins jusqu’au moment où l’on s’est retrouvé à la porte du wagon. Les passagers de notre wagon s’y mélangeaient avec les passagers du wagon précédent. Devinez, celui là déversait exclusivement des retraités, sages, disciplinés, muets ou presque.
Je ne puis me retenir de formuler une remarque déplacée:
– heureusement que nous étions avec les adolescents. Autrement la balade aurait pris une allure de sortie de maison de retraite!
– chuuutttt! Un peu de tenue, voyons.
Nous avons ensuite visité le musée, puis le site d’exploitation de Corta Atalaya. Dingue!
Et le lendemain, nous sommes retournés voir celui de Cerro Colorado, tout aussi démentiel.
Et les camions géants, les chargeurs de minerais faisant la navette entre le fond de la mine et le site de déchargement pour le traitement, montaient, montaient, puis descendaient et encore et encore. Chauffeurs, défense de s’endormir, ou la sanction est immédiate: un grand plongeon.
Nous n’avons pas pu nous renseigner sur les accidents du travail sur le site, mais nous avons compris que le futur de l’humanité dépendait de la bonne marche de l’entreprise.
On applaudit à l’exploit, et quand on ouvre un robinet, on contemple les tuyaux de cuivre qui permettent ces miracles, avec une larme sincère.
Si on veut plus d’information, suivre le lien: Atalaya forever…
En visitant le musée, il est fait mention d’un épisode tragique, avec une répression féroce de manifestations ouvrières qui réclamaient de meilleures conditions de travail (fin du XIX ème siècle).
Les forces de l’ordre reçurent l’ordre de tirer, y compris sur les femmes et les enfants. Les cadavres dont le nombre a longtemps été matière à débats, ont été chargés dans des wagons puis bennés et recouverts de déchets miniers.
Sans sépulture. Le tout au nom du progrès, bien sûr, et accessoirement des dividendes de quelques actionnaires anglais. La gloire de l’Empire vaut bien quelques sacrifices…
Tout ceci est fâcheux, n’est-il pas?
Au fait, tout ceci n’enlève rien au miracle de la vie dans les eaux “toxiques”: les microorganismes extrêmophiles se portent très bien dans ces conditions. Ce n’est d’ailleurs que dans ces conditions qu’ils se développent. pH=2, on aime!
Pour une information un peu moins subjective on pourra consulter le site suivant sur le sujet.

21-22-23-24 février
Ou comment être et ne pas être hors du temps…
El Rocio, l’un des villages les plus extraordinaires d’Espagne.
A peine le moteur coupé, Florence alerte: attention: moustiques! Au mois de février. Il faut avouer ici que c’est n’importe quoi.
Après avoir compilé quelques sources différentes d’informations sur les visites du parc national de Doñana, on décide de réserver pour un visite en bus 4×4 le samedi 22 février, départ 7h50 devant l’entrée du camping.
Explications: bien avant le départ de ce voyage, la visite du delta du Guadalquivir était l’un des objectifs majeurs. Nous y sommes. Mais comme souvent, la réalité sur le terrain est exaspérante. Impossible de visiter la partie centrale du parc sans passer par des opérateurs qui ont l’exclusivité des accès . Autrement dit, le tourisme naturaliste est devenu ici, comme en bien des endroits, une machine à faire du fric. Inutile de préciser qu’un groupe de 30 personnes débarquant d’un bus dans n’importe quel milieu naturel est le meilleur mayen de faire fuir les animaux. Il faut donc choisir entre rester dans le bus et regarder par les vitres et supporter les vibrations permanentes du véhicules ou sortir en paquet et rechercher les animaux très loin.
Du côté positif, on verra quand même beaucoup d’oiseaux, mais souvent trop loin pour pouvoir faire des photos correctes. Mais avec une paire de jumelles, le spectacle est quand même très intéressant.
La balade a duré au total 4h30.
Comme anticipé, les photos de la sortie naturaliste sont médiocres. Il est possible d’y remédier en optant pour des visites en petit groupe, à objectifs ornithologique et photographique. Mais le tarif de base est de 65 € par personne pour un groupe de 3, et de 195 € pour une personne! Dissuasif.
Au bout du compte, le plus surprenant a été la traversée d’El Rocio, avec ses rues où les chaussées sont toutes en sable de mer, plus ou moins défoncées, avec d’énormes flaques d’eau au milieu. Un village comme il n’en existe qu’un en Espagne. Architecture typique espagnole, des chevaux, des calèches, des poneys, des voitures, des bus, mais priorité aux chevaux. La ville a décidé de maintenir les chaussée avec son revêtement naturel: le sable du sol. Cela donne un caractère étrange à la ville qui évoque les westerns et le Mexique. Évidemment ce n’est qu’une illusion, car ce sont les clichés du Mexique tels qu’ils sont véhiculés qui reprennent les codes d’El Rocio.
Les bâtiments, le long des rues et des avenue, ont quelquefois des allures de saloon, avec les rambardes de bois pour attacher les chevaux. C’est d’autant plus étonnant que le plus souvent, ce sont des voitures qui y stationnent.
Le village d’El Rocio est célèbre en Espagne pour deux raisons. La première comme déjà vu, tient à ses rues de sable et à son architecture. La seconde découle de son extraordinaire pèlerinage. La population permanente de 1200 hab se voit soudain submergée par plus d’un million de visiteurs et de pèlerins. Ce qui en fait le plus important pèlerinage d’Espagne et l’un des principaux en Europe.
On se dit, à l’odeur de crottin de cheval qui traîne dans l’air, que Môn aurait probablement dû apprendre l’espagnol. Elle aurait ainsi pu venir exercer son métier ici. Elle serait sortie de son cabinet à cheval et aurait rejoint au galop la sortie de l’école pour mettre
un garçon devant et un autre derrière et hue! En avant après un “wheeling” à la Zorro, elle aurait parcouru la grande avenue d’El Rocio telle une fougueuse andalouse remontant le temps.
Bon, un peu de fiction, ça ne coûte pas cher et puis Landerneau c’est bien aussi.
Comme rien ne presse, on décide de rester un jour de plus. C’est dimanche, il risque d’y avoir encore plus de monde dans les rues, et on ne veut pas prendre le risque d’aller mettre le camping-car dans un parking bondé, sans surveillance. Ce sera donc une balade à pied sous le soleil d’El Rocio. Florence, trop fatiguée hier soir pourra ainsi profiter de l’ambiance très particulière du site et si elle le souhaite, s’intoxiquer avec les fumées des cierges de la chapelle votive Nostra Siñora del Rocio. Il y brule toute la journée tellement de cierges que l’atmosphère est enfumée, irrespirable, puante et vomitive. Sans doute est-ce là un moyen de chasser les mauvais esprits.
Du côté des photos, rien de neuf. Faute d’avoir été suffisamment réactif le matin, j’ai compromis la seule chose qui valait sans doute la peine d’être vue ce jour là, à savoir la procession et le spectacle donné par quatre confréries. Quand nous sommes arrivés devant la cathédrale, tout était terminé et la foule s’était déjà dissipée. Florence était un peu contrariée et on peut la comprendre. Surtout que du côté des oiseaux, il n’y avait pas grand chose à se mettre sous la dent. Le soir on a invité à venir prendre l’apéro des touristes, comme nous, rencontrés au camping précédent et qui le jour précédent nous avaient invité à prendre le café. J’ai à nouveau manqué de perspicacité. 18h30 est l’heure absolument à éviter si l’on ne veut pas se faire dévorer par les moustiques. Gagné. En partageant nos bières nous avons fait un concours de claques et d’écrasement de moustiques. Intéressant, mais une seule fois.
Le lendemain matin, je décide d’aller faire une dernière tentative tôt le matin autour de l’étang principal d’El Rocio pour prendre quelques photos correctes d’oiseaux.
Premier constat: impossible d’en faire le tour. Les parcelles bordant l’étang sont toutes exploitées pour l’élevage des chevaux et on ne passe pas.
Second constat en revenant sur mes pas: l’étang au voisinage de la cathédrale est très pauvre en faune aviaire. Quelques photos, dont une série intéressante, les astres s’étant alignés: belle lumière, composition intéressante et sobre, voire minimaliste. Cette série à elle seule sauve la sortie.
De retour avant 10h au camping, on plie les bagages et on file visiter Le centre d’observation de la Rocina situé tout à côté d’El Rocio. Un parcours est aménagé autour d’un étang avec des protections pour permettre aux visiteurs d’observer les oiseaux. C’est bien fait, c’est calme et fréquenté par des touristes respectueux des pratiques d’observation d’oiseaux. On peut ainsi observer un nombre non négligeable d’espèces, dont des colonies de spatules, de cigognes, d’ibis chauves, d’oies. Mais aussi de nombreuses grandes aigrettes et quelques passereaux dont un tarier-pâtre. Bref, une visite à ne pas rater dans un cadre plus propice à l’observation que celui d’une sortie en bus en troupeau. Ceci confirme la mauvaise pioche du premier jour.
Pour la suite de la journée, l’épreuve des moustiques ne pouvant s’éterniser, on décide de quitter les marais. Direction le littoral un peu plus au sud-ouest: Matalascañas. Déception, il s’agit d’une cité balnéaire déserte en cette saison et sans autre intérêt qu’une très longue plage de sable blanc. En direction de l’est, c’est même une gigantesque plage puisque elle se prolonge jusqu’à l’embouchure du Guadalquivir 27 km plus loin.
Il faudrait deux jours de marche, un bivouac et une excellente forme pour marcher dans le sable. Impossible dans les conditions actuelles. Une prochaine fois peut-être, sachant qu’il y a probablement des moustiques. Conséquence, on poursuit vers l’ouest jusqu’à Mazagon. Le camping est situé face à la mer et on a droit au soleil couchant au travers du pare-brise. La plage est bordée par une dune haute, le tombant sur la plage étant occupé par une falaise de grès rongée par l’érosion aux couleurs ocres au soleil couchant. Sur la dune, des camping-cars, en mode sauvage, sont dispersés dans les arbres. On se demande comment ils ont fait pour arriver là, sachant que les chemins de sable exigent un bon véhicule 4×4. Nous n’aurons pas le temps d’éclaircir. J’y rencontre même une bretonne de Plouha dans un fourgon fatigué, qui va sans doute devoir essayer de quitter les lieux avant l’arrivée de la pluie prévue pour jeudi. En revenant au camping par la plage, on peut noter la présence de nombreuses coquilles vides de bivalves: vernis, moules, huîtres plates (type pied de cheval), praires… Cela va me permettre de sélection deux pièces, une valve inférieure d’huître plate pour la table et une grosse valve supérieure de vernis pour percuteur. On va pouvoir casser nos noix, et aussi nos noix de pécan que l’on traîne depuis un bon bout de temps.
Cerise sur la dune: il y a encore des moustiques. Florence va craquer, à moins que le tube d’apaisyl soit accessible et que le produit fasse effet. Trop tard, la peau est un champ de bosses. Même les fesses ont été touchées. Sacrilège suprême! Décidément, il va falloir trouver du répit. Et la meilleure solution c’est de remonter dans la sierra. Mais laquelle, et pour quoi faire? Ça tombe bien, il passe près d’ici une rivière singulière: Rio Tinto. Toxique à souhait, même pour les moustiques. Va pour Minas Rio Tinto, en bordure de la Sierra Morena, où se trouve l’une des plus grandes mines à ciel ouvert du monde. Où nous attendent un festival de couleurs, sans moustiques à écraser!
20 février
Ou comment la belle de Cadix se retrouve au marché aux poissons…
Le 20, embarquement à bord du catamaran faisant la liaison entre El Puerto de Santa Maria et Cadix.
Visite de Cadix avec pour objet de retrouver la belle. Échec et presque mat. Mais si la belle était une sirène? Et si, à la sirène, on enlève le haut? Que reste-t-il? Il reste la queue de poisson. Et bien on l’a trouvée au marché central où la section consacrée aux produits de la mer est d’un très bon niveau, avec de très beaux produits et une grande diversité. On a retrouvé la queue de la belle et franchement, on n’a pas été déçu du voyage. Il faut pourtant avouer que l’on a hésité entre une queue de crevette tigre et une queue d’espadon.
Le lendemain, à savoir le 21, on a levé l’ancre et poussé jusqu’à Jerez de la Frontera, ville enrichie par la production et le commerce du vin de Xérez.
Cathédrale en baroque très tardif, avec des décorations de chapelles dans les nefs exaspérante au possible. Bref, visite écourtée avant d’avoir la nausée des bondieuseries catholiques.
Quant à l’Alcazar de Jerez, on s’est pointé pour la visite à 14h30, qui est aussi l’heure de fermeture. On est resté à l’extérieur des remparts, mais comme l’intérieur des remparts est presque vide, à l’exception de la mosquée, on a effectué un effort de concentration. Imaginons que l’extérieur des remparts soit l’intérieur. Dans ce cas, la visite n’a aucun intérêt puisque nous avons déjà vu l’extérieur. Euh… ça marche à moitié, ce truc là.
Devant tant de merveilles presque dérobées à nos regards, on décide de faire la mauvaise tête et de poursuivre par la visite du parc national de Doñana.
Direction El Rocio, où nous nous posons au camping La Aldea El Rocio.
19 février
Ou il fait bon vivre sous les palmiers…
Aujourd’hui, repos. Et plage. Plus précisément sur la Playa de la Puntilla près de laquelle se situe le camping Playa de las Dunas. Qui est au fond de Baya de Cadiz sur la commune de El Puerto de Santa Maria. Quelques palmiers sur la plage lui donnent un air de plage… de vacances, comme on en trouve sur les dépliants et les publicités destinés à faire rêver les travailleurs contraints par leur travail quotidien.
En partie ouest de la plage, le sable cède la place à une magnifique pinède de pins parasol. Comme capteur solaire, il y a un bout de temps que c’est optimisé. Quand on va dessous et qu’on lève la tête, pas un bout de ciel n’est visible. Pour un parasol, c’est un vrai para soleil!
Compte-rendu facile: il fait beau, sable blanc et fin, température de l’air: 20°C, beaucoup plus au soleil! Cette fois ci, ce sont des vacances. On confirme. Un vrai scandale si on regarde la date, car les conditions ne sont pas meilleures en été en Bretagne.
No comment!
Sauf que:
– le camping où nous sommes posés pour 3 jours est pratiquement plein, en semaine, et c’est une petite ville de camping-cars plus ou moins gros, avec un petit supermarché. Le tout fonctionne toute l’année.
– en bordure est de la plage, on aperçoit une concentration invraisemblable de camping-cars. C’est moins cher, mais la promiscuité est assurée.
Il faut aimer.
Peu de monde sur la plage, quelques surfers, et un planchiste étrange, sans voile, avec un foil et se déplaçant en tous sens à une vitesse invraisemblable, du moins vu de terre, sachant qu’aucun mode de propulsion n’est visible. S’agit-il d’une nouvelle invention? Planche à foil électrique?
A suivre.
17-18 février
Ou comment les frontières imposent leur présence…
Ces deux journées sont réunies dans un même paragraphe. Elles ne méritent pas mieux et seront consacrées au même thème: le littoral, les plages, le sable, les frontières.
Le 17, faute d’avoir une forme olympique, même si ce n’est pas encore la colique, on va éviter les grandes expéditions. Tout au plus l’aventure nous conduira à un cul-de-sac du côté de Zahara de los Atunes, ils ont mis une montagne en travers de notre route, obligeant à un retour prématuré à Barbate. Barbate est un port de pêche et une station balnéaire. C’est même le principal port de thons de la Péninsule (tout du moins ça l’était). La visite du port de pêche n’est pas très impressionnante, pas de très grosses unités, mais beaucoup de bateaux de pêche artisanale. Filets maillant sur le quai, avec quelques détritus issus des résidus de pêche, une odeur naturelle qui entretient le mythe d’une pêche écologique. L’heure (16h) n’est pas propice à l’activité, pas de retour de pêche et un seul départ en mer. Bref, pas de quoi insister dès lors qu’il m’est impossible d’entamer une discussion avec les pêcheurs présents, faute de parler leur langue.
Mais, à cette frustration il existe des solutions. La première, apprécier l’extrême finesse du sable blanc de la plage, un sable de sablier qui file entre les doigts et coule en chatouillant, un soleil voilé à l’agressivité maîtrisée, une température de l’ordre de 20°C. Quoi de mieux que de se poser en terrasse pour boire un café. Finalement, ce sera une énorme coupe glacée pour Florence et une bière pour moi. Adepte d’une alimentation raisonnée, Florence aura la sagesse de partager sa glace. Histoire que le “péché” de gourmandise soit dissous dan la bière et la brise de mer.
Le lendemain, 18 février, direction Tarifa. Point le plus au sud de l’Espagne, on y trouve de superbes plages, avec du vent et des rouleaux. Un paradis pour le surf, la planche et le kite. Le sable est d’une finesse exquise et le massage entre les orteils mérite une mention spéciale.
Au bout du bout se trouve l’Isla de Tarifa, une ile sombre, avec des remparts et des bâtiments militaires. Faisant face à la pointe nord de l’Afrique, sa vocation historique se passe de commentaires.
Quand on arrive, au-dessus de l’île, un magnifique nuage en forme de croissant semble rappeler les menaces anciennes que faisaient courir aux chrétiens les défenseurs du Croissant. Est-ce un présage, ou un rappel de l’histoire? La question ne durera pas plus que le temps d’un nuage. Car c’est l’heure de prendre un expresso.
L’île de Tarifa est reliée au continent par une route extraordinaire. En effet, quand on regarde vers le sud, à droite on a l’Océan Atlantique, à gauche la Méditerranée, en face au loin l’Afrique et dans le dos, la Bretagne.
La perception des frontières devient une évidence, d’autant que dans les rouleaux, de jeunes inconscients font des cabrioles dans les airs, établissant de facto une frontière naturelle avec ceux qui se trainent. De temps en temps, passe une grosse voiture, style gros SUV 4×4, chargée de rétablir une frontière visible entre le commun des mortels marchant à pieds et les riches pouvant écraser les premiers. Et enfin, il existe une autre frontière. Celle de la langue, entre des espagnols ayant résisté aux divers envahisseurs, mais submergés par une vague de touristes venus du nord de l’Europe.
C’est l’heure d’aller faire les courses! Ah, mais non, on les a faites hier. Ah, les fantaisies du temps creusent des frontières subtiles dans le tissu cérébral, qui entre les fruits et les légumes se prend les pieds dans la botanique.
Heureusement, il y à quelques jours, sur les chemins menant aux dunes, nous avons croisé une aristoloche bétique. On a fait sa connaissance le long d’un grillage, puis sur Plantnet, une appli savante qui nous a indiqué, sur la base de la photo, que nous avions 87% de probabilités d’avoir croisé une invasive. Encore une invasion! Mais que font les politiques?
16 février
Ou comment la lecture de cartes devient une seconde nature…
C’est l’heure de la sieste. La moitié du camping sacrifie à la tradition, mais courageusement on va tenter de se bouger. Ne serait-ce que pour éviter la paralysie des orteils puis des pieds puis de tout le reste menacé de calcification. Car nous n’avons pas la chance d’être des poissons cartilagineux qui, eux, ne souffrent pas d’arthrose!
A quelques kilomètres du camping, les guides touristiques indiquent le nom d’une petite ville, Vejer de la Frontera, qui comme son nom l’indique, a connu la fortune de se trouver pendant quelques temps sur la frontière, là où les combats entre chrétiens et musulmans occupaient les hommes à des jeux de guerriers. On sait qui a gagné, et il ne reste pas grand chose du royaume andalou, sauf la vielle ville et quelques traces de remparts.
Une fois de plus, la ville a été construite au faite d’une colline et les escaliers et les rues en pentes sévères abondent. La visite se mérite. La vieille ville est un dédale de ruelles, aux façades blanches. Là où le soleil pénètre, des murs éclatant de blanc font mal aux yeux. On a repéré quelques lieux à visiter en priorité, dont la Place d’Espagne où une fontaine décorée de céramiques de couleurs crée un décor singulier.
Pour y parvenir, on consulte la carte. Une saloperie de carte qui refuse de se plier comme on le souhaiterait et qui conserve des plis inutiles pour la circonstance.
Pour finir, je laisse la carte à Florence, plus à l’aise avec les plis, sans doute une habitude héritée du pliage de draps au fil de sa longue carrière. Elle part à la recherche de la fameuse Place d’Espagne, et pour cela, commence par regarder le nom des rues où l’on se trouve. C’est fait. Mais pourquoi ces noms là ne sont pas sur la carte? On se le demande! Alors, peut-être que si on tourne un peu la carte, par magie les noms de rue vont apparaître! Oui, ça y est, la voila. La place, bien sûr. Par là…
Sauf que pendant le même temps, furieux d’avoir été dépossédé de la carte salvatrice, j’ai sorti mon couteau suisse et ai actionné Maps de Google l’Informé, en version piéton. Et c’est par… là!
Sauf que le “par là” de Florence est à l’opposé du “par là” de Google. Est-ce une raison pour divorcer?
Oui diraient les protagonistes de l’ère digitale, mais comme nous appartenons à l’ère des dinosaures, non, il suffit de prendre à angle droit par rapport au “par là” de Florence et du coup c’est la même direction que si l’on fait un angle droit avec mon “par là”… Vous suivez?
Finalement, au terme de multiples miracles, on arrive sur un petite place, encombrée de palmiers (c’est moche et ça gâche les photos avec des poteaux dessus) où une petite fontaine décorée de céramiques trône en plein centre. Dans le bassin de la fontaine, des grenouilles en céramique font de petits jets d’eau. C’est mignon, et c’est rafraichissant, et tellement coloré qu’il faudrait être aveugle pour ne pas repartir de bonne humeur.
Et pour ajouter au bonheur simple que cette fontaine produit, les rues avoisinantes sont belles. Et quelques indigènes contribuent à animer la scène.
Émus par tant de beauté, on décide à regret de rentrer, un peu aussi parce que Florence accuse le coup des escaliers et des rues en pente qui obligent à faire des efforts inutiles. Il y a tant de place au bas de la colline, pourquoi continuer à s’emmerder avec une ville totalement inadaptée à la voiture?
Incompréhensible, vous ne trouvez pas ?
C’était un bel après midi. On redescend au parking où nous avons laissé le camping-car par une longue rampe. Sur le mur de soutènement amont, des odeurs de vieilles soirées festives parfument l’atmosphère et ce n’est pas du jasmin. Plus bas, au pied des arbres, des orties poussent et comme chacun le sait, là où il y a des orties, il y a de l’azote. Et ne dit-on pas que l’urée est un précurseur de l’ammoniac et de l’azote assimilable? Dessin?
En arrivant au parking, le camping-car est toujours là. Au complet. Pas de vol. Tout est calme. Tout est bien.
Ou presque. Je viens de m’apercevoir que le zoom de mon objectif de base, le 24-105 mm, est coincé et ne tourne plus entre la plage 24 et 50 mm. La tuile. Mais il y a pire, et puis, après tout, il rend de bons et loyaux service depuis 2011.
15 février
Ou comment le bruit des vagues déclenche la nostalgie…
Du camping Pinar de San José on est proche des immenses plages de l’Océan Atlantique qui encadrent le Cap de Trafalgar. Sur cette pointe on trouve, comme il se doit, un phare. En face de cette pointe s’est déroulée la célèbre bataille du même nom. En quelle année? Mince, j’ai oublié. Euh, c’était le 21 octobre 1805. La flotte franco-espagnole sous les ordres du vice-amiral Villeneuve affrontait la flotte anglaise commandée par le vice-amiral Nelson. Et comme souvent on ne se souvient que des vainqueurs… Mais on se souvient quand même que la France a pris une sérieuse branlée, sans compter le nombre de morts abandonnés aux requins!
Bon, mais qu’est-ce que les armées napoléoniennes venaient faire ici? C’est le moment de réviser votre histoire.
Revenons sur terre: le phare est au bout de la plage où les rouleaux déferlent sans cesse, le sommet perlant au vent contraire en de fugaces dentelles de cristal. C’est bien dit? Moins ampoulé, ça fait du bruit et surtout le front des vagues vient s’étaler sur la plage, obligeant parfois à courir pour échapper à la punition des pieds trempés.
Quelques rares surfers se font plaisir, toute la plage et toutes les vagues pour eux. De l’autre côté du tombolo (irvi en breton), plus au sud, on aperçoit quelques voiles de kife-surfers. En arrière, dans les dunes, quelques mares d’eau salées accueillent des aigrettes. C’est bucolique, c’est beau et il fait 18°C. Pour une mi-février, on apprécie.
Mais tout ça, ça fait de la marche et au total on va faire 7 km, pas vraiment le menu indiqué pour permettre à Florence de récupérer. Attention, il ne faudra pas m’accuser d’avoir abusé si on la perd en route! Florence voulait aller jusqu’au phare, rentrer par la route du tombolo, et rentrer à pied au camping. La procahine fois on amènera des vélos électriques, ça permettra de se déplacer beaucoup plus facilement sur les étapes plates comme celles de ces jours-ci.
Au bout du compte, cette balade sur une plage immense rappelle les plages de Bretagne. C’était l’instant nostalgie.
14 février
Ou comment danser sans le vouloir jusqu’à la nausée…
Une nuit au camping municipal de Parauta, plus précisément de Conejeras dans le Parc National de la Sierra Nieves me semblait indispensable pour boucler, ou presque, notre tour dans les sierras andalouses. N’est-ce pas la Sierra de la Neige? Bon, d’accord, ce n’est en rien de la haute montagne et le plus haut sommet culmine vers 2 000 m. Et il y avait encore de la neige jusqu’à la semaines dernière. De quoi prévoir quelques randonnées de niveau moyen au dessus de la forêt de chêne vert et chêne liège.
Malheureusement, le climat reste rude à 1 000 m d’altitude la nuit, avec -3°C au thermomètre. Et si nous n’avons pas froid la nuit, le réveil est un peu plus poussif, et surtout la douche avec une température extérieure autour de 5°C est tonique. Et ce style de tonique, on commence à pouvoir s’en passer. Le second point est celui de l’état de santé de Florence. Les douleurs à la jambe droite ont de plus en plus de mal à céder après les longues marches ou les marches en terrain accidenté. Impossible dans ces conditions de poursuivre les randonnées en montagne, ou alors il faut les faire seul. Ce n’est pas le but du voyage.
Et comme on le formule en maths, il en résulte que les randonnées, c’est terminé pour unpetit bout de temps. Durée: indéterminée.
Conséquence, il vaut mieux quitter la montagne et prendre quelques jours au bord de la mer, histoire de récupérer. Et pour cela, après avoir plié les bagages, payé la nuit de camping de la Sierra de Nieves, trop cher pour les services rendus, nous avons pris la routevers le sud, mais en passant dans les villages blancs. Par contre, nous n’avons pas fait d’autres visites sur le terrain, les points communs à tous ces villages, outre le blanc, c’est la pente entre le bas et le haut. Barrio bajo et barrio alto. Ca dépend par où on commence, le bas ou le haut. Mais dans les deux cas , un aller-retour implique une grimpette obligatoire. Aujourd’hui, on passe en camping-car et en bons touristes, on ralentit, puis au premier arrêt propice que la route, on s’arrête pour faire des photos. Et puis, hop, on repart.
Autour de midi, on se trouve dans les alpages, du côté de Alpandeire. Les arbres ont disparu et on entend le son des cloches des chèvres et des brebis. Je pousse à pied vers le sommet d’un dôme d’où la vue devrait être excellente à 270 degrés. Le terrain, dès que l’on quitte l’herbe et les cailloux des alpages, est atroce. Ce sont des lapiaz totalement défoncés et sur lesquels il est très difficile de se déplacer. Les tours plus ou moins profonds (jamais plus de 1 m) sont légions et il faut faire court. La végétation est en pleine explosion, alors que la neige a disparu il y a moins de 15 jours. Beaucoup d’oignons sauvages, aux hampes florales en plein développement, des pervanches et des iris à feuilles planes (à raz de terre) bleus du plus bel effet sur la pelouse alpine. Un troupeau de moutons et de chèvres me rejoint sur le chemin de descente, après être passé devant le camping-car où se trouve Florence. La montagne, le soleil, le vent, le tintement des cloches, le chien berger qui maintient en ordre son troupeau, et, cerise sur le gâteau, un berger comme on n’en fait plus chez nous. Sur sa mobylette des années 60, barbe, âge indéterminé entre 50 et 60 ans, barbe hirsute, casque à l’ancienne mis de travers sur la tête, le berger des lieux ne semble pas être un adepte des philosophes grecs, mais plutôt du concret. Rafraichissant et tellement loin de tout.
Après déjeuner on reprend la route en direction d’Algésiras puis de Cadix. Les chaussées sont déformées, dégliguées, bosselées, dos d’ânées, torturées, et en dépit de vitesses de croisière de l’ordre de 20 km/h en dessous des limites affichées, on finit par avoir des dos en compote, des courbatures, là je radote, des muscles en pelote, des estomacs dans les bottes. Dit autrement, on finit presque avec la nausée. Les rares voitures qui nous doublent semblent danser sur la route. Et pourtant, pas le moindre tremblement de terre en vue!
Ouf! Quand enfin la mer est en vue. Ce soir, ce sera camping à côté de Barbate, au camping Pinar de San José. Usine près du littoral, pratiquement plein à la mi-janvier. Hallucinant! Mais quand donc est-ce que les Européens bossent? Ils semblent se prélasser dans leur chaises longues, en un repos imbécile où les secondes, les minutes et les heures défilent à ne rien faire.
Il y a bien sûr des exceptions à cette règle générale: le besoin de remise en forme de toutes celles et tous ceux qui arrivent déglingués et ont besoin d’une remise en état. Serait-ce notre cas? Le programme des 4 prochains jours sera… local.
Photos à suivre.
13 février
Ou comment mettre du bleu dans du blanc et faire la même lessive…
Journée consacrée à la découverte des pueblos blancos, villages blancs de la Sierra de Ronda. Pour la plupart ces villages datent de l’époque du royaume andalou et on conservé une organisation remontant à cette époque: rues étroites à fortes pentes, sinueuses, et aux façades blanches. A l’origine, elles étaient blanchies à la chaux, remplacée partiellement de nos jours par de la peinture blanche. Objectif principal: réfléchir la lumière en été et éviter d’accumuler de la chaleur. Ce même objectif vaut encore aujourd’hui. Par contre, ces villages n’ont pas été pensé pour la circulation automobile, qui reste difficile, voire impossible dans certaines rues.
Au menu des visites: Campijera, Juzcar et Parauta, toutes situées au sud de Ronda à moins de 30 km.
Campijera est charmant, blanc immaculé, façades impeccables avec des peintures murales naïves mais très homogènes. L’ensemble est magnifique. Mais il s’en dégage une impression de vide. Et ce vide a une origine limpide: on ne voit personne ou presque. Heureusement, on entend un ouvrier sur un chantier de maison, chanter et frapper au marteau. Et sur l’un des chemins menant au parking de sortie, on croise une dame, à quatre pattes dans un parterre de fleurs, en train de désherber, une installation portative de musique à sa portée. Ca crache de la musique de variétés espagnoles où il est question d’amours, forcément déçus si l’on en juge des nappes tristes qui accompagnent les morceaux. Mais au moins il y a un tout petit peu de vie, mais pas d’enfant à l’horizon. Aucun touriste non plus, à part nous…
On poursuit avec une visite de Juzcar, situé 3 km plus loin sur la même route. Davantage de maisons ruinées, mais un atout imparable: le village st peint en bleu, à la suite du tournage d’un film sur les Schtroumpfs. Alors, les références aux Schtroumpfs sont omniprésentes. Y compris Gargamel et son horrible chat, Azrael, peints sur fond de murs bleus. L’objectif général reste d’attirer les touristes et le résultat est patent: un commerce, café, bar restaurant est en activité avec une terrasse au soleil pleine.
On termine avec le village de Parauta. La route d’accès, difficile route de montagne, donne le ton. Le village se mérite, on n’y vient pas par hasard. Étrangement le parking situé en bas du village est à côté d’un parc de jeux pour enfant et… il y a des enfants. Des jeux d’enfants et des cris d’enfants qui font défaut dans les autres villages. La partie haute de Parauta comporte des ruelles étroites, tordues, des escaliers et des perspectives insolites . La préoccupation des premiers habitants était manifestement de rendre la prise de contrôle difficile aux assaillants. Par endroit, des statues de personnages de bandes dessinées ou de film d’animation agrémentent les places. Bon goût, mauvais goût? Les avis divergent, mais au moins il y a un effort de personnalisation. Et quand on fait le constat que les habitants de ces villages vivaient dans des conditions particulièrement rudes, avec des rochers partout, peu de terres cultivables, pas d’amandiers, pas d’oliviers, on ne peut qu’être bluffé par l’excellente préservation de leur patrimoine foncier.Et pour repartir, il faut s’accrocher: ça monte, ça tourne et ça monte encore.
Épingle à cheveux et c’est fini, le village a disparu derrière la colline.
Fin de journée au camping municipal de Parauta de Conajeras. Pleine nature, dans la Sierra de Nieves (Montagne de la neige).
12 février
Ou comment se promener en paroi sans s’aider de ses mains…
Journée appréhendée par Florence s’il en est: celle consacrée à la visite du Caminito del Rey. Un sentier passerelle dans le canyon d’El Chorro. Les informations obtenues sur internet font systématiquement référence au sentier le plus dangereux du monde. Sauf que si cela avait un vague sens avec l’ancienne passerelle en béton tombant en ruine, cela n’en a plus aucun aujourd’hui tant le circuit est sécurisé. Et c’est tant mieux, car toute personne capable de randonner 6-7 km peut visiter les lieux. Évidemment, il vaut mieux ne pas être sujet au vertige pour apprécier le sentier qui se balade dans ses sections les plus hautes, à quelques 100 m au dessus du torrent. Mais le sentier, dans les sections accrochées en paroi de canyon, est constitué d’un caillebotis de bois peu ajouré, d’une main courante le long de la paroi et d’un garde-corps du côté vide, comportant un grillage et des câbles bien tendus. Le tout est presque neuf et en bon état.
Le site est superbe, avec une roche à dominante de grès pales, dont les plis liés au processus de sédimentation marine (on est sur du jurassique) sont bien visibles en certains endroits, quelquefois basculés à la verticale sous l’effet des forces tectoniques. On y trouve aussi des fossiles dans la roche, le guide nous accompagnant nous les signalant au passage. C’est ainsi que nous apercevrons des ammonites et un belemnite dans leur gangue de roche.
Au dessus du canyon, des vautours sont visibles de temps à autre. Et sur la section centrale du sentier, sur le flanc hors canyon, des arbres ont prospéré depuis les efforts de reboisement des années cinquante. Le pin est l’espèce dominante, mais on y trouve aussi des caroubiers et un arbuste de la famille du pistachier. Dans cette section centrale, on aperçoit encore les ruines d’une maison où habitaient des employés chargés de l’entretien des canaux et canalisations des installations hydro-électriques. Les enfants de ces familles empruntaient l’ancienne passerelle en béton pour aller à l’école, 2,5 km en aval, et pour rentrer à la maison. Cadre grandiose, enfance exceptionnelle, au moins pour les émotions liées à la nature.
Au fond du canyon, des marmites de géants sont présentes à plusieurs endroits, mais cette fois-ci elles méritent vraiment leur nom, car certaines sont gigantesques.
A la sortie de la seconde et dernière partie en canyon, il faut traverser le canyon en empruntant un pont suspendu d’une vingtaine de mètres de longueur. Les deux parois sont suffisamment proches pour que le regard ne se perde pas sous les pieds, dans le vide.
Finalement, Florence qui craignait de ne pas pouvoir faire celle balade s’est tenue parfaitement. Aucune peur visible, en tout cas beaucoup moins qu’un monsieur qui ne quittait pas la main courante et cheminait collé à la paroi.
Belle balade, beau temps, guide de qualité. Toilettes en amont, toilettes en aval, que demander de plus? Ah, mais si bien sûr: une bonne bière à la sortie. Chose dite, chose faite.
Cerveza, pinta, dos per favor!
Pendant que nous étions en train se siroter notre bière à la terrasse du bar, des oies se promenaient entre les tables. A manger! A manger! On pouvait presque les entendre penser quand elles s’arrêtaient face à une personne en train de manger. Notre voisine se hasardait à donner un morceau de banane. Et un autre, jusqu’à ce que d’autres oies alléchées les contraignent à fuir avec le reste de leurs bananes.
Peu de temps après, deux dames d’un certain âge, celui de la retraite déjà avancée s’installèrent à notre table. Deux Québecoises d’excellente humeur prête pour un bon quart d’heure de franche rigolade. A certains moments, nos éclats de rire se communiquaient aux tables voisines. Cela avait quelque chose d’une joyeuse contagion.
Après quelques tabernacles et hosties, sans parler des maudits anglais, l’heure était venue de prendre la navette du retour.
Puis de rentrer au camping. Demain il fera jour, et en principe on aborde le programme pueblo blanco et pueblo azul.
Histoire de schtroumfer encore une fois.
10 février.
Ou comment faire un huit peut conduire à l’épuisement.
Aujourd’hui, on a plié les bagages au camping Pueblo Blanco après 4 jours. Juste le compte pour obtenir un tampon de plus sur notre carte « konokonocard » qui donne droit à un tarif réduit à 25 €/nuit, électricité comprise. C’est un peu stupide, mais on a un chauffage au gazole. La règle consiste à passer 4 nuits d’affilée dans un camping affilié au groupe konokono (campingred-es), et au bout de 4 tampons obtenus dans des campings différents, on acquiert un droit à tirer de 5 nuits « gratuites » dans un des campings affiliés. Nous en sommes à 3 tampons.
D’Olvera, nous sommes passés par Setenil de las Bodegas, puis direction Ronda où nous avons rejoint le camping El Sur. Tarif pour une nuit, sans électricité : 24 €. Encore acceptable compte-tenu des services et de la qualité du camping. Beaucoup de NL, de D. Quelques UK, F ; CH et autres égarés. Moyenne d’âge, on passe. Mais c’est homogène d’un camping à un autre. De temps en temps un randonneur, mais c’est vraiment l’exception.
La visite de la ville de Ronda offre peu de surprise, car les photos de la ville, surtout de son pont au-dessus du canyon, sont célèbres. La ville est belle, mais comme le « pont neuf » dont le tablier se situe environ à 100 m du fond du canyon reste une artère vitale pour la circulation, c’est encombré et bruyant. La visite sera effectuée au cours de l’après-midi, avec un départ du camping, soit une marche d’approche de 1,5 km pour démarrer. Et pour visiter la ville neuve et la vieille ville, on a effectué un itinéraire en huit. Pas forcément une bonne idée, mais cela a permis de passer dans une rue et d’acheter du turron, puis de repasser 3 heures plus tard et de s’apercevoir que la vraie boutique de turron, vue du côté façade et non de la sortie arrière était en fait le magasin d’â côté. Et grincements de roues dentées dans le cerveau de Florence, ne concevant pas de partir sans du vrai turron. Plus un petit sachet de gâteaux locaux histoire d’agrémenter les goûters.
Au bout du compte, avec la marche de retour au camping, cela fera 11 km. Aie ! Repos obligatoire le lendemain.
Le dit lendemain, à savoir le 11 février : repos. Compte-rendu facile ! Et de surcroit, vérification des photos du jour, c’est médiocre. Expositions approximatives, cadrages d’une banalité remarquable (c’est déjà ça!), et certaines donnant une impression de flou. Après tant d’années de photos, voila qui ne manque pas d’interpeler. Est-ce la vision floue de l’œil droit qui commence à avoir une traduction en images? A surveiller.
Je profite du repos de Florence pour faire une marche photo, avec cette fois ci, l’objectif macro au lieu du zoom standard 24-105 mm.. Malheureusement, rien de bien intéressant dans le coin du camping, et seuls quelques lichens sortent du lot. A oublier. Car il y a des grillages sur toutes les propriétés, même dans des bois isolés, avec des chiens bien peu sympathiques et gueulards dès qu’ils entendent un bruit suspect.
Demain, la randonnée sur la passerelle du « Caminito del Rey » est au menu. Florence craint que sa fatigue ne contrarie la balade, mais elle craint aussi le vide et le vertige qui coupent les jambes. Le tout avec une météo très moyenne…
Retour au camping. Ach so, il y a beaucoup d’allemands autour de nous et les politesses dans le quartier ignorent le buenos dias et préfèrent le guten tag ou le guten abend. Ya ya, evel just!(ça, c’est du breton).

8 février.
Ou comment se garder des épidémies et de la chaleurs: los pueblos blancos…
Nous sommes toujours basés au camping de Los Pueblos Blancos. Olvera est construite autour d’un piton rocheux sur lequel trône encore aujourd’hui une tour, vestige d’un château maure et l’immanquable église venue couronner la Reconquista et l’expulsion des musulmans en 1492. Vu des environs, Olvera apparait comme une longue plage de maisons blanches au soleil. Blanchies autrefois à la chaux, aujourd’hui très souvent à la peinture blanche, elles contrastent avec le paysage environnant, souvent fait de vergers d’oliviers ou de cultures. Le badigeonnage à la chaux éteinte avait pour objet de préserver les maisons de la chaleur en été et aussi pour mission espérée, de protéger des épidémies Il existe une vingtaine de villages blancs (pueblos blancos) en Andalousie dont un grand nombre dans la région de Ronda .
Toutefois, pour profiter pleinement du spectacle des villages blancs, il faut aussi compter sur le soleil qui illumine les murs blancs. En absence de soleil, les murs virent au gris plus ou moins clair. Aujourd’hui à 5 min d’intervalle nous avons pu voir, à partir d’un petit parking sur la route de Setanil de las Bodegas, la ville d’Olvera éclatante au soleil, puis éteinte, grise à l’ombre, surtout quand au travers des nuages le soleil illumine les champs alentours.
Dans l’après-midi nous avons démarré les visites des villages blancs par celui de Setenil de las Bodegas situé à une dizaine de km du camping. Contrairement à la plupart des pueblos blancos qui sont situés au sommet de collines, ici nous sommes au confluent de plusieurs petites rivières où l’érosion a creusé un canyon dont les parois ont été utilisées pour construire des habitats troglodytiques. Le site est converti en foire touristique avec toute une série de restaurants et la foule aux terrasses dans la rue des “caves”. C’est spectaculaire, mais bondé… au début du mois de février. A se demander quelle allure cela prend en été!
Retour à Olvera où nous montons au sommet de la tour maure (pour 2 €/personne). Il y a une vue à couper le souffle à 360 degrés autour d’Olvera, et des escaliers à faire des cauchemars aux personnes sujettes au vertige. Au pied de la tour, une esplanade sur laquelle est construite une église catholique… que nous ne visiterons pas en dépit de sa célébrité en Espagne.
9 février.
Poursuite des visites des pueblos blancos. Aujourd’hui découverte d’un village au doux nom de Grazalema, adossé à la Sierra du même nom. Il fait soleil et vers midi il y a foule sur la place du village où sont installées des tables où jeunes et vieux boivent et mangent dans une bonne ambiance. On avait lu que pendant l’été des “conversations” sont organisées sur les places des villages de cette région, pour reprendre une tradition ancienne. Il y a aussi un nombre invraisemblable de motards, et régulièrement les cylindres et les échappements des machines ronronnent (si BMW) ou rugissent (si toutes les autres). Sur la route, les motards sont en paquets, certains calmes d’autres plus allumés. Certains sont candidats au paradis andalou, sauf s’ils sont ou très doués ou nés avec la baraka.
Grazalema est un charmant village, parfaitement bien entretenu, aux murs blanchis à de très rares exceptions près. On passe devant un magasin où une queue animée et signalant une bonne adresse nous incite à rentrer pour acheter le repas de midi. Ca discute, tout le monde se connait, une quantité invraisemblable de poulets transpirent sur un “mur rôtissoire”. On commande 2 parts de poulet, 2 parts de frites et 2 petites barquettes de hors d’œuvre (poivron rouge aux œufs de caille et …), le tout pour 26 €. Le prix semble presque élevé, mais quand ils nous servent le paquet, surprise, ça pèse une tonne! Peu de temps après, au déballage, on s’aperçoit que les deux parts de poulet correspondent à deux poulets entiers, coupés en morceaux… Nous en avons pour au moins quatre repas! Pour commencer, on passe à table. Et d’un!Puis on reprend la route qui grimpe au col de Boyar. Magnifique route de montagne. On est encadré par des motards, que je laisse passer à chaque fois que c’est possible. Arrivé au col, il y a une vue magnifique en contre bas sur le Parc Naturel de la Sierra de Grazalema. Puis, demi-tour et dans la descente, on tourne à gauche en direction de Zahara de la Sierra. La route serpente en balcon dans la partie haute de la falaise avec une vue sur la vallée de Grazalema. On fait un arrêt improvisé car on a aperçu un bouquetin dans les fourrés sur le talus supérieur. En sortant du camping-car, au dessus de nous, on aperçoit des vautours qui tournoient. Ils semblent aller vers le sommet d’une falaise, juste au dessus de nous. Quand on lève la tête, on aperçoit 4 “petits” vautours, les jeunes de l’année qui attendent leur repas. On aura la chance de voir des parents venir se poser, puis s’élancer dans le vide pour reprendre leur quête de nourriture. Les photos, même au télé 600 mm, sont d’une précision toute relative, car nous sommes trop loin, mais reconnait quand même que ce sont des vautours….
Chasse photographique terminée, on passe par le Col de Palomas (Puerto de las Palomas) et par une magnifique route de montagne on redescend sur le village de Zahara. Tout blanc, sur le flanc d’une colline, comme il se doit. A proximité, un lac de retenue.
Le soir, on se rend à un point stratégique pour voir les montagnes lors du coucher de soleil. Mais, chou blanc, presque tout est dans un coton qui vire progressivement au gris. Pour la photo du siècle, ce ne sera pas pour ce soir.
Re-frites et poulet au diner. On hésite entre moutarde et mayonnaise, mais résistant à la facilité, on passe à la moutarde. Il se confirme que le repas de midi sera aussi celui des repas à suivre…
5-6-7 février.
Ou comment prendre un bain de lumière sur le toit du sud de l’Espagne…
– Le 5 février, matin: montée à la station de ski de la Sierra Nevada. C’est beau, mais frustrant de devoir regarder les pistes des parkings. La station est ouverte, mais la prudence exige que l’on reste à quai. Pas de ski aujourd’hui. mais promis, dès que l’on sera plus jeune, on remonte sur les skis.
Puis, route en direction du désert de Gorafe, au nord-est de la ville de Guadix. Le site est plutôt sauvage et le début de la balade indique clairement que la montée sur le plateau est réservée aux véhicules 4×4. Je fais une tentative, mais la première épingle à cheveux est dissuasive avec notre carrosse. Marche arrière et demi-tour.
La montée sur le plateau (250 m de dénivelé environ) se fera à pied. Florence n’ayant pas la condition requise, je fais la balade seul. Quelques 4×4 montent, mais aussi des véhicules utilitaires style Kangoo, avec des pépés locaux au volant qui font ça tous les jours et ne semblent pas jouer les héros.
En pratique la piste de Gorafe est effectivement réservée aux 4×4 et certains passages ne pardonneraient pas aux imprudents en camping-cars, sauf si équipés d’une base 4×4. Donc ça ne sera pas pour aujourd’hui. On pourra peut-être faire la boucle une autre fois, en VTT électrique. J’entends déjà Florence protester…
Départ Gorafe et direction plein ouest, vers Jaen. Le paysage est absolument magnifique après Villanueva de las Torres, en direction de Alamedilla. L’érosion crée des formes spectaculaires. Plus à l’ouest, les collines avec des ondulations douces offrent des palettes incroyables de vergers d’oliviers et d’amandiers. Le travail des agriculteurs se traduit par les formes et des couleurs de toute beauté, qui ne sont pas sans rappeler celles de certains paysages de Toscane.
Comme à chaque fois que l’on ne réserve pas pour la nuit, on va un peu galérer, s’arrêtant tout d’abord dans un supposé parking pour camping-cars où il n’y a personne, sauf des lampadaires qui s’allument à notre arrivée. On fuit, puis on recherche une autre solution dans la ville de Huelma. Rien de ce côté là non plus. On poursuit sur Jaen où on finit par se poser sur un parking autorisant les camping-cars sur une colline en bordure de ville. Nous serons seuls. C’est calme, mais sans le moindre service. Et entre 10 et 11h du soir, nous aurons droit à une conversation animée tenue par un jeune couple. Vérification faite avec la paire de jumelles, prévue pour l’observation des vautours dans la sierra, ils ont l’air de s’amuser et ça boit au goulot… Mais le tout est bon enfant. Excellente nuit, gratuite de surcroit.
Le lendemain matin, nous verrons qu’ils ont laissé deux bouteilles de bière sur le muret du parking.
– Le 6 février au matin, on décide de poursuivre vers l’ouest. Halte dans la ville d’Antequera. Visite de l’ancienne citadelle maure, ou du moins de ce qui subsiste de l’Alquazaba. Ici les rois chrétiens et leurs armées ont beaucoup démoli et l’église catholique espagnole a recouvert l’héritage musulman au moyen d’une épidémie d’églises. Antequera en compterait 30! Inutile de dire que des mosquées et des édifices d’al andalou il ne subsiste presque plus rien.
On poursuit vers la région de Ronda où se pose au camping Pueblo Blanca. Immense camping sur le sommet d’une colline en bordure de la petite ville de Olvera.
– 7 février. Première journée au camping Pueblo Blanco d’Olvera. Il faut bien avouer que nous avons un peu la flemme de nous remuer le matin. On prend donc notre temps et un bon déjeuner.
L’après-midi, il est temps de se bouger. On a repéré un fascicule d’information sur les randonnées recommandées dans les environs d’Olvera et Ronda. Travail effectué par un “nomade” français architecte qui consacre son temps à se balader et à relater ses voyages sur le web (Eric Chatelain ch). Il a répertorié une vingtaine de randonnées et effectué un topo ouvert et donnant le niveau de difficulté. On se décide pour une “petite” balade pas trop difficile et sans problème technique: le sommet du Castillo del Hierro à côté d’Olvera.
Aucune difficulté technique, mais comme c’est un mont isolé, ça grimpe fort, en commençant par des escaliers qui cassent. Florence dont les jambes ne sont pas au mieux de leur forme galère un peu, mais apparemment moins que ce que l’on pouvait craindre. Là-haut c’est magnifique avec une vue sur 360 degrés. De temps en temps des rapaces viennent tournoyer au-dessus de nous, puis au-dessous. Les paysages vers le sud sont assez nébuleux et le rendu en photo n’est pas très intéressant. La photo ci-dessus qui montre le Castillo del Hierro au premier plan (devant les chaînes de montagne au sud) a été faite la veille, en redescendant d’un col en provenance de Algamitas où le premier camping repéré était fermé.
4 février
Ou comment devant tant de merveilles ne pas être ébranlé?
C’est sans doute le jour le plus attendu de ce voyage: celui de la visite de l’Alhambra et en particulier du palais Nasrides.
C’est la seconde fois que l’on visite le site, mais la première fois, mon état de santé était médiocre et il ne m’avait guère été possible d’échapper aux rappels permanents de la saloperie de tuyau que je trimballais pour attendre une intervention un peu plus tardive pour cause de lithiase rénale.
Bref, cette fois-ci les conditions sont bien meilleures. Et le temps est dégagé jusqu’au soir, donc nous avons l’assurance d’avoir de belles lumières.
Bref résumé de visite et photos à suivre…
1-2-3 février
Ou l’on peut encore randonner et rater bêtement une marche…
Le 31 en fin d’après-midi, nous avons décidé d’aller faire un tour du camping à la ville de Güejar Sierra. La route principale est dépourvue de trottoirs et largement empruntée par les véhicules qui se rendent en station de ski sur la partie haute de la Sierra. Hors de question de l’emprunter, aussi on passe par une route étroite qui longe les collines en direction de la ville. Sur la fin du parcours on se retrouve dans un troupeau de brebis avec son berger et ses chiens. Séquence bucolique: les clochent tintent, le berger grogne ses ordres auxquels nous ne comprenons rien faute d’avoir été bien dressés (surtout moi!), mais auxquels les chiens à l’évidence répondent correctement. Les crottes de brebis se mêlent aux olives tombées sur la chaussées et l’on marche sur un condensé de culture méditerranéenne. Sauf que jusqu’à une époque récente les olives étaient ramassées, ce qui ne semble plus être le cas. A l’arrivée à Güejar Sierra on remarque trois panneaux explicatifs de randonnées. Recommandation: il vaut mieux avoir son smartphone car il faut scanner le code pour avoir accès à un site qui balance de la pub avant d’autoriser l’accès à l’itinéraire des randonnées. Pénible, les réseaux polluent les endroits les plus prometteurs et l’on se prend à rêver de l’époque où l’on avait le guide papier des randonnées, qui, ne tombait pas en panne. Mais que l’on pouvait oublier par erreur, ou délibérément pour s’alléger.
D’ailleurs, c’est l’heure du retour au camping. Constat peu flatteur sur notre état de marche: nous sommes fatigués, et on va couper au plus court, par la route que l’on voulait éviter. Tant pis, on veille à ne pas trop s’exposer, mais on constate assez vite que les véhicules font très attention aux piétons, d’ailleurs, on croisera un groupe de locaux qui occupe toute la chaussée et discute sans crainte particulière.
Au retour au camping, c’est l’heure du coucher du soleil sur la Sierra. La neige se teinte de rose, puis vire à l’orange avant de s’éteindre. Spectacle dont on ne se lasse pas.
Le Ier février, le plan initial consistait à se rendre en station de ski. Ne doutant de rien après avoir attentivement regardé les cartes sur Orux Maps, je prend la direction de Gëjar Sierra. Très rapidement on se retrouve dans des ruelles étroites, en pente raide, jusqu’au moment où on se retrouve avec un panneau largeur limitée à 2 m. Nous ne passons pas en dessous de 2,25 m… Marche arrière, puis demi-tour. Essai d’un nouvel itinéraire au dessus du premier. On aboutit à une route avec un panneau indicateur: “route étroite, dangereuse, avec chute de pierres possibles”. Marche arrière, puis demi-tour.
Qu’à cela ne tienne, on repart et on tente un itinéraire vers le bas. C’est étroit, ça descend sec, et au terme de la descente on arrive à un petit parking situé à l’amont du lac de barrage que surplombe le camping. Pas place à garer, c’est saturé. Un petit pont donne accès à une route étroite qui démarre par une rampe raide à flanc de montagne.
Vacciné pour la journée des culs-de-sac on fait demi-tour pour rentrer au camping. En chemin, on s’arrête pour consulter Waze. Il nous rend une copie délicieuse: 257 km, en contournant la Sierra par le sud. Nous sommes à 8 km à vol d’oiseau. Mais tous les itinéraires locaux figurant sur la carte sont affublés de sens interdits.
On capitule et à la réception du camping on s’enquiert du meilleur itinéraire pour aller en station. On aurait pu commencer par là, non, vous ne trouvez pas? Réponse, “aujourd’hui c’est samedi, les routes d’accès et la station sont saturées, donc c’est barré.
Demain, ce sera sans doute la même chose. Il vaut mieux attendre lundi”. (Sauf que lundi, connaissant la météo, il pleuvra!).
Changement de programme. On part en randonnée au départ de Güejar Sierra sur l’itinéraire “Ruta de la Gitana” qui monte sur le flanc exposé au soleil de la montagne et offre un panorama magnifique sur les hauteurs enneigées de la Sierra Nevada. Peu de temps après le départ on passe au pied d’une paroi rocheuse où une via ferrata a été installée. Il s’agit d’une initiation qui démarre par une échelle sur câbles métalliques. Rien à signaler, sauf peut-être que l’échelle est vrillée et que l’apprenti grimpeur se retrouve après 10 m sous l’échelle et avec l’obligation de retrouver le chemin dans un dévers pervers. On aurait aimé voir les pratiquants au travail, mais ils sont déjà au sommet de la barre rocheuse, en train de travailler les rappels entre une plate-forme en paroi et le sommet. Ça braille, ça crie, ça rigole. Manifestement les conditions sont bonnes. Début février, exposition ensoleillée, température 14°C, que demander de plus.
On poursuit la randonnée, avec des passages plus ou moins raides, mais empruntés par des vaches, donc on devrait y arriver. A un moment, Florence, que son souci de rétrécissement lombaire continue à handicaper, décide de faire demi-tour. Je continue pour atteindre un “mirador” (point de vue) situé un peu plus loin. En chemin, je croise un groupe de randonneurs espagnols qui descendent et qui, en groupe compact, ne laissent aucun espace sur le chemin pour un randonneur isolé et peu compétitif. Auraient-ils deviné que je suis titulaire d’un passeport français et réactivé les vieux réflexes bannissant les descendants des armées napoléoniennes? Mystère, mais il faut se pousser.
Heureusement la plate-forme du “mirador” offre une vue imprenable et tout est pour le mieux. Sur l’une des photos de la galerie ci-dessus, on distingue le bâtiment de l’observatoire astronomique de la Sierra Nevada, situé vers 2 800 m d’altitude.
Mais il faut redescendre, car Florence doit déjà attendre au fourgon. Et doit commencer à craindre que je me torde une cheville ou pire encore, que je ne retrouve pas mon chemin à la descente, ou que je me sois fait dévorer par les patous locaux… Bref, il faut descendre. Et 45 min plus tard, c’est fait. Nous voici réunis. Alléluia!
– Contact. Les voyants s’allument.
– Tour de clé et… le moteur démarre.
– Première et on embraye: on commence à rouler… Tout semble bien se présenter…
– Florence: “On reprend la petite route par laquelle on est arrivé hier?”
– Oui, pas de problème. Et nous voila partis. La route s’élève très vite dans les vergers d’oliviers, et d’épingle à cheveux en épingle à bigleux nous amène à un col. Puis elle redescend aussi sec dans une autre vallée où on croise des chevaux qui auraient fait craquer Môn.
– Florence, dépitée: on n’est pas passé par là hier.
– Oui, je me suis encore planté, mais où diable as tu mis la route que j’avais soigneusement rangée hier soir?
– Grrrr. Demi-tour!
Le soir venu, il faut nettoyer la machine et quoi de mieux qu’une bonne douche bien chaude? Le bonheur.
Après le diner, moins drôle, il faut faire la vaisselle. Muni des couverts sales et des ustensiles adéquats, je file vers le “bloc vaisselle”, en empruntant un itinéraire qui à un moment passe à l’ombre des cyprès florentins taillés en voute… Crac! Il y avait une marche, que je n’avais pas vue. Le choc dans la colonne est sévère et je sens que les jours à venir vont me rappeler des épisodes antérieurs fort désagréables… Trop tard. Il faudra faire avec.
Le 2 février, balade à Grenade. Bus, à l’heure à la sortie du camping, direction le centre ville de Grenade. On monte sur la colline où se trouve l’Alhambra pour repérer les itinéraires et les temps de parcours en vue de notre visite prévue le mardi suivant. Il y a toujours autant de monde. Puis descente vers le centre historique.
Mauvaise pioche pour le restaurant. Il y a la queue partout où manifestement la cuisine a un bon rapport qualité/prix. Je choisis au hasard un truc à l’apparence sélect, mais à la cuisine prétentieuse, peu abondante et pas du tout convaincante. Et chère de surcroit. Tout faux. On termine par une flânerie dans les rues du centre historique et du Paseo de los Tristes qui chemine dans la vallée entre les collines de l’Alhambra et celle de l’Albaycin.
Retour au camp par le bus 390, qui est remarquablement à l’heure. Mais que de ralentisseurs sur le parcours qui à chaque fois rappellent combien nos amortisseurs sont fatigués!
Le 3 février, c’est le jour de la balade en station de ski. Sauf que la nuit il a plu. Et le matin, il pleut! Ciel totalement bouché. Pas de vent, mais humidité à saturation et température de 3°C. On attendra que le temps se lève et on avisera…
– 12 h: on avise. Il pleut, c’est bouché, le brouillard nous cerne.
– 14 h: on avise toujours. Visibilité zéro. Mais il ne pleut plus. L’optimisme est de rigueur.
– 15 h: on avise encore. Limite inférieure du brouillard et des nuages à 1 000 m, ce qui est juste à notre niveau. On voit en dessous, mais rien au dessus. Ça commence à sentir le roussi pour une sortie en station de ski. Surtout que la route doit être gelée sur une portion et enneigée et glacée sur la partie sommitale. On commence à douter. Florence parle de faire la soupe aux légumes. Ça craint!
– 16 h: on va peut-être arrêter d’aviser et commencer à se résoudre à l’impossible. Il peut vraiment faire mauvais temps sur les contreforts de la Sierra Nevada. On nous a vendu du rêve. On en profite pour bosser le bouquin que l’on a acheté sur l’Alhambra en prévision de notre visite demain.
– 17 h. On n’avise plus. On prend le goûter. On est sérieux. On aurait pu, de dépit, sortir la bouteille d’un très bon vin rouge qui est débouchée, un Ribera del Duero. Mais on résiste. Pas uniquement par souci de dignité mais pour ne pas tout de suite oublier ce que l’on vient de lire sur les décorations du plafond de la Salle des Ambassadeurs. Car ce soir, il y aura interrogation écrite.
– 18 h. C’est foutu! Florence a sorti l’épluche légumes. Il ne me reste plus qu’à faire le deuil d’une sortie à ski. Mais, tout n’est pas perdu. C’est bon, la soupe. On l’appellera la “Soupe des Ambassadeurs”.
Ce soir, pas de photos, on n’a pas osé vous présenter nos patates, nos carottes, et pas davantage, le poireau.
– 20 h: on ne voit plus les nuages, pas davantage le brouillard. Et pour cause, la nuit est tombée engloutissant nos derniers espoirs de voir la montagne s’allumer au soleil couchant. Toutefois, un doute subsiste: et si nous avions été stupides? Et si par hasard la couche de nuages avait cédé la place à un grand soleil au dessus de 2 0000 m? Et si nous avions été perspicaces au point de consulter les caméras en temps réel de la station de ski?
Alerte! Encore une hypothèse insensée. Des caméras au sommet d’une montagne? Pour surveiller les skieurs? Que ne va-ton inventer?
– 22h08: zéro étoile. Visionnage de la caméra temps réel de la station de ski: sombre et non conclusif. Nous avons eu raison de rester prudent et de ne consulter les caméras que de nuit. On n’est jamais trop avisé avec les nouvelles technologies!
28-29-30-31 janvier
Ou ne rien faire est le moyen le plus sûr pour plus tard pouvoir faire…
Pause au camping de Castello de Banos.
La plage, une température convenant aux retraité(e)s et un mal de dos qui incite à rester tranquille pour pouvoir ensuite profiter du voyage…
No comment!
Ah, si, au soleil, il fait bon et la table de camping est de sortie. Déjeuner au soleil, le bruit des vagues (vaguelettes selon nos standards), comme toile de fond sonore…
Mais comme aucun tableau n’est jamais parfait, l’engin de chantier style tracteur forestier qui permet à l’agent d’entretien de tailler les arbres vient de se mettre en branle. C’est le chantier. Quand il s’arrête, c’est idyllique.
En fait, selon les légendes locales, c’est juste fait exprès pour que ces retraités autocentrés puissent mesurer à quel point ils ont de la chance, quand les locaux arrêtent de bosser, à condition toutefois que tous les services continuent à fonctionner, bien sûr.
Dans l’après-midi, notre voisin, un anglais qui nous avait abordé en français la veille, nous rend visite.
Il a apporté une carte sur laquelle il nous indique les sites que nous devons absolument visiter, ainsi que les astuces pour payer moins cher, notamment avec la formule “CampingTour” et “kono – konocard”. Qui permet avec un système de cartes et de tampons d’obtenir 5 nuits gratuites si on a séjourné 4 nuits de suite dans 4 campings adhérents à la formule.
Il nous donne aussi sa carte de visite avec son site “TOPSPOTS” qui détaille les itinéraires et les lieux où il est recommandé de s’arrêter. Son objectif est de faire un site du type Park4night” pour toute l’Europe.
Steve Kennedy: anglais d’origine irlandaise (nom confirmant le propos); profession avocat; grand voyageur, semble habiter en Espagne en caravane, légèrement en surpoids et interdit d’alcool. Rencontre surprenante mais très intéressante. Quand il repart, il nous laisse une carte routière annotée avec ses coups de coeur.
Plus tard dans la soirée, peu après le premier but du Real contre Brest, le vent s’est levé, la température est tombée (aucun rapport avec le Roudourou), et la pluie s’est mise à tomber. Et comme on est dans la partie basse du camping, tout près de la mer, nous voici les pieds dans l’eau, à hauteur de semelles, moins qu’à Redon aujourd’hui, mais plus qu’à Marrakech. Et la météo qui lance une alerte “vagues submersion” juste au droit du littoral où nous nous trouvons, voila une annonce sympathique pour la nuit.
Faut-il prendre tout cela au sérieux quand pour demain matin les prévisions sont: grand soleil?
Dernière précision: la piscine du camping est ouverte, mais comme il n’y a pas de maître nageur bronzé et avec des pectoraux d’enfer, pas une seule dame n’est visible à l’horizon. Température de la mer aujourd’hui: 14°C. Presque comme en été en Bretagne. Devinez combien de baigneurs et de baigneuses on a vu aujourd’hui? Zéro. Il faut dire qu’il n’y a pas davantage de maître nageur. Même cause, même effet?
A moins que plus préoccupés par la botanique et toutes les fleurs de saison que par les muscles, les patients, pardon, les retraités soient allés contempler les fleurs de bougainvilliers et de bignones?
Le jeudi, balade photographique sur les crêtes surplombant la route côtière dans l’espoir d’apercevoir des arbres, des fleurs, voire quelques animaux. Ce qui domine, ce sont les serres agricoles, y compris sur les pentes raides, reprenant les anciennes terrasses. Le paysage est du coup complètement mité par des taches claires de plastique de serre. C’est moins que dans la plaine d’Alméria, mais c’est invraisemblable de voir où ils peuvent les loger. Sans compter les réservoirs d’eau d’irrigation dans des citernes rondes au sommet des collines..
La moisson photographique, pour une sortie avec un objectif macro n’est pas très bonne, mais elle n’est pas nulle non plus. Quelques photos intéressantes, mais comme nous sommes dans un milieu relativement hostile, la diversité est très faible. Ma connaissance des plantes locales est par contre nulle et même les arbres me sont inconnus, sauf lorsque ce sont des espèces importées, comme les eucalyptus ou les ficus. Au sommet d’une colline un arbres avec un port magnifique se détache sur le ciel. C’est un … impossible de mettre un nom. Heureusement un peu plus loin, je croise un habitant du cru. Il me répond que c’est un “agarobu”… C’est du moins ce que je crois avoir entendu. Photo de feuilles effectuée et recherche sur l’application “Plantnet”, la réponse tombe: caroubier. Tout s’explique, en espagnol ça donne “agarobo”. En prononçant vite ça ressemble un peu. Plus loin ce seront quelques graminées qui présentent un intérêt graphique au soleil. Et dans un descente, sur le tombant des rochers des silhouettes de détachent. Difficile de dire ce que c’est, ça ressemble à des chamois, mais si près de la mer et si près des habitations, c’est inattendu, du moins pour nous qui devons crapahuter longtemps en montagne pour les voir.
Le soir, Steve, notre voisin d’origine irlandaise (je ne dis plus anglaise car pour lui c’est une insulte!) passe devant notre roulotte et nous demande si nous avons besoin de quelque chose. Il va faire les courses. Peu de temps après il nous ramène du pain, un baguette froide et une chaude. On veut régler l’addition, il refuse. On ne lui propose pas un apéritif, selon la mode bretonne, car il ne peut pas boire d’alcool. Il évoque ses problèmes de santé, et surtout nous indique que ses projets immédiats sont de poursuivre la visite de plusieurs pays dont l’Afrique du Sud, la Namibie, puis plus tard l’Australie, la Nouvelle-Zélande, les Fidji, les Tong et les Samoa.
Objectif: 100 pays visités.
Puis, trouver une femme, la première n’ayant pas donné satisfaction et faire plein de petits Kennedy. Cela nous rappelle les aventures de Dédé Bernicot de Daoulas qui, tout aussi handicapé par son poids, traine sa carcasse dans le monde depuis des décennies et résiste à une batterie de cancer qui aurait tué n’importe quel sédentaire.
Le dernier jour dans ce camping, le 31 du mois de janvier, on passera le remercier avant notre départ.
Courses, puis direction le camping Las Lomas au pied du versant nord de la Sierra Nevada. On a l’intention d’en faire notre base pour la visite de Grenade car il est possible de laisser le camping-car en toute sécurité et de prendre un bus pour rejoindre Grenade.
Les vols étant assez fréquents dans les lieux touristiques, inutile de tenter le diable. Surtout qu’il est difficile de faire plus touristique que l’Alhambra.
Arrivée au camping Las Lomas. Le terrain de camping surplombe un canyon au fond duquel un lac d’un vert émeraude s’étale en serpentant entre les parois. Au loin, les sommets de l’ouest de la chaîne de la Sierra Nevada servent de décor. C’est beau. Et c’est calme.
Mais la température a sérieusement chuté car nous sommes à 1000 m d’altitude. 14°C dans la journée au soleil, mais -1°C prévu cette suit. On va ressortir les manteaux et anoraks au dessus de la couette.
22h: pas un bruit. On entend le léger souffle du ventilateur du PC portable qui est pourtant d’une discrétion remarquable: 30 db maximum. Mais le silence n’est pas pesant, rien à voir avec celui de l’aire d’autoroute des Catalans à côté de Perpignan. Ici on va sans doute pouvoir entendre le murmure des étoiles.
27 janvier
Ou l’improvisation, de cul de sac en cul de sac, réserve de bonnes surprises.
La météo s’est sérieusement dégradée et le service de la météo espagnole a diffusé des messages d’alerte aux vents violents qui affectent toute la zone de la Sierra Nevada et des alentours. Nous sommes concernés et, comme il a déjà plu pendant la nuit et que le vent et la fraicheur commencent à être dissuasifs, on décide de plier bagages et de faire route vers le littoral méditerranéen au sud de Grenade. On devrait bien trouver de quoi se poser, soit dans un camping, soit sur un « camper park ».
Vu de Beas de Granada où nous trouvons, les sommets enneigés de la Sierra Nevada sont noyés dans les nuages et les skieurs doivent évoluer dans un épais brouillard et un vent violent de travers. Dans ces conditions, pas certain que les remontées mécaniques fonctionnent encore. Mais ce n’est pas notre sujet du jour.
Sur l’autoroute A-44 qui contourne Grenade par l’ouest, on passe dans une région agricole faite de collines cultivées. On y trouve des vergers d’oliviers, d’amandiers, mais aussi des sols récemment travaillés et nus ainsi que des parcelles où le blé d’hiver commence à verdir le sol. Tout ceci construit de véritables tableaux que les locaux ne doivent plus voir, tant c’est familier pour eux, mais que les habitués des bocages bretons ne peuvent pas manquer de remarquer. Impossible de s’arrêter sur l’autoroute, et il faut sortir si l’on veut photographier les lieux. Je sors à Durcal/Nigüelas et cherche un chemin pour retourner sur l’endroit où le paysage était admirable.
Première tentative sur un chemin de terre et premier cul-de-sac.
Un peu plus loin, seconde tentative sur une piste qui mène à une construction fermée. Sans doute une séquelle de la crise immobilière de 2008. Second cul de sac.
– Silence de Florence qui dit plus que des longs discours…
Troisième tentative en remontant sur la route de Marchena. Sur la droite dans un virage, un chemin de terre semble filer dans la bonne direction : le nord. Raté, 100 m plus loin, virage à gauche à angle droit vers l’ouest… Pas vraiment la bonne direction. Je suis toujours tenté d’aller voir plus loin si par hasard, le chemin ne file pas dans la bonne direction.
La logique aurait été de regarder une carte, mais les chemins d’exploitation ne sont pas tous marqués et on reste dans l’expectative. Heureusement, après 500 m environ de piste, on arrive dans un paysage époustouflant : au milieu des collines où les vergers d’amandiers et d’oliviers dessinent un patchwork improbable, une gigantesque ferme solaire. Une multitude de grands cadres, montés sur des supports mobiles destinés à suivre la course du soleil, garnis de panneaux solaires, fait contraste avec les vergers. Sous les cadres, des lapins se baladent librement, tout comme les étourneaux qui semblent impatients à être les premiers à picorer on ne sait quelles graines.
On poursuit sur la même piste et ce ne sont que tableaux remarquables de champs dessinés par des agriculteurs experts avec une palette limitée aux oliviers, amandiers, blés d’hiver et parcelles nues. A laquelle il faut rajouter les panneaux solaires. Et un ingrédient inattendu, la météo qui nous gratifie d’un ciel de tempête sur la plaine de Grenade et les montagnes en arrière-plan.
La piste continue dans les vergers, mais rien ne dit qu’elle offre une sortie quelconque, et je commence à craindre d’avoir à faire demi-tour.
– Silence de Florence qui n’a pas changé de discours et n’a aucune raison de le faire. Ah, si pourtant.
– Si, tu vois bien, la piste continue sur la droite. Ça devrait bien sortir plus loin, là où il y a des maisons.
Le ciel au fond continue à s’obscurcir et barre l’horizon comme un gigantesque rideau gris foncé et menaçant. Par contraste, au premier plan les champs et les maisons sur le sommet de la colline s’illuminent au soleil.
Et cerise sur le gâteau, le chemin, après 4 ou 5 km de piste de graviers ou de terre, débouche entre deux maisons sur une route en béton. Tout est bien qui finit bien. C’est l’heure du déjeuner.
On reprend l’autoroute et quelques kilomètres plus loin, une aire d’autoroute est la bienvenue.
Car entre temps, une alarme s’est allumée sur le tableau de bord : « niveau Ad Blue faible ».
La poisse ! La dernière fois que nous avons eu une série d’alarmes incohérentes, cela avait commencé avec le même délicat message invitant à rajouter l’ad blue.
Achat de 10 l du bidon d’ammoniaque. Retour au fourgon. Impossible de dévisser le bouchon !
Trop dur pour un ex-chercheur aux doigts fragiles. Retour à la station où je guette les sorties pour trouver un espagnol costaud, type chauffeur de poids lourd patibulaire. En voici un…
Je lui demande, en mimant l’action s’il peut m’ouvrir le bouchon coupable. Il me regarde de travers comme si j’étais débile. Je recommence à mimer..
Et il me demande :
– aprir ?
– Si, si ! Muchos gracias.
Et hop ! Ca a l’air tellement facile qu’il semble se demander pourquoi je ne l’ai pas fait moi-même.
– et un muchos gracias de plus pour faire bonne mesure.
Contact : et … affichage : « Niveau Ad Blue faible ». Et merde ! Ca recommence.
Contact coupé et respiration profonde, style cohérence cardiaque enseignée par Florence.
La paix règne sur Terre…
Contact, moteur, affichage : autonomie 560 km ! Ouf c’est reparti.
Arrivé sur le littoral on cherche une aire de camping-cars. La première est un mouchoir de poche, bourrée à la gueule où les camping-cars sont les uns sur les autres, sans aucune visibilité. L’horreur.
Puis, nouvel dans un camping qui semble aussi bien chargé. Au téléphone, confirmation, tout est plein.
Plus loin, on voit un camping-car tourner à droite et c’est un signe qui ne trompe pas. On le suit et bientôt le signe camping apparaît. On rentre et on fait la queue, car il a 4 autres camping-cars devant nous. On fait aussi la queue à la réception. Il y a de la place, on prend. Et on tombe sur une colonie de néerlandais et d’allemands installés à demeure. Quelques français, britanniques et un belge. Mais pas la trace d’un espagnol, sauf dans les personnels d’entretien…
Décidément le monde est bien ordonné. Les uns bossent pendant que les autres glandouillent.
Demain, pas de compte-rendu : c’est la journée des draps, de la lessive, du nettoyage.
J’ai intérêt ne pas me tromper lors du changement de housse de couette. C’est chouette, non, cette vie douillette, avec même une petite balayette.
26 janvier
Ou comment voir les abeilles au travail en janvier…
Dimanche
On se réveille sur l’aire de Camping cars d’Orgiva dans la matinée après une nuit calme . Sur l’aire en question, de jeunes enfants jouent avec des chats noirs et blancs. En plein milieu de l’aire, près de leur camping-car, un couple de retraités anglais prend son petit déjeuner comme s’il était dans son jardin. Au milieu de l’aire il y a un car Iveco aménagé en maison roulante qui vient … d’Estonie. 4 400 km pour venir jusque là. Au moins ils sont loin de la frontière avec la Russie! Plus loin, il y a un couple d’allemands avec un camping-car Hymer/Mercédes 4×4 dont le tarif est affiché à 240 000€ sur le site Hymer. Tout ça pour venir dormir sur une aire de stationnement où la nuit coûte 14 €.
On quitte Orgiva et on contourne la Sierra Nevada par l’ouest. On décide de s’arrêter dans le camping de Alto de Vinuelas. près de Beas de Grenada, sur le versant sud de la Sierra de Huétor.
On a une vue magnifique sur le versant nord de la Sierra Nevada. Le sommet est encore enneigé, contrairement au versant sud où la fonte est presque complète. Et l’on aperçoit la station de ski qui part du point culminant et s’étale sur les pentes situées au nord. Lesquelles sont actuellement au soleil. Heureusement il y a du vent et la neige doit encore tenir. Sur les photos, à 100% sur écran de PC on distingue les remontées mécaniques et … quelques skieurs. Mais bien que ce soit dimanche, il n’y a pas la foule dans la station de ski la plus au sud de l’Europe.
Balade sur un chemin d’exploitation au milieu des vergers d’oliviers et d’amandiers en fleurs. Au bord du verger on entend le bourdonnement des abeilles au travail. Seraient-elles épargnées par les pesticides dans ces vergers en pente soutenue? A éclaircir.
25 janvier.
Ou il devient urgent d’apprendre à lire les cartes…
Après le raté d’hier et le virage critique dans Barrio Alto de Trevelez, on part prendre la route certifiée Orux Maps qui monte sur le versant sud de la Sierra au dessus de Trevelez.
Le démarrage est raide, raide, avec une chaussée non pas goudronnée, mais bétonnée, avec des rainures transversales de manière à augmenter l’adhérence. La pente ne faiblit pas et on reste en première. Quant aux épingles à cheveux, elles sont raides, serrées mais bien plus praticables que celle d’hier en ville. Le béton cède la place à une piste caillouteuse et poussiéreuse (au mois de janvier!). Une voiture descend en face de nous… Ça ne passe pas. Je m’arrête mais ne bouge pas d’un poil. En face, avec sa berline Mercédes, il fait marche arrière en râlant. On passe. Je lui fait un signe de remerciement. Il fait la gueule, visage fermé.
On finit par sortir sur une vire assez plate qui longe le versant de la montagne, puis on passe sur un plateau où enfin une maigre forêt de pins sécurise l’itinéraire.
On s’arrête pour profiter du paysage et du calme. Dans le lointain, des cloches de vaches tintent. Tout est parfait:
– l’air est pur, le ciel est bleu, les cloches des vaches enchantent les alpages et
– les chiens de bergers se mettent à aboyer après nous.
Il faut dire que l’on a entamé une marche vers le haut sur un chemin d’exploitation manifestement utilisé par des 4×4. On débouche sur un replat où une installation pour les vaches est protégée par des fils de fer barbelé. Et trois bergers allemands entament leur concert quand ils nous aperçoivent.
L’un d’eux plus téméraire vient sur nous, s’arrête, jauge la situation sans danger, mais continue à nous surveiller.
On ne peut pas passer. Il faut redescendre. On tourne le dos et on repart vers le bas. Aussitôt le berger le plus proche se met à courir vers nous.
Je me retourne et ramasse les os de la jambe d’une brebis fatiguée et les lui jette. Il est surpris, mais fait quand même demi tour, nous laissant apprécier le bonheur simple des alpages au soleil de la Sierra Nevada.
Décidément, la lecture de la carte ne nous avait pas tout dit…
On rejoint Trevelez pour faire des photos du virage critique (voir ci-dessous). Puis on reprend la route pour rejoindre une petite ville plus à l’ouest: Orgiva. En chemin, on visite des villages considérés comme les plus beaux de cette région. Accrochés aux flancs de la montagne, blancs sur fond gris brun, ils se détachent au soleil et surprennent par leur côté surréaliste. Que faisaient-ils toute l’année dans ces villages? La réponse d’aujourd’hui est simple: du tourisme. Ce sont Pampaneira, Capileira, Bubion.
Mais avant d’y parvenir, j’ai fait une erreur de lecture des panneaux indicateurs à hauteur de Pitres, j’ai lu Capileira et ai pris la route supposée y monter.
Funeste surprise: la pente est encore plus raide que tout ce que l’on a fait avant, du 25% ou quelque chose dans le genre, agrémentée d’épingles à cheveux et de feuilles de châtaigniers sèches sur les bords. Et bien sûr, une voiture arrive en face…
Je serre sur la droite, roue sur les feuilles. En face il fait pareil et passe. Quand je veux redémarrer, patinage assuré sur les feuilles, ça ne bouge pas d’un pouce. Et pourtant c’est sec. Seule solution, faire marche arrière pour revenir sur la chaussée. Ouf, c’est reparti. En haut c’est un petit village, avec une route en cul-de-sac. Et ce n’est pas Capileira, c’est San Antonio Capillerilla. Il y a une belle chapelle. Mais bon, on est pressé de redescendre.
Gentil, le fourgon, gentil, promis on prendra soin de toi si tu nous ramène à bon port…
24 janvier
Ou comment faire faire une crise cardiaque à Florence…
Aujourd’hui, on plie bagage. Trois jours au camping d’Amocita et nous avons eu notre dose de vent pour le mois.
Je n’ai pas obtenu du patron du camping, pas plus que du maçon qui construit les “dômes” blancs qui ressemblent à des bergeries, une explication claire de l’origine de ces constructions.
Cela ne semble pas être un motif d’ancienne bergerie andalouse. Peut-être un avatar des yourtes prisées des hippies qui autrefois fréquentaient la région? Le mystère reste entier.
Étape de liaison sur la route C-348, direction ouest. Nous faisons une pause à Cajar pour déjeuner. Je me suis cru malin en allant acheter un pain dans une vraie panederia, et je me suis retrouvé avec une brioche et un gâteau typique du coin qui ressemble à un quatre-quarts. Tout faux.
Puis on prend la route de Trevelez, gros bourg accroché à la montagne, célèbre pour la qualité (hygrométrie faible et vent) de son air et la maturation des jambons crus de Serrano. La rue principale est occupée par des affineurs de jambon qui, bien sûr, font de la vente directe pour les touristes.
Le camping de Trevelez est un peu à l’extérieur de la ville, sur le flanc de la montagne et les emplacements sont… sur des terrasses. Calme, peu fréquenté en cette saison, c’est une base majeure pour la randonnée dans la Sierra Nevada. Florence ayant toujours des problèmes, on verra ce que l’on peut faire.
Comme la réception du camping n’ouvre qu’à 16 h nous avons le temps d’aller faire un tour plus haut en montagne, en empruntant une route repérée sur Orux maps.
C’est parti. On arrive, bizarrement dans la partie haute de la ville (Barrio alto) où les rues sont étroites à souhait. Cela ne correspond pas vraiment à ce que j’ai vu sur les cartes, mais sur le moment je n’y prête pas attention. A un moment, au bout d’une petite place, la route continue tout droit après ce qu’il faut bien appeler une espèce de rampe raide . Mais un panneau sens interdit limite l’accès aux résidents. Il reste l’option de tourner à gauche, sauf que le virage paraît trop serré pour le fourgon. Une voiture garée sur la droite du virage voit qu’elle gène. Complaisant, mais bougon, le chauffeur amène son véhicule en marche arrière dans le début du sens interdit, me libérant ainsi de la place pour tourner à gauche. Et c’est parti. Le virage est hyper serré, aucune marge d’erreur, et en plus c’est raide, raide. Florence proteste en disant que ça ne passe pas. J’y vais…
Le moteur ronfle, (Kilian va râler!), et dans la courbe une des roues se lève, l’arrière gauche. Manquant d’appui, la roue avant droite se met ) patiner… ça grimpe, ça ne grimpe plus, si, finalement ça passe juste juste. Florence est furieuse et elle a raison. Cette fois ci, c’était trop limite…
On peut mieux se représenter la situation avec les deux photos de la galerie ci-dessus intitulées “voyage à gauche toute”. En fait l’itinéraire du camping-car est matérialisé par la course du teckel dans la pente. Je vous promet, je ne l’ai pas peint sur la route, il a compris sans mot dire et a constitué le figurant idéal. Sympas les habitants de Trevelez, non?
On poursuit la montée dans la rue où il y a de la place pour une seule voiture. Et au bout de 100 m, cul-de-sac. Rien d’autre à faire que de rebrousser chemin. Arrivé au virage critique, pas question de le prendre directement en plongeant l’avant du fourgon dans la pente en espérant que les roues directrices permettront de tourner sans encombre. J’avance tout droit dans la rue en sens interdit et je prend la rampe de descente en marche arrière. Aucun problème, je vous l’avais bien dit.
Mais pourquoi diable, une route qui devait nous faire grimper sur la montagne nous a envoyé par des ruelles impraticables au fond d’un trou à rat? Tout simplement parce que… j’ai mal lu la carte.
Il fallait tourner à gauche avant d’arriver en ville. Grrr.
Bilan:
– mon point de vue: excellent exercice de conduite;
– Florence: comportement stupide et à risque pour le véhicule.
Vous aurez tous compris: ce soir, on fait chambre à part!
23 janvier.
Ou l’on perd contenance en cherchant du pain!
Ce jeudi le vent est presque tombé au camping d’Amocita et il fait bon. Chaises et table de camping pour déjeuner en plein air sont de sortie. C’est la première fois depuis notre départ et on apprécie ce moment tant attendu.
Après ce moment de plaisir, on part visiter les villages (que l’on pourrait qualifier de bourgs chez nous) proches.
Padules, situé près de la route principale mais dont le flanc sud surplombe une falaise et une profonde dépression où l’agriculture en terrasses est florissante. Puis Canjayar.
On emprunte ensuite une route qui monte vers le nord, sur le versant sud de l’extrémité est de la Sierra Nevada. Elle nous mène, au terme d’une magnifique route en lacets, sur un plateau d’où la vue vers le sud est extraordinaire. Les villes dans la vallée apparaissent comme des taches blanches. Le relief est dominé par une alternance de collines au sommets arrondis et aux flancs en pentes abruptes lacérés par l’érosion pluviale. Un paysage de cauchemar si l’on supprime toutes les traces humaines et si l’on se projette à l’époque préhistorique.
La route se poursuit sur un plateau où la présence humaine se fait rare. Un monastère en excellent état semble avoir résisté au temps et aux vicissitudes de la vie politique espagnole. Un peu plus loin vers le nord, un petit village au bord de terrasses est à l’abandon. Les murs sont construits avec des lauzes sombres et l’aspect général est sinistre.
L’agriculture en terrasses semble avoir été généralisée sur les pentes de la sierra, par contre sur le plateau, les arbres commencent à reprendre leurs droits, à moins que ce ne soit le résultat d’une politique de reforestation à base de chêne vert. L’aspect est nettement plus accueillant, par contre, les chemins de randonnée dans les bois sont presque aveugles. Cela contraste avec les vues dégagées sur des sommets et des pentes pelées.
On abandonne l’idée de poursuivre vers le nord et on fait demi-tour. Sur le chemin du retour on passe par la ville d’Ohanes. Il s’agit d’une de ces villes accrochées à la pente de la montagne, au milieu d’un ensemble de terrasses de culture. On rentre dans ce gros village. La rue que nous empruntons est étroite. Le fourgon passe partout, mais rien de trop. Les pentes sont impressionnantes. Une fois rentré, pas le choix, il faut avancer, impossible de faire demi-tour.
Florence inquiète me demande:
– tu es sûr que ça va passer?
– oui, s’ils passent eux, nous devons pouvoir passer aussi.
Nous cherchons une boulangerie, mais au terme de la traversée, pas la trace d’un magasin. On se gare, et muni de mon traducteur je prépare la phrase clé:
– Où y a-t-il une boulangerie s’il vous plait?
La phrase est bien comprise, mais la réponse ne peut être transcrite dans ce compte-rendu, car je n’ai rien compris, sinon le signe du bras indiquant l’autre extrémité du village, celle d’où on vient.
Demi-tour, on repart par une autre rue dans l’autre sens et on se gare sur une minuscule place au cœur du village. Ca tombe bien, des habitants du cru sont en train de discuter à côté.
Florence repose la même question, mais avec un accent crédible et écoute la réponse…
Sauf que tous ont parlé en même temps et que Florence… n’a rien compris sinon que la direction est la bonne et que ça ferme à 17h30. Il est 17h, tous les espoirs sont permis.
On part à pied à la recherche du magasin qui vend du pain. La rue principale est presque plate, bordée de maisons d’un blanc éclatant. Régulièrement, des rues transversales permettent de joindre le bas du village au haut. Mais ça grimpe dur et aucune voiture ne peut grimper ces pentes réservées aux piétons.
Toujours pas de boulangerie.
Une habitante sort de chez elle au moment où on passe. Elle est encore assez jeune, mais porte une cigarette éteinte aux lèvres.
On repose notre question. Elle nous répond qu’elle doute que nous trouvions du pain.
Mais on a dû lui paraître en manque sévère de pain, car elle nous propose de partager le sien et de nous donner un morceau pour nous dépanner.
On s’étrangle en la remerciant et en lui disant que tout ira bien, même sans pain.
Effectivement le magasin est fermé.
On repart dans l’autre sens, direction le camping-car. Les habitant(e)s sont toujours en train de discuter. Voyant que nous n’avons pas trouvé de pain, une dame nous propose de l’accompagner chez elle pour nous donner un morceau de pain…
On se confond à nouveau en bredouillis pas clairs, mais signifiant que, ben, oui, non merci, on devrait pouvoir s’en passer… Merci, merci encore.
Autant les habitant(e)s d’Almocita et de Padules nous ont laissé une impression d’enfermement, autant celles d’Ohanes étaient prêtes à partager leur pain avec des inconnus.
Ça c’était le réconfort du jour. Nous n’avons toujours pas de pain, mais nous avons beaucoup plus: la démonstration que la générosité et le partage existent toujours et qu’ils se logent dans les endroits les plus inattendus.
22 janvier.
Ou quand on quitte les sentiers battus il faut être vacciné contre la solitude…
Second jour au camping d’Almocida, toujours en compagnie d’un vent à décorner les bœufs. Mais c’est une compagnie de tous les instants. Il faut dire que les humains sont plutôt rares dans le camping. Nous n’avons toujours pas croisé le ou la gérante. On verra pour l’inscription au moment du départ.
Ce matin, vers 8h30, c’est d’un calme absolu, la montagne est toujours nimbée d’une espèce de voile de brume. Seul un ouvrier avec une brouette charrie des gravats pour semble-t-il égaliser le sol autour de constructions vaguement en forme d’igloo. Sans doute une référence à une ancienne construction andalouse, mais vu mes connaissances en espagnol je n’ai pas pu lui demander de me raconter l’histoire de ces habitats qui aujourd’hui sont recyclés pour les touristes.
Avec Florence on monte au village d’Almecida. La route, bétonnée, longe un ravin et est exposée à un vent d’ouest qui vient du col voisin. La route est dangereuse et on comprend qu’elle soit interdite à partir du village. Sauf pour les locaux. Autour de l’église, des maisons blanches se tiennent compagnie et définissent des rues étroites où les façades sont souvent décorées par des arbustes à fleurs et notamment des bignonnes. Ce qui convient parfaitement à Florence. Les murs blancs servent de support à des poèmes écrits en espagnol, ce qui paraît pour le moins normal. On pourrait supposer qu’un patelin qui tient la poésie en honneur serait accueillant pour les visiteurs, qui ne sont pas très nombreux, puisque nous sommes seuls. Une camionnette klaxonne à plusieurs reprises pour alerter les habitants de son passage. Il s’agit du poissonnier. On aperçoit furtivement une dame et un homme avec un paquet en plastique à la main. Ils ont déjà disparu derrière une porte épaisse qui nous est fermée au nez. Pas très accueillant en dépit de la poésie.
Sur le chemin du retour au camping par le versant est le long des vergers d’oliviers on ne croisera personne. Mais sur les trottoirs, des aménagement récents de machines pour sportifs témoignent du désir de conserver la vie et d’accueillir des jeunes.
Le vent a dû les chasser, les jeunes. A moins que ce ne soit l’omniprésence des vieux, comme dans tous les villages où l’exode rural a fait des ravages.
L’après-midi, Florence étant fatiguée, elle décide de rester au camping pour se reposer. J’en profite pour aller randonner en montagne (entre 600 et 900 m d’altitude). Pour commencer je descend dans le fond de vallée à côté du camping. Tout au fond un ruisseau, où coule un maigre filet d’eau qui suffit à entretenir une végétation luxuriante dominée par des grands roseaux. Le sentier de randonnée remonte sur le versant opposé, avec par endroits des passerelles de bois où la terre instable s’est effondrée. Passage sur le sommet de la dorsale et descente dans la vallée suivante, celle du Rio Andarax.
Sur le versant sud, un plateau est recouvert de structures métalliques qui supportent des voiles protégeant les cultures. Des tuyaux d’eau courent dans les champs et le long des vallées. L’eau est au coeur de toute activité dans ces montagnes. Des canaux plus anciens (époque andalouse?) serpentent le long des pentes. Mal entretenus, ils sont abandonnés et remplacés par des gros tuyaux de polyane.
Le sentier de randonnée descend et suit le lit du Rio Andarax. A un moment, on ne passe plus et la fameuse croix indiquant que la trace empruntée n’est pas la bonne fait son apparition. Demi-tour. Le GR passe sur le talus d’un ancien canal sur le flanc de la vallée. Mais ce talus vient butter sur un rocher qui barre le passage, et sous le rocher c’est le vide. Un panneau précise qu’il y a un risque de chute (pelegro caida). A partir de là, le GR emprunte l’ancien lit du canal et le bord du canal fait office de garde corps. Au bout du canal une barrière. Il faut sortir du canal et emprunter un mauvais chemin surplombant le vide en s’assurant avec une corde fixée sur des poteaux plus ou moins branlants. Bref, en matière de sécurité on fait mieux et je me réjouis que Florence soit restée au camping. Impossible de passer avec elle à cet endroit. Mais ça passe. Plus loin le sentier descend presque dans le lit du torrent et à ce moment là, on peut relacher son attention. Mais pas bien longtemps, car le sentier s’élève à nouveau et recommence à franchir des balcons plus ou moins aériens au dessus du lit du torrent.
Au bout du bout, on arrive à une plate-forme qui domine le confluent avec le rio qui passe au pied du camping et déjà franchie au début de la randonnée.
En bas, c’est un peu le bazar. Des tuyaux et des canalisations venant sans doute prélever l’eau dans le Rio Andarax pour l’envoyer dans des réservoirs sur le plateau supérieur où sont localisées les cultures.
Partout sur les flancs de la montagne, des terrasses avec des murs de pierres sèches témoignent d’un mode classique de culture adaptée au terrain. La randonnée du jour porte d’ailleurs le nom de Los Canales.
Au fond de la vallée, des constructions en pierres sèches, torchis et couvertes de roseaux donnent au lieu une allure de far ouest, manière pueblo..
Mais le temps passe vite. Il va falloir rentrer, et pour cela remonter la pente.
Consultation de la carte topographique des lieux sur Orux Maps. Pas trop de difficulté: une route carrossable chemine un peu plus haut entre Padules et Almocita. Une fois rejointe, la marche s’effectue en terrain découvert et là, surprise! Le vent se rappelle au randonneur. C’est infernal. A en devenir sourd. J’ai oublié les boules Quies, alors je commence par protéger mes oreilles avec mes mains, mais cela ne suffit pas. Alors, je bouche les trous en appuyant sur le petit appendice qui borde de canal auditif. Magie, le calme revient. Mais ça crispe rapidement les bras que de se coller les doigts dans les oreilles. Alors on alterne. Bouché, débouché. Au final, à l’arrivée au camping, penché vers l’avant comme à la Pointe St. Mathieu un jour de tempête, je suis sourd du côté gauche.
Bizarres, les randonnées en Andalousie, vous ne trouvez pas? Finir sourd après 14 km de marche et 600 m de dénivelé, c’est pas banal.
Précision importante: pas un seul humain croisé sur le GR (PR-A 360). Solitude absolue. Excellent endroit pour disparaître sans laisser de trace. Ou pour aérer les oreilles. Au choix.
21 janvier.
Ou l’on découvre que les vieux, c’est comme les cloportes, ça vit en groupe…
Au départ de notre dernier camping à côté d’Aguilas, entouré de parkings saturés de camping-cars, nous poursuivons sur la route côtière en direction d’Alméria, et à chaque replat le long de la côte, même scénario: une tripotée de camping-cars. On en trouve même dans des situations improbables, sur de minuscules parkings surplombant la mer.
Et à de rares exceptions, dans ces camping-cars venus du nord, on ne trouve que des retraités. Ils sont au supermarché du coin, ils sont à la plage, ils sont dans leur chaise longue. Un monde extérieur à l’Espagne en Espagne. Parlant si peu espagnol et n’aspirant pas l’apprendre. A leur décharge, il faudrait encore qu’ils puissent apprendre. Ce qui reste à démontrer.
Pourtant, sur le plus grand parking d’Aguilas, figurait en bonne place un panneau indiquant: camping interdit, amende 3000 € par décision municipale. Manifestement, celui sur qui tombe l’amende n’a pas de chance.
La côte n’est pas saturée d’immobilier, mais progressivement, à partir de Véra, les terrains agricoles recouverts de voiles de protection blancs se multiplient. Puis ce sont les serres qui envahissent tout l’espace disponible. Bientôt, ce ne sont plus que des serres, des serres devant, derrière et de tous les côtés. Nous voici dans le grenier à légumes de l’Europe. Un modèle où le dieu plastique règne en maître. La zone est d’ailleurs qualifiée la “mer de plastique”.
La température monte. Quand on s’arrête pour déjeuner, il fait 22°C dehors, et le T-shirt s’impose. On comprend pourquoi les retraités adorent.
Pas besoin de rhumatologue.
Mais notre programme nous éloigne de la route côtière et on décide de suivre une route qui court dans une vallée au cœur de la sierra. Le paysage devient plus sauvage, avec des reliefs torturés par l’érosion, dénudés et souvent ocres. Les lits de rivières sont complètement secs et portent le charmant nom de “rambla”, à savoir lit de sable. Il n’a pas dû pleuvoir depuis un certain temps car la végétation n’est plus verte, mais gris vert, type bush dès que l’on quitte les zones cultivées. On commence à voir des amandiers en fleurs. Le printemps pointe son nez.
On s’arrête dans un camping en pleine campagne à côté d’un village perdu: Almecida. Maisons andalouses, blanches, groupées autour de l’église. Tout autour, des amandiers, des oliviers et de la vigne. Et quelques potagers. Des filets de plastique servent de protection contre le vent. La soirée sera d’ailleurs très ventée, style tempête, mais sans pluie.
Au bord du camping, un tombant à l’allure de canyon, aux pentes de terre caillouteuse semblant particulièrement instables, contribue à l’étrangeté des lieux. Au loin, sur l’autre flanc de vallée, une mer de plastique reflète les derniers rayons de soleil, avant de s’éteindre dans l’ombre naissante.
C’est calme, pas un bruit de moteur, juste le bruit des rafales de vent dans les oliviers et les vibrations du camping-car. Tout ceci convient à Florence qui, après un bon repas, rejoint la couette. C’est tellement bien d’être au chaud, protégé, lorsque les éléments se déchaînent.
Cette nuit, les étoiles vont s’envoler! D’ailleurs, je suis sûr que demain matin quand on va se lever, elles auront disparu. Magique, non?
20 janvier.
Ou on découvre une nouvelle épidémie: celle des vieux à fauteuils à 4 roues…
Lundi. Jour de deuil sur la planète, Trump et Musk prennent en main l’exécutif et tout le reste. Pour protester, même si tout le monde s’en fout, on fait la grasse matinée.
Quand on met le nez dehors, au camping de Los Llanos, il y a des français à notre gauche, des français à notre droite, et un petit groupe de français en pleine conversation devant notre carrosse. On est accueilli par un “Salut les bretons!”.
La conversation s’engage, comme si on était devant notre boulangerie de village. Inutile de préciser, il s’agit de retraités français qui prennent le soleil de la Costa Blanca. Ils nous demandent si on a l’intention de rester. Devant notre réponse négative, ils semblent déçus de nous voir seulement passer en coup de vent. Les conversations avec les anglais, les allemands et les espagnols ne sont pas évidentes quand on ne parle pas leur langue. Mais inutile de préciser, les français sont fâchés avec les langues étrangères.
Ils ont déjà réservé pour l’année prochaine et tout le camping est dans la même situation. Pris d’assaut (sans panzers) par les allemands, les néerlandais, les britanniques et à un moindre degré, par les français. Du coup, ça se transforme en quartier avec ses habitudes et ses… travers que nous ne connaîtrons pas, notre séjour ayant été bref. La voisine de gauche vient quand même offrir un petit pendentif en laine (?) à Florence avant notre départ, et notre voisin de droite, charpentier globe-trotteur à la retraite, me montre sur une carte les sites pour camper gratis sur la côte du côté d’Alicante.
Un accueil sympathique qui démontre qu’à l’étranger, on peut rencontrer des français très sympathiques. Notons que les présentations respectent les traditions: nous sommes les bretons, eux les bourguignons.
On reprend la route, direction Carthagène, jusqu’à Aguilas. Arrêt dans un terrain de camping où il reste une place pour camping-car. On prend. Quand on se rend à pied en ville à 1 km, on longe la côte où stationnent des dizaines et des dizaines de camping-cars venus de toute l’Europe du Nord. Dingue. Une concentration pathologique de retraités fuyant le froid, la pluie, la brume et prenant le soleil sur le littoral de la Méditerranée. Un groupe de vieux sur la plage joue à la pétanque. Devinez leur langue! Français, bien sûr, il manque juste le pastis.
On comprend que les espagnols veulent coller les étrangers dehors. Mais,ils ont besoin de leur euros, alors ils font le dos rond, où les poches des touristes. Enfin, ça c’était à Barcelone, dont la réputation n’est plus à faire.
Mais quelque chose ne tourne pas rond sur la planète. Le temps tourne beaucoup trop vite, qu’est-ce qu’on fout avec tous ces vieux?
Précision: on n’a pas encore trouvé de vaccin contre les vieux, ni même contre la vieillesse! Que font les chercheurs?
19 janvier
Ou il n’y a rien à dire… ou presque…
On roule, on roule. Jusqu’à Denia/Javea.
La côte est défigurée par des constructions anarchiques et semble accaparée par le tourisme. On cherche un terrain de camping pour passer la nuit. On tombe sur le camping Los Pinos, situé à Javea. L’accès est médiocre et le seul site qui nous est proposé est nul, boueux, coincé sous les arbres, en bordure de route et coûte 35 €. De surcroit, il faut souscrire pour 2 nuits. Ca sent l’arnaque, mais non, c’est seulement le résultat de l’offre et de la demande, car il est totalement plein, bourré à craquer.
On décline et on recherche un autre site. Ce sera Los Llanos où il reste 3 places. On arrive de nuit. C’est propre et calme. On se pose, et on se repose.
18 janvier
Ou comment on a eu confirmation de la supériorité du bouddhisme…
Après l’épisode peu glorieux de notre fuite de la veille sur l’aire du village des Catalans sur l’A9, on s’est réveillé sur le parking en face du portail du jardin de la maison de Marcel et Catherine. Nuit calme, à peine troublée par le départ de la camionnette d’un voisin à 5h du matin pour faire les marchés, suivie d’un petit déjeuner tranquille, tout est calme et serein. Direction Super U, lieu de rassemblement des retraités libres et en bonne santé pour un café matinal. On y retrouve Marcel, ainsi que les dames déjà rencontrées, celle de l’Ile de Batz, l’autre pouponnée au catholicisme tout comme il faut dans son enfance.
Conversation libre, décousue, sans début ni fin, mais de fil en aiguille, on arrive à la maxime du jour: “le bouddhisme est quand même beaucoup plus positif que le catholicisme, plus serein et moins morbide”. Quand on songe à tous les efforts des derniers papes pour nous convaincre que le représentant de Dieu (avec un grand D sinon, attention, blasphème et bucher…) cloué avec des vieux clous rouillés sur une vulgaire croix de charpentier est venu pour nous sauver, c’est quand même dommage. Ils perdraient moins leur temps en jouant à la pétanque.
Après la maxime du jour, on a une fois de plus dit au revoir à Marcel, chargé de faire une bise à Catherine.
A mon grand dépit, le cierge que j’ai offert à la Vierge Marie hier dans l’église de Montserrat, n’a eu aucun effet sur la santé de Catherine. La bougie n’était sans doute pas bio. Il faudra faire une réclamation.
Munis d’une carte de crédit toute neuve, on décide de repartir pour l’Espagne. Mais une telle aventure ne peut se faire avec un véhicule crotté et tout dégoulinant de trainées de sel mélangé à de la poussière. Direction la station de lavage du coin où notre carrosse aura droit à un shampoing aromatisé à la lotion U. Ce lavage est dédié à Kilian, lui qui prend si soin de nos carrosses.
Et c’est reparti. Voici Barcelone dépassée. L’aventure s’arrête dans un terrain de camping où dans la tente d’à côté une bande de jeunes espagnols font la fête. Ça gueule, ça braille, ça hurle et ça rigole. Jusqu’à quelle heure de la nuit? Telle est la question.
17 janvier.
Ou comment il suffit de signes dérisoires pour suggérer l’indicible…
Départ en début d’après midi pour visiter le monastère de Montserrat, au pied de la montagne du même nom, à 50 km de Barcelone.
Le site est absolument magnifique. Le cirque montagneux, blotti au fond d’une combe rocheuse, est méchamment construit. Une grande église, des bâtiments religieux d’une austérité toute franquiste, d’autres dédiés à l’accueil des innombrables touristes et pèlerins. Personnellement je trouve tout cela assez moche, sans harmonie et très orienté tourisme de masse et pompe à fric. Mais on prend quand même le temps de choisir un cierge et de l’offrir à la Vierge Marie pour qu’elle veille sur Catherine.
En dépit de la beauté du site montagneux, on ne s’attarde pas, le froid et le vent sont d’ailleurs dissuasifs.
Message de Marcel. La carte de crédit est arrivée.
On décide de rentrer pour aller la chercher. Rendez vous est pris pour le lendemain à la cafétéria de Super U. Pas question d’aller chez eux et de déranger Catherine qui a déjà plus que trop à s’occuper d’elle, son état s’étant encore dégradé dans la semaine.
On prend la route et pour faire au plus vite on reprend l’autoroute entre Barcelone et Perpignan.
Dans l’impressionnant réseau d’autoroutes autour de Barcelone on prend conscience de la dimension de la ville. C’est extrêmement chargé, mais relativement calme, sans agressivité. Bien plus calme qu’autour de Paris.
On franchit le Perthus et comme il est déjà 20h30 on décide de diner. On s’arrête sur la première aire de repos côté français, au village Catalan. Diner terminé, se pose la question de savoir où passer la nuit.
Il règne une étrange tension sur le site, sans que l’on puisse identifier l’origine du malaise qui s’en dégage. Le parking dédié aux voitures où nous nous trouvons est éloigné du parking camion. Mais surtout, il est presque désert.
Peu d’automobilistes s’y arrêtent pour mettre du carburant. Il faut dire qu’il est bien moins cher en Espagne et il faudrait être crétin pour faire le plein ici. Donc, peu de clients. Le magasin habituel des aires de repos est bien là, mais semble luis aussi désert.
Florence va demander où sont les toilettes. Le magasin est fermé. Il est 21h.
Un employé est pourtant dans le magasin, dans une espèce de guérite close, séparée de l’extérieur par une vitre blindée. Il indique que les toilettes sont ouvertes, mais il faut passer par l’arrière du magasin. Ça respire on ne sait quel parfum d’insécurité. A la sortie des toilettes, Florence tombe sur deux hommes. Qui ne l’agresseront pas. Non, certes, mais ils auraient pu, vous ne croyez pas.
Florence presse le pas pour rentrer au camping-car.
On ferme les écoutilles, on fixe les occultants sur les vitres. Mais on ne voit plus rien dehors. Ce qui normalement est une protection devient une menace. On est aveugle sur l’extérieur. Du coup l’ambiance devient encore plus pesante. Un bruit de piétons qui tournent autour du fourgon. Qu’est-ce qu’ils nous veulent?
Courageux, on décide de rester et de tenter de dormir.
10 h. On entend des véhicules passer, quelques rares piétons isolés. Une portière claque. Au loin le bruit des camions nous accompagne, tel un murmure presque rassurant, mais pas suffisant pour meubler le silence qui règne autour de nous.
Florence de ferme pas un œil. Moi non plus.
11h. Un hurlement de moteur troue le silence de la nuit. Le moteur monte dans les tours et l’échappement pourrait être celui d’une grosse berline ou d’une voiture de sport. On entend un démarrage de sauvage et le passage des vitesses à haut régime, dans un hurlement qui s’éloigne et se perd sur l’autoroute dans le lointain. Le silence retombe, plus pesant que jamais. Kéké ou go-fast? On ne le saura jamais.
Un bruit étrange à côté de nous suggère, quoi? On ne saurait le dire. 9a devient insupportable.
– Est-ce que tu dors?
– Florence: non.
– Comment tu te sens?
– Pas bien. Je le sens pas, ce site.
– Moi non plus. On dégage!
Et c’est bien la première que l’on part le plus rapidement possible d’une aire d’autoroute, sans savoir si nos craintes sont fondées ou pas. Sans savoir si nous sommes victimes d’un effet d’autosuggestion ou si effectivement l’endroit est dangereux.
De toute façon, impossible de fermer l’œil.
On reprend la route, il est minuit. La file ininterrompue de camions espagnols est toujours présente sur l’autoroute. Il faut bien nourrir l’Europe du Nord.
Au péage de Perpignan, une palanquée de policiers surveille les véhicules. Que cherchent-ils?
On n’en saura rien, car il nous faut rejoindre un point de stationnement aussi rassurant que possible. Ce sera devant le portail du jardin de marcel et Catherine à Prades. Ils vont assurer notre protection pour cette nuit.
16 janvier
Ou comment Gaudi aurait pu améliorer sa copie…
La routine. Train, métro comme si on habitait à Barcelone depuis 1970.
Plus sérieusement, on continue à visiter les œuvres de Gaudi à Barcelone, car il semble en avoir semé partout dans la ville. Il y a des boutiques Gaudi, des bouquins Gaudi, des T-shirts Gaudi, des tasses Gaudi, pourquoi n’y aurait-il pas de Park Gaudi. Eh bien, bizarrement, il ne porte pas son nom, c’est le Park Güell. Mais dans la rue en montée raide qui y mène il y a foule d’échoppes qui vendent du Gaudi.
Florence voulait visiter ce parc depuis longtemps, alors, après l’échec de la tentative d’hier, on y va ce matin. Il y a un itinéraire à pied depuis la station de métro Lesseps qui est bien plus pratique que celui que nous avons pris hier. Sur une de ses sections, il y a un escalier roulant qui nous évite de trop nous fatiguer.
Le parc est, comment dire, spécial. Certains commentateurs disent que c’est le plus beau parc qu’ils ont visité. Il est exact qu’il comporte des constructions signées Gaudi, pavillons et surtout une esplanade entourée de bancs complètement décorés avec les mosaïques du maître. Esplanade supportée par une forêt de colonnes de style dorique, colonnes peu élégantes ici, massives et bêtement géométriques. Le dessin du banc mosaîqué en surface fait référence à une vague. Mais autant l’architecture de la Sagrada Familia était extraordinaire, autant le design du parc est discutable. Les galeries maçonnées en pierre supportant les sentiers sont lourdingues (selon moi) et le parc lui-même a une conception assez quelconque. Quelques points de vue encombrés d’arbres.
Bref, vous l’aurez compris, je trouve que ce parc, qui est le lieu le plus visité de Barcelone après la basilique S.F., n’est pas génial, c’est le moins que l’on puisse dire, surtout quand comme nous on a eu la chance de visiter de nombreux parcs et jardins japonais où le maître mot est l’harmonie.
Ici, nulle harmonie. Seulement une suite désordonnée d’objets dont certains portent la marque Gaudi, d’autres non.
Relative déception, mais pas forcément partagée. Florence semble avoir apprécié la visite. Cela nous rappelle que tout est relatif.
Ah, si, il y a eu un très bon moment. Celui de notre pique-nique sur un banc sur l’une des terrasses du parc. J’ai commencé à balancer des miettes du pain au pigeon qui mendiait à mes pieds. Et dans les quelques secondes, 2 autres pigeons débarquent, puis 5 puis 10. Puis des moineaux, beaucoup plus vifs qui attrapent les miettes au vol, laissant les pigeons complètement ahuris. Puis débarquent les perruches qui nichent dans les palmiers. Belles, mais complètement empotées, se bougeant les plumes quand les miettes ont depuis longtemps disparu dans le bec des moineaux. Fin de partie pour le sandwich. On passe aux pommes. Et les morceaux de pomme, c’est un autre scénario. Les perruches se précipitent, gagnent à chaque fois, les pigeons étant peu intéressés et les moineaux pas convaincus. Florence me dit qu’il ne faut pas nourrir les perruches. Peut-être, mais on n’a pas vu d’interdiction et je n’ai pas lu le règlement intérieur du parc. Pas plus que les autres visiteurs…
On passe de 2 perruches à 3, puis un groupe de 7 à 8 qui viennent chercher les morceaux de pomme, retournent sur une branche, attrapent les morceaux de pomme avec une patte, puis méthodiquement viennent croquer avec leur bec.
Les trognons avec les pépins prendront le même chemin. Recyclage immédiat.
Morale de l’histoire: Gaudi, dans toute son oeuvre s’est inspiré de la nature. Dont acte. Mais il ne connaissait pas les perruches et leur extraordinaire palette de couleurs. Sans doute aurait-il connu ces volatiles farceurs et le parc Güell aurait gagné en beauté et en harmonie des couleurs.
15 janvier
Ou comment traire les touristes avec les travaux du Maître…
La moitié du mois de janvier est déjà écoulée et nous sommes toujours très loin de l’Andalousie. Mais tout va bien, car on a vu des cerises en magasin.
On pourrait se dire que cela va bientôt être le printemps, mais non, c’est juste importé d’Afrique du Sud. Au secours, à 15€/kg, il faut bien payer le kérosène.
Bon d’accord, ce n’est pas le sujet. D’accord aussi, la carte de crédit de Florence a été volée hier, mais au moins cela a un avantage évident: on ne pourra pas la perdre aujourd’hui!
Aujourd’hui, matinée consacrée à traiter les problèmes de carte de crédit.
Ce qui une fois réglé nous a permis d’aller visiter une autre œuvre emblématique de Gaudi à Barcelone: la Casa Batllo.
Plus modeste en taille que ce que nous avons vu précédemment, mais considérée par Gaudi lui-même comme l’une de ses œuvres les plus abouties.
Toujours aussi délirant avec des formes organiques, inspirées du monde vivant et en particulier du monde marin. Les jeux de lumière et de géométrie sont omniprésents. Le travail des artistes et artisans est toujours aussi remarquable.
En toute fin de visite, nous avons eu un film destiné à nous faire rentrer “dans la tête” de Gaudi, d’un artiste turc. Juste ahurissant. Le film est immersif, projeté sur toutes les surfaces de la pièce et les formes et les lumières voyagent dans l’espace à vous donner le tournis. Splendide, mais à déconseillé à celles et ceux qui ont des problèmes d’équilibre et de sensibilité aux variations de lumière, de couleurs et de formes.
Par contre, le prix de la visite est prohibitif, même pour les vieux: 41 € par personne. Une mine d’or, même si Florence trouve des excuses en disant que l’entretien de ce patrimoine coute cher. Ouais…
A l’issue de la visite, nous avons voulu aller au Park Guëll. Mal nous en a pris, nous étions trop tard et l’accueil des personnels a été pour le moins contrasté.
On continuera les visites demain… Car aujourd’hui, Florence commence vrament à se traîner et il vaut mieux éviter lma surchauffe!
14 janvier
Ou comment retomber sur le plancher des vaches entre deux stations de métro…
C’est un grand jour: on va visiter l’une des œuvres les plus dingues de tous les temps: la Sagrada Familia de Antoni Gaudi et de tous ses disciples et collaborateurs.
Les photos de la basilique déjà vues à de nombreuses reprises donnent l’illusion que l’on déjà vu le monument. Il n’en est rien. Quand on sort de la station de métro du même nom, on est saisi par l’ampleur de l’édifice et surtout sa singularité: il n’existe rien d’équivalent, ni avant, ni après et le style unique de Gaudi est immédiatement reconnaissable. L’autre surprise, même si là aussi on le sait déjà, est que la basilique est toujours en travaux 140 ans ou presque après leur démarrage (décidément, il leur manque un Macron, aux Espagnols. On pourrait pas le leur refiler pour finir leur basilique?).
Nous avions réservé les billets la veille et téléchargé l’application audioguide de façon à suivre les explications au fur et à mesure de la visite.
De l’extérieur, les différentes façades sont vraiment… très différentes. Entrée par la façade de la nativité, richement décorée, qui se veut joyeuse et consacrée à l’évènement extraordinaire qu’a été la naissance de Jésus pour les chrétiens. Sortie par la façade de la passion qui au contraire est sobre, triste voire sinistre comme peuvent l’être certaines œuvres chrétiennes mettant en scène la passion, la crucifixion -il y a plus gai- et la résurrection.
Gaudi a voulu, comme sur les calvaires bretons, “mettre en pierres” l’histoire de Jésus et la rendre visible à tous, dans un message unique, délirant, grandiloquent.
Et ce n’est pas l’intérieur de la basilique qui va atténuer l’impression de démesure que l’on perçoit à l’extérieur. C’est une forêt de piliers, une cathédrale de lumière, avec des couleurs bleues du côté du lever du soleil pour baigner l’intérieur à l’est d’une dominante bleutée. Du côté opposé, les vitraux ont des couleurs orange, rouge donnant une dominante chaude à la lumière qui inonde les travées.
Où que le regard se porte, une abondance de détails saute aux yeux. Tout a été pensé et mis en œuvre pour sidérer le visiteur et “rendre hommage au créateur”.
Bref, c’est délirant, c’est beau, c’est riche et totalement bluffant.
Il y a d’ailleurs tellement de détails que des bouquins entiers y sont consacrés et ne couvrent probablement pas la totalité de cette incroyable aventure.
Et pendant ce temps , les travaux continuent à l’extérieur pour achever la tour de Jésus, la plus haute de l’édifice, juchée sur les branches les plus hautes des quatre piliers principaux de la basilique.
Pour cette visite, nous n’avions pas pris nos appareils photos, car il sont lourds et la ville est réputée pour ne pas être la plus sure du monde pour les touristes.
Donc, photos faites au mobile, de qualité discutable…
Sortie après deux heures et demi de visite, il fait faim. Déjeuner dans un restaurant espagnol avec une paella de bonne qualité.
Le reste de la journée est consacré à la visite d’une autre œuvre de Gaudi: la Casa Mila. Œuvre tardive, avant qu’il ne consacre la totalité de son temps à la Sagrada Familia.
C’est toujours aussi délirant. Au “grenier” il a conçu une galerie construite sur la base d’une maçonnerie en briques qui sont utilisées pour édifier les nervures de la voute, toutes différentes, et au plafond, le toit. De telle sorte que cette voute, servant de plancher au toit véritable, donne un relief un peu cabossé à la terrasse sommitale. Et sur cette terrasse, des décorations délirantes viennent coiffer les cheminées et autres appendices fonctionnels.
Bref à nouveau, on reste ébloui par la créativité de Gaudi et par son génie de maitre d’œuvre, capable de mettre en musique tous les projets délirants, souvent très innovants, avec des équipes compétentes.
Encore éblouis par ces œuvres insensées, on décide de rentrer, car, à force de piétiner, les jambes commencent à accuser le coup.
Direction le métro. Deux stations à prendre avant d’arriver Place de Catalogne où passe le train qui nous ramène au terrain de camping à Cabrera de Mar, sur la côte au nord de Barcelone.
Il y a du monde, c’est chargé, bruyant, assommant même.
On sort du métro pour aller prendre le train. Florence cherche dans ses poches les tickets de métro et de train. Plus rien. Elle cherche aussi sa carte de crédit. Plus rien.
Tout a disparu, volé entre deux stations, ou sur l’un des quais. Y compris l’argent liquide sorti du distributeur la vaille (140€).
Nous voila revenus sur terre. Florence est très contrariée, on le serait à moins.
On rentre au camping-car après 3/4 h de train et 1/4 h de marche à pied. Il fait froid, cela remet les idées en place, mais ces idées, bien que rafraichies, demeurent parfaitement désagréables. Il faut s’y faire, on ne revient pas en arrière.
Opposition faite à la carte de crédit, il nous semble que le projet initial, à savoir poursuivre sur l’Andalousie avec la seule carte de crédit restante, la mienne, n’est pas très prudent. L’épisode d’aujourd’hui peut se reproduire, en dépit de nos précautions.
Alors, on fait appel à notre ange gardien: Kilian.
Il devrait pouvoir nous faire parvenir chez Marcel à Prades. la carte Pass qui est arrivée à l’Arc’Hantel en fin d’année.
Ceci va toutefois nous contraindre à retourner en France dans quelques jours.
Alléluia, la basilique était belle et la visite un moment de pure exaltation. On est prêt à recommencer.
Avec les appareils photos, ou sans? Telle est la question. Et pour connaître la suite il vous lire ce qui précède, qui contrairement à toute logique est ce qui suit…
C’est bon, vous suivez?
13 janvier.
– Ou comment casser la routine quotidienne? La méthode Florence!
Cela va bientôt faire deux mois que l’on est parti. On commence à fonctionner à l’habitude, ce qui est tragique quand seule la nouveauté est l’objectif du voyage. Heureusement, Florence a tout prévu pour rompre ces habitudes.
On s’installe dans le Camper-Park de Cabrera de Mar, dans la grande banlieue nord-est de Barcelone, à 3:4 h de train du centre ville.
On fait un voyage test en train, terminus Plazza de Catalunya.
Visite de la… Fnac, pour acheter une carte topographique de l’Andalousie et quelques bricoles, puis visite du grand magasin à la mode espagnole: Cortes Ingles. Prix de l’alimentation de luxe dissuasifs. Mais des fruits magnifiques, dignes des grands magasins japonais. Et aussi, sous clé, une bouteille de Pétrus à 9 995 €. Juste pour montrer qu’il y a encore des riches et que le monde tourne rond.
On décide de rentrer par le train. C’est archi-bondé. Très vite, en dépit du froid extérieur, la température monte dans le wagon. On est coincé debout. Et on a gardé nos manteaux et anoraks. Après une demi heure à ce régime, Florence sent venir un malaise. On sort en catastrophe du wagon et un banc salvateur bien froid s’offre à la malade à bout de patience. Ouf! On est passé prêt de la crise (vagale?) dans un train bondé. La routine, quoi. Merci Mamy de mettre en peu piment (mais pas encore de pigments) dans ces habitudes de voyage.
Voyage qui se terminera bien ce soir là.
11 janvier
Ou comment dissuader les voleurs de piller notre maison roulante…
Lever, cohérence, petit-déjeuner, toilette. La routine.
Marcel nous demande de le rejoindre à la cafeteria de Super-U où il se rend après sa balade à vélo dans les vergers entre Prades et Marquixanes.
Ce que nous faisons après avoir dit au revoir à Catherine.
Marcel est entouré par un petit groupe de fidèles des lieux et cette pause convivialité semble la bienvenue pour tous les présents.
Quelques vannes entre frères sur des souvenirs d’enfance partagés, mais pas forcément à partager…
Il y a des dames d’un certain âge, à peu près le notre, qui ont des histoires à raconter.
L’une d’elle a bien connu l’Ile de Batz et la cage aux singes de la colonie du Phare, ce qui rend le monde petit. L’autre a eu une enfance dans une famille avec des parents catholiques intégristes, ce qui ne semble pas être drôle tous les jours. Jusqu’au jour où elle a dit STOP! Depuis, ça va beaucoup mieux.
Marcel connait sans doute déjà toutes ces histoires, mais il est sage et fait comme si tout ça était tout neuf, ce qui est d’ailleurs peut-être le cas.
Il reste un mini-croissant qui n’a pas trouvé preneur. C’est bourré de gluten, ces conneries de viennoiseries. Après avoir dit au-revoir à Marcel, et en lui souhaitant bon courage pour accompagner Catherine dans sa maladie, on ramène le croissant dans le camping-car et on part faire quelques courses à Biocoop, qui se trouve de l’autre côté de la route.
Quand on revient, on trouve le fourgon, porte latérale grande ouverte, donnant à voir à tous ceux qui passent un tas de vêtements, en vrac, sur le plancher.
On est estomaqué. Le fourgon a été forcé. On s’approche, inquiet de ce que l’on va découvrir.
Mais incroyable ou pas, rien ne manque. Les deux sacs d’appareils photos, cachés sous les vêtements sont toujours là et il faut se rendre à l’évidence: on a laissé le camping-car grand ouvert. On plutôt, j’ai oublié de fermer le fourgon et suis parti , sans doute en pensant à tout autre chose…
Commentaire réprobateur de Florence: Jo Querellou!
Eh oui, mais qui serait assez stupide pour aller piller un véhicule dont la portière est grande ouverte, et dont une partie de l’habitacle n’est pas ouverte aux regards extérieurs? Toute personne normalement cablée penserait qu’il y a quelqu’un dans le véhicule, non?
Eh bien, non. Il n’y avait personne. Trop fort!
Rassurés par notre invraisemblable chance, on décide d’affronter l’Espagne où nous attendent de nouvelles découvertes.
Et c’est ainsi, qu’après une discussion toute en douceur, sur: où il faut aller, par où, comment (et on passe ici pudiquement sur les bouderies) on arrive à Lloret de Mar. Inutile de préciser que, question itinéraire, c’est Florence qui avait raison. Enfin, presque. Mais ça, ça reste à discuter.
Camping pour deux nuits, à l’heure… espagnole.
10 janvier
Ou comment ne pas déroger aux habitudes…
On plie bagage après avoir fait le constat de tenue de la tente/toilettes.
Direction les plages de Canet-en Roussillon puis de St. Cyprien.
En chemin, on longe l’Étang de Canet qui, comme ceux que nous avons visité précédemment, dispose de ses propres colonies de flamands roses.
Arrivée sur le parking du front de mer à St Cyprien, où se tient un grand marché, avec de nombreux commerçants, depuis les olives, en passant par le couscous/paella, les fruits et légumes et les fromages… Plus loin le coin fringues.
On se décide, Florence pour une paella, et moi pour un couscous.
Pause tranquillité sur la plage. Il fait beau, presque chaud, le vent est tombé.
Déjeuner sans histoire, mais pas sans renvoi!
Il est temps de prendre la route si on veut arriver à l’heure à Prades chez Marcel et Catherine. On a confirmé à Marcel que nous arriverions à 16h, pour éviter au maximum de stresser inutilement Catherine.
En chemin, on refait une visite du magnifique village d’Eus.
16h00. Appel téléphonique de Marcel.
– Vous êtes où?
– Florence: en chemin, on vient de quitter Eus et on devrait être là dans 5 min.
– Alors, venez me rejoindre devant l’entrée du Super-U. On prendra un café avant d’aller à la maison.
On rejoint Marcel.
Direction la mini-cafeteria à l’entrée du magasin. Où Marcel a ses habitudes et où d’autres partagent ces habitudes, aux mêmes heures.
Puis, soirée chez Marcel et Catherine.
Petit problème: mon téléphone est bloqué! L’heure mexicaine semble avoir été fatale. Pour débloquer l’engin, je passe en mode “réparation”. Ça mouline… longtemps. Et quand cela semble terminé, je n’ai plus rien sur le téléphone. Il est nu, propre, comme sorti d’usine. La cata!
Je recommence à enregistrer les principaux numéros de téléphone pour pouvoir garder un minimum de contacts.
A un moment s’affiche un message: “voulez-vous continuer en mode réparation?”. Ah, ce n’était pas terminé. Excédé je répond “NON”, en majuscules, comme Trump sur son réseau.
Magique: toutes les applications et tous les contacts sont restaurés, et en plus, ça fonctionne.
C’est l’heure de dormir!
C’est calme!
Nuit à Prades.
9 janvier
Ou comment, à monter une tente dans le vent, on risque de s’étrangler….
Visite des étangs du Sel Fort et du Doul à Peyriac de Mer.
Balade sur la presqu’ile qui clôt l’étang de Doul, puis sur la route Peyriac-Bages. La route, au ras des lagunes, est copieusement arrosée par les embruns. Le clapot s’écrase sur la digue et les embruns ainsi créés sont emportés au loin par la tramontane. Narbonne mérite bien sa réputation de capitale du vent.
Flamands roses et encore flamands roses. Il y a des colonies de plusieurs dizaines d’individus. Certaines, dans l’Etang de Saint Paul, en comptent sans doute plusieurs centaines.
On arrive à saturation de flamands.
Nuit à Canet-en Roussilon, sur une aire pour camping-cars. Services minimum, et vent infernal.
Pas de toilettes. On décide de monter notre tente/toilettes. Tiendra au vent, ou s’envolera?
Telle est la question.
On déplie, c’est facile. Mais pour monter, c’est une autre paire de manches. Appel au secours.
Florence rapplique, dubitative sur les chances de retrouver la tente le lendemain matin.
On assure, des sardines renforcées aux quatre coins, des tendeurs aux angles tenus par trois sardines en ligne, façon désert.
A ce moment là, un voisin rapplique, goguenard, en nous disant qu’ils vont bien rigoler et qu’il est certain que ça va s’envoler.
Je lui dis que non, que nous sommes habitués au vent, en Bretagne.
– Il embraye, Madame n’a qu’à tenir la tente cette nuit!
– Bonne idée, ça alors, comment n’y avais-je pas pensé?
– Les Bretons, hein, c’est comme les Arabes, c’est pas français, pas vrai?
– Bien sûr. Pas de problème. Breton, Français, Européen, tout ensemble, ça nous va très bien.
– Ah, Madame est vexée. J’ai dit une connerie?
– Florence: non, pas vexée, il en faudrait bien plus.
– Et cette tente? Elle va tenir? Il va bien rigoler mon voisin quand il va voir cette installation.
– Je vous dis que ça tiendra. S’il y a un problème, alors elle se déchirera, mais elle ne peut pas s’envoler.
A demain!
Florence est déjà partie.
Quand on se retrouve, dans le camping-car, on s’étouffe. Ça faisait longtemps que l’on n’avait pas rencontré de bof de ce calibre.
Allez, un petit drapeau français sur le camping-car, ça serait quand même classe, non?
Florence presse d’installer les occultants.
– Ils nous observent depuis leur camping-car, lui et sa femme, depuis que l’on est arrivé!
– Ok, ok, je fais ça. Mais qu’est-ce qu’ils doivent s’emmerder, s’ils n’ont que ça à faire!
Et voila, aussitôt dit, aussitôt fait, notre petite maison est close.
8 janvier
Ou comment des fantômes prennent possession de nos téléphones…
Et voila la suite de l’histoire du téléphone à l’heure mexicaine.
Dans la matinées, recalage manuel du téléphone de Florence. Ça marche, mais la montre ne suit pas. De quoi y perdre son latin.
Je vais demander au gérant du camping qui manie le taille-haie un peu plus loin, s’ils ont des fantômes sur leur site et leur explique nos voyages entre la France et le Mexique.
– Vous n’auriez pas un brouilleur de signal, des anomalies électro-magnétiques pour expliquer ces phénomènes?
– Non, on ne nous a rien signalé, mais c’est vrai que le signal ici est très mauvais. 2G ou 3 G au mieux, c’est pour ça que l’on fonctionne avec un wi-fi, mais pas la fibre, qui n’existe pas, mais l’ADSL.
– Alors, on ne comprend pas.
– Rassurez vous, ils vont bientôt nous supprimer la 1G/2G/3G car ce n’est plus assez sûr… Ils ont oublié que une bonne partie des asceneurs fonctionnent encore en 2G/EG. Ca promet lorsque les pannes vont arriver. Les hadicapés vont rester sur le palier, une fois de plus.
On plie bagage, et on quitte le camping. Fin de l’histoire, sans la moindre lumière à l’horizon.
En dehors de cette étrangeté hertzienne, pas la moindre singularité en ce jour.
Balade sur l’Ile Ste Lucie, au nord de Port-la-Nouvelle.
Parcours sans beaucoup d’intérêt, sans faune visible et sans photo. On fera mieux demain.
Mais au moins on est propre et on sent l’air du large et les cris d’oiseaux. Ah oui, il paraît que l’on ne peut pas sentir les cris. Et bien nous, si, et cela sans même consommer des champignons qui font planer.
Nuit dans le même camping. On en profite pour trier les photos, mettre le blog à jour, nettoyer la salle à manger, le salon et la chambre. Décidément, c’est beaucoup trop grand quand il faut faire le ménage!
7 janvier.
Ou comment prendre des cigognes pour des grues à ailes noires…
Balade au hasard dans les marais autour de Gruissan, autour de l’étang de Bages.
Au détour d’un massif de tamaris, sur la route du Grand Madirac au bord de l’Étang de Bages, on découvre un groupe d’oiseaux, blancs et noirs.
Qu’est-ce que c’est? Pas des flamands, ça c’est sûr. Ça ressemble à des grues à ailes noires.
Mais non, on découvrira le soir, au camping en discutant avec les gérants, que ce sont des cigognes. Elles hibernent de plus en plus dans les étangs.
Changement climatique, on vous dit.
Les flamands ont déjà pris leurs dispositions: moins de migration, moins de casse.
En fin de soirée, un phénomène étrange se produit. L’heure de mon smartphone s’est décalée de 7 heures. Au lieu d’être à l’heure française, je suis passé à l’heure mexicaine! Sans la moindre manipulation du téléphone. Je recale manuellement l’heure. Ça marche. Puis je supprime le mode manuel et hop je retourne au Mexique.
Bon, voila un nouveau mystère signé Google.
On se couche, Florence en France, et moi au Mexique et tout va pour le mieux on s’endort sans téquilla. Réveil à 3 h du matin pour un allègement nocturne au clair de lune. Sur l’écran de mon smartphone, retour à l’heure française. Mais sur l’écran de celui de Florence, nous voilà à l’heure mexicaine. Mais le plus fort, c’est que sa montre Withings connectée est aussi à l’heure mexicaine. Nous voilà de plus en plus perplexes. Mais comme c’est l’heure de la sieste, on se recouche.
Le lendemain matin? Ah ça c’est une autre jour.
Nuit au camping du Cap du Roc près de Port-la-Nouvelle.
6 janvier
Ou comment chuchoter à l’oreille du voisin 15 m…
On a quitté le champ d’oliviers.
Retour chez Hyper Energie.
Achat d’une batterie renforcée, prévue pour “stop and start”.
En échange de la vieille batterie (7 ans), ils assurent la dépose et la pose. Ils ont les clés adaptées et on ne les a pas. Démarrage. Tout est OK. Plus aucun message alarmiste au tableau de bord. On respire.
Et on part, l’esprit léger, jouer les touristes.
Ça tombe bien, il y a une cathédrale gigantesque pour une ville de 50 000 habitants.
Visite studieuse de la Cathédrale de Narbonne et surtout de sa salle au trésor.
Il y a tout un tas de pièces relatives aux offices religieux, calices, ciboires, croix, etc. Mais il y a surtout une tapisserie du Moyen-Age de 35 m2 sur le thème de la création du monde, en 7 tableaux. Très impressionnant.
La personne chargée de la vente des tickets ne semble pas avoir beaucoup de visiteurs. Aussi, il prend tout son temps pour nous expliquer les particularités de la tapisserie et… de la salle dans laquelle nous nous trouvons.
Il s’agit d’une grande salle carrée, d’environ 12 m de côté, avec des murs en briquettes d’un format de 2×15 cm, joints cimentés. De chaque angle part un pilier voute qui rejoint les 3 autres en un ce rcle parfait. A partir de ce cercle, avec les mêmes briquettes, un dôme circulaire couronne la salle.
Particularité: si une personne se met au pied d’un pilier d’angle, une autre face au pilier situé à l’opposé, ils peuvent échanger en chuchotant. Les chuchotements sont parfaitement audibles en face, et nulle part ailleurs dans la salle.
Remarque du guide: on ne sait pas si les concepteurs voulaient obtenir cet effet, mais l’acoustique de la salle est tellement parfaite qu’un tel résultat sans intention paraît relativement improbable.
Mais si c’était délibéré, comment se fait-il qu’il n’y ait rien de mentionné dans les archives. Aucune trace de calcul, rien.
La visite doit se poursuivre au donjon du Palais des Archevêques, à côté de la cathédrale. Mais il y a 171 marches à monter.
On décide de zapper. Pas très compatible avec les fantaisies des articulations de genoux de Florence.
Du coup, ce sera déjeuner, puis visite des lagunes locales.
Traversée des marais de l’étang de Bages-Sigean.
Nuit sur un parking géant, gratuit, venté, à Gruissan.
5 janvier.
Ou comment faire payer un portail et une clôture par des gogos…
Arrivée dans l’après-midi à Narbonne.
Installation dans un petit champ d’oliviers clôturé, chez un particulier.
Zéro service. Une toilette sèche, pas de papier, pas de lumière, instruction délicate de vider le seau s’il est plein. 12 €. N’importe quoi. En liquide bien sûr. Du n’importe quoi liquide, quoi de mieux pour les toilettes. Affligeant.
Nuit dans les oliviers.
Au fait, pourquoi sommes nous venus à cet endroit précis?
Il faut faire un petit retour en arrière, au moment du départ du camping des Saintes-Maries de la Mer.
Tout le monde à bord, il est 10h30, le camping ferme ses portes à midi, donc on a de la marge.
Contact: pas de démarrage, mais excellente surprise, message parfaitement lisibles sur le tableau de bord:
– Panne du système de freinage.
Stupéfaction! Nous faire ça, à nous, pendant notre voyage post-noce d’argent!
Contact coupé. Ouf, ça n’a pas pris feu. contact rallumé, message, non moins alarmant:
– problème ABS et surtout, le pictogramme qui indique que les carottes sont cuites, la fameuse clé à molettes est allumée.
Ceci veut dire, prenez contact avec votre concessionnaire. Mal engagé.
Contact coupé. Contact rallumé, essai démarrage. Rien. Sauf allumage du message: mode route activé.
Ce dernier message voudrait dire que l’on a un sérieux problème freinage, mais que l’on peut rouler en faisant attention aux distances de freinage. Sauf que le démarreur ne fait pas démarrer le moteur.
Au secours!
On appelle Kilian:
– Allo, Kilian? Salut. Tu vas bien?
– Oui, bonjour.
– On t’appelle parce que on a un petit souci avec le fourgon ce matin. Il ne démarre pas et il nous fournit plein de messages….
– Débranche la batterie, attend 20 min , rebranche et essaie de démarrer. Tiens moi au courant.
Je vais pour chercher du matériel à la réception du camping quand un véhicule de maintenance du camping passe devant nous. Je l’appelle.
Après explications, il me laisse une clé de 10. Débranchement de la batterie. On attend.
300 min plus tard pour plus de sécurité, je rebranche. Et je tente le démarrage.
Beuhhh!!! Rien, pas un tour de moteur. On est dans la merde, car c’est dimanche.
– Où est le numéro de la MAIF assistance?
Florence: là, enfin, peut-être.
A ce moment là, l’agent d’entretien du camping passe récupérer sa clé. Et s’enquiert du résultat. Négatif.
Dernière option: donner un coup de booster. Ça tombe bien, il en a un à bord de son véhicule.
Branchement. Contact. Vroummm, ça démarre.
Tout va bien, il faut juste éviter de caler et rouler pour recharger la batterie, si elle charge. On verra.
Message de remerciement à Kilian et on part, direction Narbonne. Car à Narbonne, il y a Narbonne Accessoires, magasin d’accessoires pour camping-car que Florence rêve depuis des années de dévaliser, et aussi Hyper Energie, qui vend des batteries. Mais il n’y a pas Aurélie, tant pis.
On décide de ne pas s’arrêter avant d’être garés devant le magasin Hyper Energie, comme ça si le fourgon ne démarre pas, on pourra attendre l’ouverture du magasin le lendemain matin.
Après tout, c’est cool la vie sur les parkings, non?
Arrivée devant le magasin de batteries. On coupe le contact.
Angoisse du bruit qui tue, le clic du contact avec un moteur silencieux. Contact remis: on tourne la clé. Le moteur démarre. Youpi! Tout va bien.
Toute pression retombée, on regarde où on pourrait passer la nuit à proximité du magasin, dans un endroit un peu plus sympathique. Florence déniche le champ aux oliviers sur Par4night. Et voilà comment on se retrouve dans une mini oliveraie, avec une clôture, un WC chimique, un poulailler, un coq et des poules, un peu plus loin un chien qui gueule, et une dame qui vient encaisser les 12 € en liquide. Et qui repart car elle a autre chose à faire, et pour 12 €, il ne manquerait plus qu’elle soit obligée de faire la conversation.
Pas de photo de la clé, pas de photo du démarreur, du booster, du grillage et des poules. Tant pis, mais l’humeur n’était pas à la photo. Dommage.
4 janvier.
Ste Maries de la Mer.
Ou comment une eau pourrie nourrit les échassiers fainéants…
Repos de récupération pour Florence, après son intoxication à la cuisine italienne (gluten + lait) qui fait flamber les inflammations articulaires. Aie, c’est dur de marcher. Aie, le poignet marche mal.
Mais la douleur n’est qu’une information, n’est-ce pas Emgan ? Surtout pour celui qui n’en souffre pas !
Nouvelle nuit confortable… au même camping.
Mais au fait, les flamands n’aiment pas que l’on vienne faire câlin à leur copine et chassent sans ménagement leurs concurrents. Quant à l’aigrette et au héron de cette galerie, ils n’ont rien trouvé de mieux que de se positionner dans le canal de rejet des égouts des Saintes-Maries de la Mer. C’est encore là que le garde manger est le mieux garni. Après, faut pas regarder le nutriscore et éviter de consommer ces oiseaux!
3 janvier.
Ou comment marcher dans l’eau avec trois pattes…
Matin : ravitaillement au SuperU du Grau du Roi
Migration vers Ste Maries de la Mer en Camargue.
Balade photographique dans les lagunes en bordure de l’Étang de Vaccarès. Des flamands, des flamands, comme disait Brel. Mais ici, ils sont roses. A force de consommer des petits crustacés qui n’ont rien demandé à personne. Et si l’on fait preuve d’un grand sens de l’observation ornithologique,
on peut constater que ces oiseaux stupides, et néanmoins parfaitement adaptés à leur milieu, ont la tête dans l’eau et regardent vers l’arrière, sans masque, sans tuba et sans rétroviseur. Ils ont de surcroit des petits yeux qui indiquent qu’ils ne suivent pas l’actualité politique française, et s’en félicitent. Peut-être devrait-on faire pareil.
(Nuit confortable au camping le paradis)
2 janvier 2025
Ou comment notre confort frise l’indécence…
Étape de liaison entre Imperia et Montpellier. Rien à signaler.
Consultation de Park4night aidant, on décide de se poser sur un parking gratuit au Grau du Roi.
Le camping dispose de toilettes publiques avec nettoyage automatique. Propreté assurée. La seule réserve tient au fait que je n’ai pas vu qu’il y avait un bouton d’ouverture. Et comme un crétin, j’ai cru que les toilettes étaient fermées la nuit. Ce qui était le cas sur d’autres parkings…
Occupation du jour ; courses au super-U.
A côté du camping-car, à l’entrée du parking, deux personnes sont arrêtées. L’une est une femme, dans un fauteuil roulant un peu particulier, avec une extension à l’avant pour avoir les jambes allongées. Elle est emmitouflée dans un manteau et des couvertures, le tout recouvert d’un gilet jaune. Il fait froid. La seconde personne est un homme, cheveux longs, barbu, revêtu lui aussi d’un manteau et d’un gilet jaune. Il a un attelage fixé à la taille qui traine deux remorques.
Au total, l’attelage compte la femme handicapée motrice, l’homme qui pousse le fauteuil et tire les remorques. Pour le moins singulier, à cette heure avancée de la soirée, dans le froid et le vent.
Je demande à la dame si elle n’a pas froid.
– Si, on a froid, mais ça va. On a l’habitude.
– Qu’est-ce que vous faites sur un parking paumé à cette heure dans le vent?
– On s’est fait chasser par les vigiles du parking du Super-U à côté, car on n’est pas décoratif à leurs yeux.
Voyant mon air interrogatif, elle répond par avance à mes questions:
– Je m’appelle Anne. Je suis handicapée motrice. Née préma. Mon cerveau ne commande pas mes jambes. C’est comme ça. J’ai eu la chance de pouvoir grandir, d’aller à l’école, de faire un BTS, d’avoir des emplois en CDD. Mais je n’oublie pas les discriminations subies.
Par exemple, au collège, quand à l’interclasse, il fallait changer d’étage, sans ascenseur, jamais un enseignant ne s’est proposé pour porter mon fauteuil dans les escaliers. Ce sont toujours des élèves qui m’ont aidée.
Beaucoup de solidarité, mais aussi beaucoup de discriminations.
Et je pourrais passer la soirée à multiplier les exemples.
Alors, avec Julien, mon compagnon, on a décidé de dénoncer cet état de fait. On fait un handi-tour, à pied, comme Forest Gump.
– Julien: la nuit dernière on n’a pas trouvé d’hôtel, car la cagnotte qui nous aide dans notre tour ne contenait pas assez d’argent. Alors on a dormi ici, sous la caméra de surveillance de la ville. Et ce matin, les policiers municipaux sont venus nous verbaliser pour camping sauvage… 1 350 € d’amande, que l’on ne peux pas payer.
Mais ils ne vont sans doute pas faire de zèle car on est géolocalisés et suivis par le journal La Provence.
– Et vous allez où comme cela?
– On va en Espagne, puis on ira au Portugal.
– A pied?
Oui, avec tout le matériel. Je pousse le fauteuil et je traine 105 kg. Mais ça va. J’ai bien étudié les règles de circulation et nos droits. On avance.
La discussion aurait pu durer plus longtemps, mais ils doivent partir, à la recherche d’un hôtel pour la nuit. En cas d’échec, ils reviendront dormir sous la caméra.
Ce soir là, on se dit que notre confort, chauffage compris en cas de besoin, est d’une indécence singulière et que décidément, la solidarité en ce monde n’est pas toujours à la hauteur du discours du 31 décembre du président de la république.
Il fait chaud dans le camping-car. Notre tour n’est pas un handi-tour, encore que certaines articulations commencent sérieusement à grincer et que la mémoire commence à s’accorder quelques fantaisies.
Référence à consulter:
https://www.hauteprovenceinfo.com/actualite-45387-un-handi-tour-a-pied-sans-limites
Facebook: julienanne-RoblinGauthier
Remarque: dans leur genre, c’est aussi dingue que le PCT!
(Nuit sur le parking public du Grau du Roi, à proximité du camper-park inaccessible car complet.)
1er janvier 2025.
Ou comment se relever des folies de la veille !
Réveil particulièrement embrumé sur un parking sans charme dans la banlieue de Florence.
La ville est prestigieuse, le parking et ses alentours tout à fait médiocres. Il y transpire une atmosphère glaciale. Rien ici n’évoque les canons de la beauté de la Renaissance qui ont fait la renommée de Florence. Mais, quand même, il y a l’eau courante aux toilettes, et pour couronner le tout, le parking est protégé des dangers extérieurs par une vraie barrière. Les chiens passent en dessous, les humains par les côtés. Tout le monde se regarde en chien de faïence, ou au mieux s’ignore. En cette matinée du 1er janvier 2005, on est loin de l’incroyable richesse de la Galerie des Offices et des palais florentins. Mais tout le monde n’a pas le statut de prince et les manants devraient être heureux de pouvoir se garer en banlieue. Non mais !
Bon, ça, c’est pour l’humeur qui fait suite à cette nuit remarquable. On doit quand même mentionner ici que nous avons déjà eu le privilège de visiter Florence en été, de nous émerveiller de ses richesses. Il y aurait donc beaucoup d’indécence à se plaindre. Qui a dit que l’on se plaignait ?
Il n’y a que les vieux qui râlent parce que leur sommeil délicat est troublé par les pétards de la nuit de la St. Sylvestre. Laissons leur ce triste privilège et réjouissons-nous : nous avons survécu jusqu’à cette nouvelle année.
Après tout, on aurait pu se perdre dans un tunnel d’autoroute. On aurait pu déraper sur les cailloux d’un traitre sentier de randonnée de liaison entre les villages des Cinque Terre. On aurait pu déraper dans la douche du camper-park de Montereggioni. Ou se prendre les pieds dans les feuilles des sentiers de randonnées de la forêt de Saou.
Allelluia ! On est toujours là, un peu plus odorant qu’au début, certes, mais pas encore à faire tomber les oiseaux qui commettraient l’imprudence de passer trop près de nous.
On peut encore faire mieux, et ce sera le cas ce matin, car il n’y a pas de douche sur ce parking.
Alors, pas de regret. Contact. Et c’est parti pour le retour.
Pont, tunnel, pont, tunnel. Au moins autant qu’à l’aller, sauf qu’au retour la mer est à gauche au lieu d’être à droite. Ceci démontre une fois de plus que la mer est disciplinée. Seules les villes semblent ne pas répondre à cette logique. Mais à bien regarder les cartes, il se pourrait que ce ne soit pas les mêmes villes.
Tunnel, pont, combien au total ? Pour obtenir la bonne réponse, consulter la rubrique du ? décembre qui précède. Quelqu’un a retenu.
La fatigue s’installant, on sort à Imperia, ou il y a un camping d’ouvert, juste sous le pont de l’autoroute. Le coin est dénué de charme, mais les douches sont chaudes et on a eu la dernière place du camping.
(Nuit dans un camping à Imperia)
31 décembre
Ou comment plomber l’ambiance en un tour de bus…
Réveil avec le soleil à lhôtel rei di Capitani à Montalcino.
Ouverture des volets.
La lumière et le choc !
En contrebas de l’hôtel situé sur le flanc est de la colline qui porte le village de Montalcino, s’étend un paysage fabuleux, tout en nuances de bleu-gris, avec des bancs de brume qui s’effilochent de ci de là, comme autant de parures délicates sur les alignements ou les massifs de cyprès florentins.
On mitraille. On refait sans doute plusieurs fois la même photo, pas d’importance le paysage est vivant sous l’effet combiné du vent et du soleil.
Après un copieux petit-déjeuner, on plie bagage à regret. Difficile de quitter cet endroit magique, d’une beauté bien au-delà de nos attentes.
On reprend notre voyage. Retour à San Quirico d’Orcia, visite de la chapelle photographiée par tous les touristes à quelques kilomètres de là. Je tente un point de vue différent, en passant par un champ en pente, où je réussis seulement à déraper dans la terre détrempée et à colmater les semelles de mes chaussures avec des sabots d’argile grasse. Nettoyage obligatoire, avec un bâton, du béton collé dans tous les trous de semelles.
Visite de Pienza. Puis de Montepulciano. Toutes ces petites villes de Toscane ont des centres historiques du même type. Rues étroites, en forte pente, avec des boutiques de souvenirs, des galeries d’art, des magasins de vins, et dans certains cas des oenothèques/restaurants.
Dans l’après-midi, on décide de rentrer sur Florence.
Le suel endroit pour se poser est un parking sans charme, complètement coincé et plein à craquer de camping-cars et de voitures. On trouve une place, la dernière. C’est protégé par une barrière, mais il n’y a aucun service. Pas d’eau, deux WC publics pour hommes et autant pour les femmes.
On prend le bus n°11 à un arrêt, juste à la sortie du parking. On ne sait pas à quel arrêt il faudra descendre. Le bus roule vite, dans des rues étroites, et à un moment longe l’Arno. Passe un pont, arrive dans un quartier commerçant de luxe, Dior, Vuiton, Gucci et autres enseignes. On n’ose pas descendre car on n’a pas aperçu de bâtiment qui évoque le quartier de la cathédrale.
Le bus roule, passe la gare. Roule encore et encore, arrive dans des quartiers crades, puis résidentiels.
Il est clair que l’on a raté l’arrêt du centre donnant accès au quartier de la cathédrale…
Florence me demande :
– pourquoi tu n’as pas demandé au chauffeur où il fallait descendre ?
Je suis de mauvaise humeur après ce raté, et je lui demande :
– et toi, pourquoi tu n’as pas demandé ? Je ne parle pas italien plus que toi.
Ambiance glaciale, en parfaite harmonie avec les températures extérieures.
Je demande au chauffeur si le bus continue et retourne vers le centre-ville. C’est le cas. Cela fait presque une heure que l’on roule. Voilà au moins des tickets de bus rentabilisés. Le bus refait chemin vers le centre. On reconnait la gare centrale. Et l’on décide de de descendre. Arrêt : gare centrale. Le tableau des horaires de la ligne 11, qui mène au parking de départ, à savoir Gelsomino, est affiché. On fait une copie photo. Il faudra reprendre le bus de 22h15.
Diner dans un restaurant près de la cathédrale. Tout est pour le mieux. C’est bon, un peu cher, mais rien à dire pour une soirée de 31 décembre.
On repart à notre arrêt de bus. Et on attend. Pas de bus ! Pas de bus, rien. D’autres personnes s’impatientent, mais rien n’y fait. Les bus sont aux abonnés absents.
23 h et toujours rien. Il fait froid. Je décide de passer par Uber. Six minutes plus tard, le chauffeur est là. Et c’est parti. Dix minutes plus tard, il nous pose à l’endroit indiqué pour la course. On ne reconnait rien.
Florence proteste :
– ce n’est pas ici, on ne descend pas.
Je regarde et aperçoit le poteau de l’arrêt de bus. Il porte le bon nom, ou presque (Gelsomino due strada).
Le chauffeur s’impatiente, ouvre la portière et nous met dehors. On cherche la bonne direction et je me trompe. Florence reconnait un magasin et indique que c’est dans la direction opposée. Consultation de Waze. Effectivement, c’est à 600 m dans la direction opposée, dans le froid, dans le vent, dans la bonne humeur.
On arrive enfin. Encore une demi-heure et on change de jour, d’année. Le diner était bien, le reste, digne de touristes complètement abrutis, juste un peu paumés dans une ville visitée bien des années auparavant et devenue totalement étrangère.
Encore un effort ! les minutes passent. Et c’est parti pour un concert de pétards, de feux d’artifices, de cris. La nuit sera à nouveau difficile pour Florence.
En ce qui me concerne. J’ai entendu les premiers pétards, puis plus rien.
On est en 2025 ! Et on n’y est pour rien.
(Nuit à Florence dans un parking pourri et saturé et bruyant…)
30 Décembre
Ou comment la chasse aux sangliers s’invite au petit déjeuner…
Le matin, lever aux aurores, ce qui en hiver ne représente pas un gros effort. Les premières lueurs du jour commencent à apparaître vers 7h30, mais le soleil ne sera pas levé avant 8h, et plus tard encore à l’endroit où nous sommes garés. Je décide de suivre la piste de terre pour rejoindre le point singulier du paysage local, à savoir un bel arbre isolé au sommet d’une colline. Matériel photo sur le dos, c’est très prometteur. Une légère brume tapisse le fond des vallées, donnant d’emblée le type de paysage qui fait la renommée de la Toscane. Les plans successifs des collines s’estompent dans le lointain.
Une bonne demi-heure de marche après le départ du camping-car je suis en train de crapahuter dans un champ récemment labouré, mais pas encore hersé. Les chaussures sont à la peine et les chevilles aussi. Mais la récompense arrive. L’arbre sur sa butte est un magnifique chêne vert, formé en boule, sans aucune contrainte de voisinage.
Dans toutes les directions le regard porte très loin, et vers le sud les montagnes de faible altitude qui barrent le paysage sont enveloppées dans une brume gris-bleutée. En contre bas de la colline, de petits étangs, sans doute utilisés comme réserve d’eau pour les périodes de sécheresse, donnent une touche de peinture claire dans les champs labourés.
Beaucoup de photos prises ce matin-là, tant l’ambiance est extraordinaire et la solitude totale. Pas un bruit, pas un touriste. Ce point de vue n’est pas mentionné dans les guides, donc pas de car, pas de voiture, rien. Le silence.
Au loin, sur la piste, on aperçoit le camping-car. Je sais que j’en ai pour au moins 25 min à descendre, et Florence doit commencer à trouver le temps long. Je l’appelle au téléphone. Elle est réveillée depuis mon départ et attend pour le petit-déjeuner. Je lui suggère de sortir avec son matériel photo, équipé du télé, et de photographier en direction du chêne vert sur le sommet de la colline, pour tenter de saisir le chêne et le touriste.
Le soleil est en train de ronger l’ombre de la colline sur la piste et dans quelques minutes le camping-car sera au soleil.
Sur les photos faites par Florence, on me voit sous le chêne vert, puis l’éclat du soleil envahit l’image et le photographe est désintégré.
Descente rapide vers le camping-car pour un petit-déjeuner bien mérité. Il y a des gros 4×4 garés partout autour, et des chasseurs, fusils cassés, prêts à partir pour une battue.
Je leur demande quelle chasse est prévue ce matin-là. A ma grande surprise, sans la moindre hostilité et en rigolant, ils m’expliquent en italien qu’ils participent à une battue aux sangliers. Et qu’ils ont le droit d’en abattre huit. Ils sont bien plus accueillants que leur tenue ne le laisse supposer. Pour mémoire, dans le chemin derrière l’Arc’Hantel près de Kernéen, je m’étais retrouvé confronté à un chasseur à front bas qui m’avait engueulé parce que je ne tenais pas mon chien (Boule) en laisse, alors qu’il avait autour de lui une meute de chiens courant aboyant en chœur. Rien de tel ici.
Puis, petit-déjeuner, suivi d’une balade dans les paysages magiques de la Toscane. Buonconvento, San Giovanni d’Asso, San Quirico d’Orcia, Montalcino.
Fermes sur les sommets de collines, alignements de cyprès, cyprès isolés, ondulations sans fin des collines dessinant des plans de cartes postales. Tout y est. La route SR14(6) dans toute sa splendeur.
Un bémol. Cette nuit en pleine campagne a été fatale à Florence. Elle n’a rien dormi. Et la présence des chasseurs le matin a rajouté à un supposée hostilité des lieux. En fait, c’est la première nuit vraiment calme depuis le départ. Mais sans les bruits familiers, le calme n’est pas rassurant !
Du coup, comme on n’a trouvé aucun camping ou parking digne de ce nom dans les environs, pour assurer un minimum de récupération, on décide de passer la nuit à l’hôtel Rei di Capitani à Montalcino. De la fenêtre de notre chambre, la vue sur la plaine et ses ondulations est extraordinaire. Ca promet pour le réveil, pour peu que la météo soit notre alliée.
29 décembre
Ou comment camper avec une ambiance digne de Shining ?
On décide de quitter Sienne pour découvrir les paysages mythiques de la Toscane. Les collines vallonnées, les cyprès en alignements ou isolés à proximité des monuments.
Le matin, c’est toujours un peu laborieux, alors on fait peu de chemin avant midi. Arrêt à Buonconvento, charmante petite ville aux fortifications toujours debout et aux rues étroites et colorées. Florence adore. C’est bien pour les touristes, ça doit être nettement moins drôle d’y habiter, car la lumière est comptée, même quand il y fait soleil.
On prend une route plein est qui grimpe fort, 15-17%. Et on se retrouve sur une colline et une piste en bon état. On profite d’un replat sur le bord de la piste pour s’installer et déjeuner. La vue est à couper le souffle. Il faudra revenir.
On repart et les paysages se succèdent, comme autant de cartes postales. On rejoint une vraie route, la SR14 qui au passage, est l’une des plus réputée de Toscane pour les vues extraordinaires que l’on peut admirer. Objectif : San Quirico d’Orcia.
Petite ville de caractère, avec des ruelles typiques, ses galeries d’art, ses restaurants, ses boutiques pour touristes que l’on retrouvera dans toutes les villes visitées.
On passe devant un restaurant qui propose un menu à 100 € pour le réveillon du nouvel an. Tentant.
On hésite, mais Florence fait remarquer que je ne suis pas certain de pouvoir me tenir sage jusqu’à minuit compte-tenu de mon mal de dos relativement aigu ce jour-là… Excellente remarque, inutile d’insister. Ce sera pour une autre fois.
Il ne reste plus qu’à trouver un endroit pour passer la nuit. Il y a bien un parking avec stationnement autorisé pour les camping-cars en contrebas de la ville, coincé entre un terrain de sport et les poubelles. Services nuls et toilettes à fuir. Décidément, la période n’est pas propice au camping.
On repart respirer l’air pur. Retour au site de Pieve i Salti (poivre et sel) où le spectacle offert par la lumière du soleil couchant est magique, avec les plans successifs des collines qui s’estompent dans le lointain, et une brume ténue qui tapisse les fonds de vallées. Extraordinaire à l’œil, mais quasi-impossible à rendre en photo.
On s’installe pour la nuit, avec nos toilettes portables. La température tombe vite dès le coucher du soleil (16h46 br….). Le ciel prend des couleurs oranges, puis roses avec un bleu profond au-dessus de nos têtes.
Tout ça c’est bien beau, mais le problème est ailleurs. Camping sauvage = trouille incontrôlable pour Florence qui se force à me faire plaisir. En effet, l’objectif du lendemain est d’être levé aux aurores et de profiter du lever du soleil sur les paysages toscans.
Ça ne va pas rater… Florence ne fermera pas l’œil de la nuit, tandis que la brute épaisse à côté profite du premier vrai silence depuis le départ de chez Jean-Yves pour… dormir.
On baigne dans un silence de plomb, et donc atrocement menaçant. D’ailleurs, que cache ce silence ? Quelles sont les bêtes sauvages qui rôdent autour de nous ? Une voiture passe et s’éloigne. Mais qui garantit qu’elle ne reviendra pas, avec des occupants bardés de mauvaises intentions ?
Un bruit dans le lointain. Et le vent ? Et cette absence d’éclairage public, faut-il s’en inquiéter ?
Je dors. Les interrogations sans réponses ne sont pas bonnes pour la santé.
Mais, n’empêche, Florence a peut-être raison. On est peut-être très imprudent…
On achètera le journal local demain matin pour savoir ce qui nous est arrivé. Ça, c’est une perspective fantastique, qui donne un piment inattendu à notre voyage. Et permet de dormir puisque la suite sera connue demain.
(Nuit à Pieve i Salti dans campagne toscane, -4°C, sur un lieu de rassemblement de battue au sanglier)
28 décembre
Ou comment Aurélie a dit « Dalida Piaf » encore…
Le matin, on se lève difficilement, la nuit a été mauvaise. Douleurs de vieux qui empêche sa voisine de dormir. Mal partout et quand il faut se lever en pleine nuit par -4°C, on se prend à rêver de feu de cheminée. Un petit-déjeuner de plus et tout rentre presque dans l’ordre, on va pouvoir commencer la visite de la citadelle de Monteriggioni qui est à quelques centaines de mètres du parking.
Ca grimpe un peu, mais on se pousse et on y arrive sans appeler le SAMU. Il s’agit d’une forteresse qui comportait 14 tours dont subsistent aujourd’hui 7 tours restaurées. Le lieu servait à la défense de Sienne contre les armées de sa puissante voisine, Florence.
C’est beau, touristique à souhait, et envahi de touristes, dont un groupe de Californiens, 16 personnes de la même famille qui adore l’Italie. Question piège posée par le partriarche :
– laquelle des cuisines est la meilleure ? La française ou l’italienne ?
– les deux sont bonnes, et différentes. Mais bien sûr, l’italienne est exceptionnelle. Et celles de la Californie ?
– En Californie du nord, ce n’est pas si mal et il y a aussi de très bons restaurants mexicains.
Ciao et bon voyage.
Car ce n’est pas tout. C’est le jour de la lessive et de la douche, car on n’a plus rien à se mettre et ça commence à craindre.
Alors, au menu, lavage dans une lavanderia (une boutique repérée dans les quartiers extérieurs de la vielle ville de Sienne).
On rentre. Comme partout, des machines, des machines à sous. Distributeur de pièces de 1 € pour lancer une machine, sauf qu’une dame qui fait aussi sa lessive indique à Florence, que non, il ne faut pas mettre 20 € dans la machine, ça ne marche pas. Il faut aller au bureau de tabac à côté changer de la monnaie, 2×10 € pour 20. Aussitôt dit aussitôt fait, sauf que l’on ne se refait pas, il faut acheter quelque chose pour mériter ce service (d’un commun accord ! C’est à souligner). On achète deux œufs au chocolat type Ferrero et on revient avec nos pièces et billets dans la laverie.
La dame qui fait sa lessive prend tout en charge : change d’un billet de 5 €, insertion des pièces dans la machine, ouverture du sac de linge sale, introduction du linge, en prenant soin de dérouler les chaussettes, de retourner les pantalons, de les secouer pour faire tomber le contenu des poches, vérifier les vêtements avant de les enfourner, les slips, les T-shirts, les sout…
Le tout dans la bonne humeur et une énergie peu commune.
– Si, si, ça monsieur, ça madame… Je pas parler français…
– No parlare italianao…
– Je… m’appelle… Aurélie.
-Enchanté (on est tellement surpris que l’on reste con et que l’on oublie de se présenter)
– Charles Aznavour, Piaf, chanter, magnifico.
Et une chaussette de plus, et un slip, et voilà que ça saute !
– Dalida! Tutti dans la machina. Hop, elle appuie sur « warm » et c‘est parti.
Elle nous montre l’heure et nous indique que ça prendra trente minutes. Puis que le tout est à mettre dans le tambour d’un sèche-linge, à côté. Mettre 2 (fois) 1 €, pas une pièce de 2 €…
On se confond en remerciements.
Puis on va faire les courses au magasin « Coop » d’à côté. Trente minutes plus tard, Florence rentre dans la laverie, la dame finit de plier son linge sec et part.
– Arrivederci…
Et Florence, qui n’a pas 2 pièces de 1 €, met une pièce de 2 € dans le séchoir… qui démarre .
Aurélie a pas tout dit. Et Florence sourit. Aussi.
Ah oui, Montereggioni, c’est choli, mais pas assez pour une nouvelle galerie.
26-27 décembre
Ou comment les boules Quies peuvent créer la zizanie…
Départ de Lucca par l’autoroute jusqu’à Florence que nous avons contournée pour emprunter une vieille 4 voies jusqu’à Sienne. Arrivée vers midi le 26. L’aire de camping-car est en fait un énorme parking à bus au milieu d’un rond-point patatoïde où le tarif non négociable est de 20 € les 24 heures. Service minable, avec toilettes et douches payantes, propres mais tourniquet repoussoir à l’entrée. Toilettes ouvertes de 8h à 20h. Après, démerdez vous. Heureusement nous avons nos toilettes portatives de secours, mais la mesquinerie peut se loger dans les endroits les plus improbables. Sans parler de la nuit, ultra bruyante, avec des réveils intempestifs vibratoires aux passages de camions et de véhicules bringuebalants. On a même entendu des coups de clacksons.
Au petit matin, de mauvaise humeur, courbatu à force d’avoir recherché une solution à un problème qui n’en avait pas, on émerge doucement : 9h !
Aie, c’est pas tôt pour débuter une journée quand le soleil est planqué à 17h.
Alors je risque :
– On aurait mieux fait de prendre des boules Quies, ça nous aurait éviter cette nuit pourrie.
– Florence : on en a.
– Quoi, où ça ?
– Dans un des placards.
– Et tu n’as rien dit ?
– Tu n’as rien demandé.
– Enfin, c’est invraisemblable d’avoir à supporter un bordel pareil avec des boules Quies dans un placard !
– Fallait demander !
– OK, j’avais qu’à demander et le miracle se serait accompli.
Inch’ Allah. Suffit de demander un miracle et il s’accomplit. Mais pas de demande, pas de miracle.
Bon et si on passait à autre chose, un truc moins conflictuel, comme par exemple, à tout hasard, l’objet de la visite : la ville de Sienne.
En fait, c’est beau, c’est incroyablement bien conservé et toujours très habité. Les lieux emblématiques sont à l’image de cet héritage architectural du Moyen-Age et de la Renaissance italienne : superbe. Cathédrale, Duomo, Piazza di Campo, Musée de la cathédrale, Palais Public, ça n’en finit pas. Au bout de quelques salles dans le musée avec des dizaines et des dizaines de peintures du XIV et XVème siècles représentant des scènes pieuses, on a une indigestion sacrée qui fait que chaque nouvelle peinture ressemble un peu plus à la précédente. C’est grave docteur ? Signe de vieillissement ? Ou d’allergie naissante à la “pieuserie” catholique romaine qui enrobe la quasi totalité de l’art, des peintures à la sculpture, de l’architecture à la musique.
A un moment, par hasard, dans une salle, un bouchon semble s’être formé du côté droit de l’entrée.
Il y a bien des écriteaux avec une flèche vers la droite et une vers la gauche, mais comme on ne comprend pas l’italien, j’emprunte le côté gauche. Au bout de la pièce, je me fais arrêter par une charmante dame qui me dit que la queue, c’est de l’autre côté. On repart de l’autre côté, à la fin de la queue. Et à un moment, un flot s’évacue. Puis stoppe. On progresse, mais vers quoi ?
Au passage, un charmant monsieur laisse sa place pour que Florence puisse s’assoir en attendant .
Quand ça progresse à nouveau, on avance dans le paquet et le coupe file tombe derrière nous, juste devant la personne qui avait cédé sa place et qui était avant nous dans la queue. La honte !
Que faire ? Revenir en arrière et céder la place ? Impensable, ça serait se faire remarquer et immanquablement provoquer la confusion. Donc on suit. Plus exactement on monte un escalier en colimaçon, une bonne centaine de marche et on débouche au niveau du haut des murs de la cathédrale sur un mur de guet du bâtiment qui abrite le musée.
On voit toute le ville et au soleil couchant, les couleurs sont belles.
Mais ce n’est pas fini. On se traîne, mais nous invite à monter encore 71 marches jusqu’au sommet de la tour. Et de là-haut, on est plus haut, donc on voit plus loin. Enfin, ceux qui ont des bons yeux voient plus loin. Florence est aux anges. La ville et les toits de tuiles rouge brique à ses pieds. Car, ça ce n’est pas trop loin. Serait-ce une sorte de paradis pour peintre ?
Quant aux rues, elles tournent en rond autour de la piazza di Campo. A y perdre le nord et le sud.
Question restaurants, en dépit de la saison, beaucoup sont ouverts. Et on y mange bien, pour pas trop cher malgré la vocation touristique de la ville.
Et si l’on veut voir quelques photos touristiques, en attendant les nôtres, c’est ici:
25 décembre.
Ou comment un son divin s’altère par les pieds…
Nous voici à Lucques, autrement dit Lucca.
Après une visite brève en fin d’après-midi la veille, nous voici de retour pour une balade tranquille sur les remparts. Il fait beau, mais froid. Bien couverts, ça va, mais il ne faut pas stationner. Alors, on marche. La ville médiévale de Lucca est complètement enfermée dans des remparts très bien conservés. A l’intérieur, plan romain avec rues à angles droits. Nous avons repéré sur les annonces de la cathédrale qu’un concert d’orgue dédié aux vêpres de Noël serait donné à 17h30.
On se pointe à 17h, c’est fermé. On attend et à 17h15 ça ouvre.
Pour les touristes, l’intérieur de la cathédrale ne peut être visité que dans le cadre de visites payantes à certaines heures. On nous précise le fait et comme nous ne sommes pas des touristes, mais des pèlerins soucieux de respirer l’atmosphère et les vibrations divines des lieux, nous rentrons.
On s’installe sur des bancs de pénitents entre les pupitres d’orgues des côtés sud et nord de la cathédrale, histoire de profiter de la stéréo.
Et c’est parti pour un son d’une richesse étonnante. Les pupitres de flutes sont clairs et font contraste avec les basses. Et l’air de la cathédrale s’emplit des vibrations.
On pourrait se laisser bercer par la beauté des sons, mais le marbre du sol, insidieusement fait remonter le froid, par les pieds, les jambes.
Alors, une dissonance certaine s’installe entre une tête baignée de sons divins et des pieds givrés ne demandant qu’à rentrer sous la couette.
On rentrera au pas de course, ayant abandonné les derniers sons d’un Amazing Grace aux portes de la cathédrale, histoire de réchauffer la machine.
Il gèle, le ciel est clair. Pas envie de regarder les étoiles.
23 décembre 2024
Ou comment les villages peuvent être fermés quand on s’y attend le moins…
C’est la dernière journée consacrée à la découverte des villages des Cinque Terre (https://www.cinqueterre.eu.com/fr/).
Il nous reste à visiter Vernazza et Monterosso. Et comme on a acheté des tickets de bus il y a plusieurs jours on a décidé d’y aller en bus.
Départ du « camper park ». Pas de problème à la barrière de sortie, le solde de tout compte a été fait à la caisse. Je compte sortir et aussitôt reprendre une carte « fraiche » à la barrière d’entrée comme si on venait se réinstaller pour 24 h.
Rien à faire, la borne d’entrée nous refuse l’accès avec en prime un message dans une langue étrangère à laquelle on ne comprend rien.
Il ne nous reste plus qu’à aller nous poser ailleurs. On avait repéré un parking pourri mais gratuit dans la zone industrielle à côté d’un chantier naval. On gare le camping-car à côté d’autres voitures et d’un autre camping-car ruiné. Bref, pas très engageant. On espère retrouver notre maison ce soir.
Bus, train, tout est simple et pratique. Les trains locaux sont à l’heure, propres, avec des emplacements pour vélo et même vélo électrique avec borne de recharge. On aimerait que les trains français en prennent de la graine. Les toilettes sont également propres. Bref, tout va bien.
On visite d’abord Monterosso.
C’est le village le plus grand, le plus plat. Il y a même une plage qui lui donne un air de station balnéaire. C’est charmant, mais on trouve que ça manque de charme à côté des autres villages.
On prend vers l’extrémité nord-ouest de la plage, celle où se trouve la grande statue de Neptune. On cherche le vieux village ? Rien que du moderne. Pas l’ombre d’un village médiéval. On prend une rue qui s’éloigne de la plage vers les immeubles d’habitation. Florence trouve des forces pour monter quelques escaliers à la recherche de la vieille ville. Nada.
En fait, cette recherche stérile commence à me gonfler. Alors je propose d’écourter la plaisanterie et de passer au village suivant.
Florence proteste.
– On n’a pas visité la partie intéressante, d’ailleurs je n’ai pas vu l’église du XIVème siècle avec ses bandes blanches et noires.
– Ecoute, on n’a rien trouvé et ils ont dû fermer le village. Tant pis, on poursuit sur Vernazza, le village suivant.
Protestations de Florence. Désapprobation évidente.
On prend le train pour l’étape suivante conne si de rien n’était…
Visite de Vernazza, superbe village accroché aux montagnes avec un petit port typique des 5 terres. Tout est bien, et le village est conforme aux guides de voyage ! Il ne manquerait plus que ce soit l’inverse ! Déjà qu’ils ont changé la réalité à Monterosso, halte à la contagion.
Déjeuner tout à fait sympathique avec daurade aux pommes de terre et aux olives. Pendant les temps morts, consultation des sites dédiés à Monterosso où figure bien la fameuse église. Mais où est le village ?
Google Earth vient à notre secours. L’image satellite est formelle. A l’extrémité sud-est de la station de train, de l’autre côté d’une colline, il y a un autre village : le Monterosso médiéval. On est sorti du mauvais côté. Et j’ai oublié de réfléchir, ou plutôt de préparer la visite.
Alors, après le café et la visite de Vernazza, on remet le cap sur Monterosso. Cinq minutes de train plus tard, on sort du bon côté, on emprunte le tunnel qui fait la jonction entre les deux parties du village et nous voici dans le village médiéval. Il y a bien une église, plusieurs mêmes, dont l’une avec des crèches de Noël superbes.
Malheureusement la lumière n’est pas très bonne et le soleil éclaire l’autre partie du village, la moderne. Un peu stupide, il aurait suffi de venir en début d’après-midi pour avoir des couleurs magnifiques.
Mais bon, vous l’aurez compris, quand les indigènes ferment leurs villages, il faut faire avec.
Vous aurez aussi compris qu’aujourd’hui, très inspiré, j’ai inventé les villages fermés/ouverts, un nouveau concept pour maintenir le suspense au cours de visites où tout est balisé et archi rabâché à force de guides. Voici donc une nouvelle façon de ne pas s’ennuyer.
A la nuit tombante, ici c’est 17 h en ce moment de l’année, on reprend le train pour La Spezia. Puis le bus en sens inverse. On rejoint le parking pourri. Ouf, le camping-car est toujours là. Et son contenu aussi.
On rejoint le camper park à 2 minutes de là. Et à la borne, ça s’ouvre. Notre bannissement est terminé. Alléluia !
22 décembre 2024
Ou comment des dattes tunisiennes se retrouvent au petit déjeuner…
Nous voici dimanche. Premier dimanche en Italie. Nous sommes toujours sur le « Camper Park », là où nous avions bataillé avec la caisse à l’entrée et toutes ses questions à la c…
Hier soir à notre arrivée, aucun problème. Comme quoi la capacité d’apprentissage n’est pas complètement au plancher.
Météo : temps couvert le matin, pluie l’après-midi… Visite de fainéant en zone industrielle du port puis en ville, sous les arcades où se tient le marché de Noël. Rien de spécial à signaler. Sauf des lumières qui grimpent aux trocs des palmiers sur la promenade de bord de mer. C’est aussi la première fois que l’on voit des sapins-palmiers de Noël. Ça donne des dattes ?
Réponse : non, mais à côté il y a une épicerie ouverte et ils vendent parmi une foule de fruits des dattes Deglett Nour. Les préférées de Florence. Et voilà comment il y aura des dattes au petit-déjeuner à partir de demain.
21 décembre. Samedi.
Ou comment perdre Florence en chemin ?
Beau temps clair, froid.
Après montées, descentes, virages à gauche, à droite avec le NV300, nous voici arrivé au village de Corniglia. Mais pour y arriver, il y a une descente vertigineuse. Heureusement, il n’y a presque personne et le voyage se passe sans avoir à manœuvrer pour se croiser. En bas, comme le jour précédent, aucun problème de parking. Et même pas besoin de disque de stationnement. Incroyable car la relative absence de touristes n’est pas mentionnée dans les guides. Il est plutôt indiqué que même pendant les mois d’hiver il y a du monde. Rien à côté de la cohue de juillet-août, mais là c’est presque… rien du tout.
On descend dans le bas du village. Pentes raides et escaliers de rigueur. Pour atteindre le « port », ce sont des escaliers en épingles à cheveux car sinon ça ne passe pas. Et au niveau de la mer, c’est un mouchoir de poche avec une rampe sur laquelle sont empilées les barques. La mer est toujours trop forte pour sortir. Mais manifestement, la pêche ici ne doit pas beaucoup contribuer à vider les stocks de poissons de la Méditerranée.
Pendant que je cherche comment ils font pour manœuvrer leurs barques, Florence restée sur la dernière terrasse avant l’escalier final recherche un petit coin sympa pour un petit besoin pressant.
Dernière maison, volets clos, mouchoir de poche de terrasse avec quelques oliviers. C’est bon. Au fond, le moins visible possible de préférence. OK, mais c’est bourré de cactus. Attention à ne pas mimer les coussins de grand-mères. Ça passe entre les épines. Quel talent !
Ce n’est pas le tout, il faut remonter et c’est raide, c’est dur. Au niveau de l’église on se concerte pour savoir si on prend le chemin de randonnée de Corniglia à Manarola avant de déjeuner ou après. Si on mange d’abord et que l’on prend le train pour Manorola pour revenir à pied par le sentier de randonnée, on risque de ne plus pouvoir bouger. C’est décidé, on part tout de suite.
Le chemin monte entre les maisons, puis se perd dans les vignes en terrasses, puis dans les buissons de pentes raides. Plus on grimpe, plus le chemin devient raide et présente des cailloux dans tous les sens qui rendent la progression difficile. Au-dessus de nous on regarde où il peut bien passer ce chemin pour touristes. Comme il n’y a presque personne, on ne peut pas demander si ça grimpe longtemps comme ça. Alors on poursuit en crachant nos poumons. A un moment je m’arrête, pour une raison sans importance (lichens sur les pierres ?) et Florence continue toute seule. La pause dure quelques minutes et quand je repars, Florence a disparu dans les virages du dessus.
Je grimpe, et encore et encore, sur un chemin difficile, et toujours pas de Florence à l’horizon.
Ce matin, elle a l’air de mieux grimper que d’habitude et je m’étonne de ne pas la rattraper. Alors j’accélère et je souffle comme un vieux crevard, mais toujours personne devant. Elle va vraiment fort aujourd’hui. J’essaie de téléphoner… Pas de réseau et batterie à 3%. Alors je décide de continuer à grimper jusqu’à ce que cela arrête de grimper et que l’on arrive sur du plat. Ce sera après une demi-heure et près de 400 m de dénivelé.
Il a dû se passer quelque chose. Impossible de rater quelqu’un sur ce chemin, il n’y a pas d’alternative. Où est-elle passée ? Je crie, pas de réponse. Arrivé sur la section où le chemin suit une terrasse de culture de vigne surplombant la mer, je croise des randonneurs et demande s’ils ont aperçu une dame avec une veste orange. Rien, pas de dame en orange. Je commence à prendre peur, où diable est-elle passée ? Est-elle tombée du chemin dans les broussailles denses en contrebas du chemin dans la section raide et faite de pierres branlantes ? Faut espérer que non, car à côté, les cactus ça aurait été une plaisanterie.
Demi-tour et marche rapide pour essayer d’y voir clair. Après environ 15 minutes sur le chemin en sens inverse, j’aperçois Florence qui arrive en trainant les pattes, manifestement épuisée.
– Où étais-tu ?
– Sur le chemin.
– Comment est-ce possible, on ne peut pas se rater. Et je ne t’ai pas vue en montant.
– Si, à un moment dans une épingle à cheveu, un chemin continue tout droit. Et mène à un cul-de-sac. Quand j’ai fait demi-tour et suis revenue sur le chemin, j’ai compris que je n’avais pas pris le bon chemin. J’avais suivi une rampe qui continue tout droit. Quand je suis revenue sur le chemin, personne. Je t’ai appelé, mais tu n’as rien entendu (note : vraiment sourd le mari !). J’ai essayé de te rattraper, mais tu allais trop vite et je ne pouvais pas suivre. Je me suis dit que, ne me voyant pas et sachant que je ne peux pas monter rapidement dans des pentes aussi soutenues, surtout sur un chemin qui n’en finit pas, tu te dirais que c’était impossible que je sois déjà allée aussi haut. Mais rien. Tu as continué à grimper…
– J’ai vraiment eu peur, je n’ai pas pensé que tu pouvais être derrière moi puisque qu’il n’y a qu’un chemin. Et je n’ai rien entendu. Impossible d’appeler. Désolé, c’est vrai que j’aurais dû raisonner différemment. Ouf !
Et nous voila repartis, ensemble cette fois, sur le chemin de randonnée qui sur cette section se balade sur des terrasses relativement plates dans les vignes. Jusqu’au village de Volastra où une petite église romane avec une mini coupole borde une route goudronnée. On a grimpé tout ce chemin pour arriver à un endroit où on pouvait aller en voiture ! N’importe quoi. On voulait une ballade facile, on prend un chemin difficile. Et ce n’est pas fini, car il faut descendre.
Attention les cuisses, attention les genoux. Le chemin est magnifique. Il est pavé et descend, d’abord en pente douce entre des jardins de citronniers, puis d’oliviers. Entre les pavés, les olives non ramassées s’accumulent.
Mais bientôt la pente s’accentue et le chemin pavé devient un exercice pour muscles et tendons.
Plus on descend, plus c’est pire. Mais au moins on descend vite !
On arrive enfin en vue du village de Manarola. Le chemin prend une terrasse et débouche sur une descente sur une arête surplombant la mer. Mamamya ! Et dans des marches irrégulières, où on se tient par la main, on descend comme on peut. Au moins s’il y en a un des deux qui tombe, vous serez débarrassés des deux pour le même prix ! Une bonne affaire.
Au terme de 3 heures on arrive enfin, épuisés, affamés et éreintés . Jamais on n’aurait pu faire le chemin dans l’autre sens. Beaucoup trop raide.
Par contre, on ne peut qu’admirer le travail remarquable des anciens pour les terrasses dont les champs ont moins de surface que les talus de pierre.
Restaurant, vite, on crève.
Grosses pizzas.
Et visite du patelin poussive. Beaucoup de touristes malgré la période, dont de nombreux chinois !
Au coucher du soleil, on prend le train pour retourner à Corniglia. Ouf, ce coup-ci c’est plat ! Tunnel et gare dans la foulée.
Mais là, nous attendent un chemin de 300 marches pour rejoindre le centre du village.
Au secours. Florence craque. Ce sera non.
Heureusement un minibus fait la navette. 2,5 € la place, c’est gratuit quand on ne peut plus avancer.
Retour au camping-car avec un ciel de toute beauté après le coucher du soleil. On remonte la route de montagne jusqu’à la « grand » route, puis retour à La Spezia au camper park. Crevés…. Mais ensemble !
20 décembre.
Ou comment on se retrouve la nuit sur un parking de gare…
J’ai vainement cherché l’arrêt de bus supposé être à proximité de notre camper park. La recommandation de l’office du tourisme, et de tous les guides, est claire. Prendre les transports en commun, car la côte est totalement encombrée et noyée sous les touristes. Cinq millions par an, dans des villages qui font à peu près la taille de Locronan chaque. Autrement dit, les places sont chères et les routes… difficiles, car dans ces montagnes tombant directement dans la mer, il y a quelques virages et quelques épingles à cheveux étroites.
Faute d’avoir trouvé l’arrêt de bus, je décide de prendre le fourgon pour aller vers la gare. En chemin, à plusieurs carrefours, les panneaux « Cinque Terre » sont présents. Et hop ! C’est parti, il suffit de les suivre. Route de montagne assurée, virages, tunnels, épingles à cheveux. Riomaggiore. Le panneau de la route qui descend au premier village est une incitation à poursuivre. Pratiquement personne sur la route. Après une descente en lacets de l’ordre de 500 m de dénivelé, voici le village coincé dans un fond de vallée côtière. A l’entrée en pente raide, un petit parking de 4 ou 5 places nous attend, avec une place libre. Juste plus bas, une barrière bloque l’accès du village. Du moins en principe, car la barrière est cassée.
Et c’est ainsi que démarre, contre toute attente, une balade en fourgon dans un lieu où il est formellement déconseillé de circuler en voiture. La date y est pour quelque chose. Il n’y a personne. Et il fait froid.
Le site est magnifique, à la hauteur de sa réputation, sans la foule habituelle. La plupart des magasins et des restaurants sont fermés. Tout en bas, du village, un tout petit port, protégé par une digue faite de blocs rocheux. Aujourd’hui, la mer est agitée et les paquets de mer passent par-dessus. Tous les bateaux sont remontés sur le terre-plein, et recouverts de bâches de plastique. On apprécie, ou pas, ces couleurs qui jurent avec l’harmonie des couleurs des maisons. Le temps reste couvert et les photos sont ternes. Une brève éclaircie permet de saisir le village avec ses couleurs vives qui font la réputation des lieux.
En remontant, on trouve un restaurant ouvert. Florence rentre pour prendre les commandes pendant que je remonte au fourgon. Le stationnement étant limité à une heure, avec disque à l’appui, il faut recaler l’heure pour éviter le PV.
Retour au restaurant. Au fond de celui-ci, un grand panneau de verre, style vitrine, donne une vue curieuse à la paroi rocheuse sur laquelle est appuyée le bâtiment. Cela donne un style particulier, comment dire ? Aquarium reposant.
Cuisine simple et bonne. Salades au fromage.
L’heure tourne. On reprend le fourgon et on continue la balade vers les autres villages. Sur la route des crêtes, pas beaucoup de place pour s’arrêter. On surplombe la côte et au détour de certains virages on aperçoit les deux autres villages : Manarola et Corniglia. On continue à tourner, en espérant trouver un endroit à Levanto pour se poser ce soir.
Après montée, descente, et virage à droite, à gauche, encore et encore, on arrive à Levanto.
Rien, pas un camping ouvert. Tout au plus un parking à 35 € les 24 h tolère les camping-cars.
Juste à côté de la gare, où il y a des toilettes publiques. Pas le choix, on s’y pose. Sauf que l’horodateur est scotché et qu’il y a un doute sur « on paie, ou non ». Finalement, on se pose sans payer. On verra bien la suite, mais aucune voiture n’affiche de ticket. Mais c’est vrai qu’il n’y a plus de tickets. C’est juste un enregistrement du numéro d’immatriculation dans la base de données locales.
La nuit, ça caille. Au matin, la glace s’est formée sur le pare-brise, sous les occultants. Grrr. Heureusement qu’on a un chauffage qui nous permet de tenir et de prendre un petit déjeuner sans problème. Et nous voilà parti pour une nouvelle journée de découverte. En sens inverse.
19 décembre 2024
Les jours se suivent et ne se ressemblent pas.
Nous avons quitté Saou le dimanche 15. Jean-Yves ayant repris un peu de force et d’appétit, nous avons décidé de partir. En cas de problème majeur, il a nos coordonnées et nous n’avons pas l’intention de partir directement vers l’Andalousie. Petit crochet par l’Italie au préalable, pour visiter Cinque Terre que Florence rêve de visiter depuis très longtemps.
Mais l’itinéraire sera celui de l’école buissonnière.
Le 16 au soir, au détour d’une route dans les gorges du Verdon, un village perché sur un flanc de colline se dévoile brutalement. Cri du cœur de Florence (imaginez la scène, même si le nombre de décibels émis n’a pas couvert le bruit du moteur) :
– « Mais je connais ce village, je l’ai fait à l’aquarelle ! Mais comment s’appelle-t-il ? »
– Aucune idée…
– Mais si, c’est… c’est pas possible de tout oublier comme ça.
– Tu es déjà venue ?
– Non, jamais, mais je l’ai peint.
Pas de problème. Géoportail et GPS donnent la réponse. Moustier Ste Marie.
– Mou(s)tier Ste Marie (sans prononcer le « s », dis-je.
– Moustier Ste Marie, corrige Florence, on prononce le s.
– Pas certain, faudrait demander aux locaux.
Pas facile, pas de locaux dans les rues, c’est désert le dimanche soir.
On cherche une place pour passer la nuit et on finit par s’installer sur un parking à côté des toilettes publiques. Tout est parfait et propre.
Pose des occultants sur les vitres, et je vais explorer le patelin à la recherche d’un restaurant ouvert.
Il fait froid, autour de zéro, et il y a un vent soutenu. Ressenti vers -4°C.
Pas une âme en vue, quand dans une rue sombre, un couple assis à table devant un restaurant indique que ça ouvre à 18h30. En attendant, ils se les gèlent dans le courant d’air frais. C’est leur problème.
J’appelle Florence pour lui signaler qu’il y a un restaurant ouvert et lui lire le menu affiché sur le panneau.
– Dring…. Il y a un restaurant ouvert, je te lis le menu ?
– Non, mais il y a quelqu’un qui tourne autour du camping-car et qui pousse les feuilles mortes. C’est bizarre.
– Tu as peur ? Tu veux que je rentre ?
– Oui, je préfère.
Et c’est parti, ou plutôt, c’est rentrée. En chemin, je croise un petit bout de bonne femme, bonnet enfoncé sur la tête, sans âge, un caddy à la main et un bâton dans l’autre. Elle pousse le feuilles, comme si elle cherchait des pièces de monnaie perdues par terre.
– Vous n’auriez pas 5 euros à me donner, dit-elle. Ça m’aiderait à manger.
– Je suis désolé, je n’ai pas du tout de monnaie, et pas du tout d’argent sur moi.
– Tant pis, alors bonsoir monsieur.
J’arrive au camping-car et je frappe à la portière. Florence ouvre. Je lui explique que son méchant monsieur est un petite vieille qui cherche de la monnaie perdue dans les feuilles sur la route et qu’elle semble incapable d’écraser une mouche.
Quelques instants plus tard, on repart à pied, direction le restaurant. On rattrape la dame et on lui donne les quelques pièces jaunes qui nous restent.
– Merci, que Dieu vous garde. Mais qu’est-ce que c’est embêtant ces feuilles. Bientôt, heureusement, ce sera fini. Ici, c’est magnifique, je suis originaire de Nantes, mais depuis que j’ai découvert ce village, j’ai décidé d’y rester. J’ai l’intention d’y finir mes jours.
On lui dit que c’est un endroit magnifique et que c’est un bel endroit pour cela…
Puis, on passe notre chemin. Florence indique qu’elle a un comportement psy. Mais on ne craint pas d’y perdre la vie…
On arrive au restaurant. On rentre.
– Désolé, le dimanche soir, c’est réservé à la famille.
– Désolé aussi. Y aurait-il quelque chose d’autre ouvert ?
– Oui, plus bas, il y a une pizzeria.
Et nous voilà à la pizzeria. C’est petit, bizarre, vouté, et il fait chaud à côté du four.
Et bien, les pizzas sont aussi grosses que le pizzaiolo. Et bonnes. Ca fera le repas du soir et celui du lendemain soir !
Le 17, on repart sur les routes de Provence, vallée du Gard. Ça tourne, et ça tourne encore.
Gorges du Verdon. C’est beau, c’est froid, les vautours font la grève, les grimpeurs sont absents.
Alors, on fait un tourisme à la con. Point de vue. On s’arrête, on s’extasie, on repart.
Et le soir, arrêt à Castellane. On est vanné. On cherche un endroit pour se poser, sachant qu’il n’y a pas un seul camping ouvert… C’est bon, une place avec un horodateur en panne, 10 € la nuit pour les camping-cars, mais du scotch sur l’appareil. Toilettes publiques propres à proximité. Ça caille. Zéro et une bise atroce. On sort avec les gros anoraks, et balade dans les rues sombres de Castellane. 18 h, pas un chat, tout est fermé, sauf une boulangerie pâtisserie qui détonne dans l’ensemble.
En plus du pain, on achète, un pavé au miel et un aux noix, et une pâtisserie carrée à base d’amandes, style coussin berlinois de ralentisseur.
On ne rigole pas, ici. La moitié suffit. Le reste le lendemain.
On se pose, on pose les occultants, et au lit. Affichage – 4°C au tableau de bord.
Et le matin, -6°C. C’est de mieux en mieux.
On fait la grasse matinée, car tout est gelé, y compris notre motivation. Midi arrive. Toujours pas de soleil. La montagne cache le soleil.
Faut vraiment être con pour construire un patelin là où il n’y a pas de soleil avant midi, non ?
Alors on dégage.
Direction Grasse, par les routes de montagne. Puis, à Grasse, tout est tassé, encombré, pas une place pour se poser, le stress. Alors, on file. Direction l’Italie. Par l’autoroute.
Cannes, Nice, Monaco, Menton, Vintimille et hop ! L’Italie.
Pont, tunnel, pont et re-tunnel, et re-pont.
227 ponts et 321 tunnels. Et encore, on n’a pas compté. Alors, on en a un peu marre des ponts et des tunnels. Stop, sur une aire de service. Bruits de camion.
Rien à dire, le service est correct et pas d’agressivité ambiante. Enfin, Florence trouve que certains camionneurs n’ont pas digéré #meetoo.
On a quitté la France !
Le 19, on reprend tranquillement l’autoroute. Ponts et tunnels. Et encore et encore. Et au bout on sort à La Spezia.
Recherche d’un camping. Nada, tout est fermé. Le seul ouvert loue des bungalows. Alors, ce sera un camper park (pour camping-car) sur un parking aménagé, à côté de l’autoroute, coincé entre 2 routes et où le bruit délicat des camions fait vibrer l’air ambiant.
Parfait, ou presque. La suite, c’est pour les geek d’aujourd’hui.
– la borne d’entrée délivre une carte ;
– avec la carte, on va à la caisse où il faut renseigner la date d’arrivée, de départ, le pays, le nom, le prénom, le numéro de téléphone, et scanner son passeport, côté pile, et côté face (sachant qu’il n’y a pas de face…).
Après 10 tentatives infructueuses, on arrive à se faire débiter pour 2 nuits.
Puis on va brancher le courant à la borne dédiée à cet effet.
On applique la carte à l’endroit prévu à cet effet :
– message : crédit insuffisant ! Quoi ? On vient de la créditer de 35 € ! Qu’est-ce qu’elle nous veut cette borne à la con ? Au secours, on va la casser cette borne.
Heureusement un allemande peu surprise de notre tragédie prend pitié de nous (on a perdu, la guerre, normal !) et nous indique qu’il faut aller charger la carte spécifiquement pour tous les services du « park », y compris l’électricité.
Ach so ! Mais bien sûr.
Retour à la caisse.
1€ par KWh, tout va bien qui charge bien. Alléluia !
Et la nuit, vroum, vroum, mais on dort quand même. Heureusement que le camping-car a été bien isolé.
Le 19….
On ouvre les occultants, mais sans illusion. On entend la pluie tomber et ruisseler sur le véhicule, et le bruit caractéristique des voitures et des camions sur la chaussée mouillée. Il pleut, il va pleuvoir toute la journée, il va pleuvoir demain, et peut-être à partir de samedi ça ira mieux.
Imprévu, mais bon, faut faire avec. Alors, course au supermarché (ici c’est ipercoop !) et découverte de zone industrielle.
Aucune agence de voyage n’aurait pu concocter un programme aussi original Trop forts !
La suite par beau temps !
13 décembre 2024.
Saou, vendredi 13.
Nous sommes toujours au même endroit. Pas de surprises à attendre.
Balades limitées, dans un rayon de 50 km. Hier, après quelques excursions les jours précédents dans le pays de l’huile d’olive, Nyons et les Baronnies, on est allé se balader sur le plateau du Vercors.
Montée par le Col du Rousset à partir de Die, puis balade dans des paysages magiques où les premières neiges avaient décoré les paysages, forêts, prairies, villages, le tout avec des fines nappes de brouillards qui donnaient un côté fantastique aux scènes observées. Mais les températures qui passaient rapidement en dessous de zéro et les brouillards en forêt ne donnaient pas vraiment envie de traîner. Risque de verglas et beaucoup de virages.
Et le soir, contents d’être rentrés assez tôt pour se retrouver au chaud. Ambiance montagne.
Comme Jean-Yves est un peu mieux, on devrait partir sous peu, demain ou après-demain. Ce sera fonction de la météo. Demain, neige probable. A suivre.
Le programme est toujours aussi flou. C’est ce qui fait son charme !
Enfin, pas tout à fait exact. Le départ est prévu le dimanche 15 décembre. Une amie (Valérie) de Jean-Yves rentre de voyage et pourra lui faire les courses en fonction de ses besoins. Et le 21, Hugo, son second fils, vient lui rendre visite pour quelques jours.
Donc on part vers le sud. Objectif immédiat, le Canyon du Verdon.
Pourquoi le Verdon? Mais parce que dans le canyon on est sûr de trouver le plus grand garage Nissan de toute l’Europe. Chouette, non?
Explications photos: sur le plateau du Vercors, la lumière des premières neige était dingue. Il fallait plisser les yeux en l’absence de lunettes de soleil.
Et avec un peu de brume, le tout devenait magique sur ce plateau. Les arbres portaient des décorations de neige et de glace à un point tel que certains donnaient l’impression d’être poudrés de sucre glace au soleil. Les deux dernière photos sont prises des ceontrforts sud du Vercors (Plan de Baix) et représentent la mer de nuages sur la montagne de Saou vers le sud.
Aie, et c’est sous cette couche sympathqie que l’on doit plonger? Est-ce qu’on peut respirer la-dessous? Si vous ne recevez plus de nouvelles, vous saurez que ces nuages étaient toxiques. Pour des retraités de notre âge, on vit dangereusement.
7 décembre 2024.
Jean-Yves a été KO jusqu’à ce matin. Rien mangé ou presque pendant 3 jours, mais aujourd’hui, c’est reparti. Ouf! Couscous à midi. Acheté ce matin au marché du samedi de Saou. Et cet après-midi, la pluie est arrivée avec déluge en fin d’après-midi, puis éclaircie et trouées dans les nuages. De quoi offrir de superbes lumières et quelques arc-en ciels. Photo prise du jardin de J.Y. sous la pluie avec un arc-en-ciel qui fait une arche de lumière au dessus de l’entrée de la forêt de Saou.
Demain sera un autre jour .
On va peut-être aller à la messe demain matin faire une prière pour la maison de l’Arc’Hantel qui semble héberger des gremlins incendiaires! Et pour Kilian et Mahé qui vivent dangereusement car dans le local technique où ça a brulé, il n’y a pas d’alarme incendie.
4 décembre 2024.
Nous sommes donc le lendemain du jour précédent, ou aussi le jour suivant celui d’avant.
Si c’est pour écrire des banalités de ce type, il vaudrait mieux poser la souris tout de suite.
Mais en ce jour banal, tout n’est pas banal. Encore que l’histoire du 15 de rue de l’Oume d’aujourd’hui doit ressembler à des milliers d’autres histoires ahurissantes que nous délivre le système hospitalier français en ces jours de macronnerie avancée.
Diversion : si vous avez lu ce qui précède, vous avez dû voir que l’adresse de Jean-Yves est 15 rue de l’Houme. Oui, c’est ce que j’ai cru. Mais ça, c’est sur la plaque d’un habitant au 7 rue de… Aujourd’hui, à l’entrée de la rue, j’ai regardé la plaque officielle, ce n’est pas l’Houme, mais L’Oume.
Quelle importance, on s’en fout, non ?
Non ! Qui aimerait perdre son H ainsi ? Mahé ? On dirait « Maé ». Qu’en dit Maé ?
Revenons à nos moutons.
Aujourd’hui, Jean-Yves est toujours aussi douloureux de la cheville droite, et il ne peut plus marcher, même avec des béquilles. L’infirmière qui fait la liaison avec le service HAD (hospitalisation à domicile) de l’hôpital de Montélimar a donc appelé hier soir et ce matin pour préciser qu’il ne pouvait pas marcher et qu’il fallait prévoir un transport en ambulance avec porteurs pour l’amener de chez lui à l’hôpital de jour où il devait passer une radio de la cheville et avoir une nouvelle injection dans le cadre du son traitement d’immunothérapie.
12h45, je me présente dans la rue au droit du 15 de la rue de l’Oume (vous suivez ?) et je vois la chauffeure du VSL de Jussieu qui se présente seule.
– Vous êtes seule ? On attendait une ambulance et deux personnes pour transporter le patient.
– Ah ! Non, je suis seule, on m’a envoyée sans m’indiquer que le patient ne pouvait pas marcher.
Je peux voir Monsieur Zann ?
On monte…
– Jussieu : Bonjour Monsieur Zann, je suis venue vous chercher pour vos rendez-vous. Vous pouvez marcher ?
– J.Y. : non, le pied gauche est bloqué et douloureux.
– Jussieu : vous pouvez descendre les escaliers avec les béquilles, seul ?
– J.Y. Non, je ne crois pas. Je vais essayer.
Et voilà Jean-Yves qui se traine avec ses béquilles sur le palier et… Non, ça ne le fait pas. Trop dangereux.
– Jussieu : Attendez, j’appelle mon responsable. Il va prendre contact avec le HAD pour voir ce que l’on peut faire.
Explications internes à Jussieu… Ils n’auraient pas reçu de message du HAD sur l’état du patient.
Résultat : le responsable de Jussieu appelle le HAD. Ce dernier refuse de changer de position et indique que Monsieur Zann doit pouvoir marcher.
Appel du HAD à l’agent de Jussieu chez Jean-Yves.
HAD : Nous n’enverrons pas d’ambulance. Monsieur Zann a des béquilles et peut se déplacer.
– Jussieu : Non, il ne peut pas marcher, et je ne peux pas prendre la responsabilité de le faire descendre les escaliers.
– HAD : sa sœur a prévu de l’accompagner cet après-midi. Elle ne peut pas l’aider à descendre ?
– Florence : non, ce n’est pas possible.
-HAD : eh bien alors, il n’a qu’à descendre sur les fesses…
Silence général dans la pièce où 4 personnes (J.Y., Florence, m^m et l’agent de Jussieu) interloquées se demandent si elles ont bien entendu.
– En cœur : vous plaisantez !
– HAD : non, s’il ne peut pas marcher, qu’il descende sur les fesses…
– Jussieu : sans savoir ce qu’il a au pied ? Ce sera sans nous. On ne peut pas faire ça.
– Flo + Jo : c’est impossible et votre propos est honteux.
Blocage.
Nouvel appel entre l’agent de Jussieu et son responsable.
Nouvel appel entre son responsable et le HAD. Le temps passe. On attend.
Retour d’information : une ambulance sera bien envoyée avec 2 personnes.
Appel du HAD pris par Florence : une interlocutrice (la même, secrétaire ? Infirmière ???) bizarrement aimable cette fois-ci, confirme l’arrivée de l’ambulance.
Commentaires additionnels après le départ du VSL Jussieu.
– Tu peux pas descendre en luge ? A ski ? En VTT ?
– Non ! Sur les fesses, voyons, c’est tendance aujourd’hui, garantie HAD.
Moralité : on n’arrête pas le progrès
15h départ de Jean-Yves en ambulance…
19h retour de Jean-Yves. Pas de fracture, pas d’entorse, pas de phlébite. Mais une cheville enflée comme un tuyau de poêle bien chaud et toujours bloquée.
Chauffage d’appoint par temps de bise ?
L’Andalousie, c’est pour plus tard.
3 décembre 2024.
Silence radio. Et pour cause, on devait tenir une chronique de voyage, ou à défaut de voyage, une chronique de découvertes.
Eh bien, pour l’instant nous faisons du sur place. Au 15 rue de l’Houme, Saou dans la Drôme.
Ne nous plaignons pas, il y a pire come pays car ici c’est magnifique avec une abondance de sentiers de randonnées à satisfaire les plus blasés.
Mais si nous sommes restés plus longtemps que prévu chez Jean-Yves, c’est qu’il est très diminué par la maladie et par les traitements lourds dont il bénéficie. Chimiothérapie + immunothérapie = perspective d’améliorations, voire de guérison pour une durée aujourd’hui difficile à estimer. Mais en attendant, il n’est pas très autonome. Il mange difficilement et si on ne lui fait pas la cuisine il se nourrit peu. Ce qui n’aide pas à reprendre du poids et des forces.
Et depuis hier matin, il a la cheville droite complètement bloquée avec une inflammation sortie pendant la nuit d’une pochette mauvaises surprises. Du coup, mobilité très altérée et douleurs aigues et persistantes. Demain, mercredi 4, la météo nous annonce des températures négatives ressenties avec des vents du nord de 50 km/h. Il va devoir aller à l’hôpital de Montélimar pour une injection d’immunothérapie. Déplacement douloureux en perspective.
Ce contexte éprouvant (pour lui) de maladie nous a fait prolonger notre séjour. Nous n’aurions pas le cœur à le planter dans cet état à devoir se gérer avec un passage d’infirmière matin et soir et une assistance d’une heure de ménage par semaine. Laquelle femme de ménage oublie de passer…
Pour aller, le cœur léger, faire du tourisme sur la côte méditerranéenne du côté de Cinque Terre.
Florence rêve pourtant d’y aller depuis un bon bout de temps.
Chaque chose en son temps et soyons honnête : ici, il y a du chauffage, quand il fait froid dehors, il y a à manger, car c’est nous qui faisons les courses et Florence la cuisine. Comme d’habitude, je me rachète en faisant la vaisselle, un peu de ménage. La routine, en quelque sorte. Sauf qu’on ne s’habitue pas à ces maladies de merde.
Ah, si ! Entre les repas, il arrive que l’on randonne un poil. Avant-hier, montée à Poupoune, soit 450 m de grimpette par un sentier pourri, avec cailloux et feuilles mortes propices aux glissades et chevilles tordues. Florence est montée et descendue sans m’insulter une seule fois, et pourtant à la « borne 450 » j’ai continué tout seul en lui disant « je reviens tout de suite », ce qui était une approximation.
Après une montée jusqu’au sommet de Poupoune, descente. Descente bien sage, avec ses nouveaux bâtons, et même pas une chute. Sauf que, à l’arrivée, une vieille douleur fantôme à la hanche droite, voire à la jambe droite avait repris du service. Saloperie de douleurs ! Pourriez pas épargner quelqu’un qui n’a jamais fait de mal à personne ? Qui prie toutes les semaines à l’église et qui mange bio avec tout le respect dû à la nourriture ? On se demande dans quel monde on vit.
Bon, demain sera un autre jour. Carpaccio et pâte, pas bio, pas bien pour la planète car sous 3 emballages et même pas un mot de remerciement sur le paquet pour le bœuf qui a trinqué dans l’affaire !
Quelle ingratitude.
Au fait, Kilian, il y a du céleri rave au jardin, ainsi que des poireaux. Ce message vaut pour Hélène.
N.B. Pour les puristes, la dernière photo de la mini-galerie ci-dessus est juste nulle. Toute tremblée, photo d’alcoolique tremblotant. A moins que ce soit une peinture? De Florence?
23 novembre.
Froid. -5°C la nuit dernière. Ciel clair et étoiles bien piquées.
Mais tout n’est pas rose. Si l’épicerie bio locale a de très bons produits, dont du pain d’épeautre excellent, il y a aussi un marché local le samedi.
Des fromages, picodon et Cie, des saucissons, des fruits et légumes, et une remorque-restaurant, avec aujourd’hui choucroute au menu. En rôtisserie, de pauvres poulets aux ailes sans plumes, pas question de s’échapper, attendent les sauvages qui mangent encore de la viande. Et tout ça pour un gros village de 500 habitants.
Et qu’est-ce qui n’est pas rose? Le cochon. Non, pas du tout, l’articulation de la hanche de Florence qui s’est réveillée et est à nouveau douloureuse.
La position assise trop longtemps pendant le voyage? Le stress de la découverte de l’état de Jean-Yves (difficile à dire)? La marche dans les bois et les pentes hier à la recherche des champignons hallucinogènes? Ou le tout combiné?
On va voir comment ça évolue, et si la suite est douloureuse, on verra s’il faut du repos ou des champignons hallucinogènes…
Aujourd’hui, du coup, balade en forêt de Saou limitée à 100 m de dénivelé et 2 km. Couleurs d’automne éclatantes. Difficile de ne pas apprécier le festival de jaunes offert par les feuilles de hêtres au soleil.
Ah, oui, au menu du déjeuner, omelette aux pommes de terre, aux pieds de mouton et aux chanterelles. Dommage que Jean-Yves ait un appétit proche de zéro. On espère que ça va s’améliorer. Pour l’instant il n’échappe pas au rituel des médicaments, matin, midi et soir et ceci quel que soit l’appétit. Galère.
22 novembre.
Ciel bleu provençal comme on peut l’avoir à Saou en hiver. Jean-Yves a installé une tente dans son jardin, ouverture tournée vers le soleil. Et sur une chaise longue, au soleil, à l’abri du vent, il peut apprécier les lieux.
Cet après-midi, balade en forêt et recherche de champignons.
Retour de balade sur les pentes nord de Saou, et donc exposées plein sud en dessous de Poupoune et de Maupas (voir carte IGN sur site du même nom si vous doutez de ma santé mentale pour les noms de rochers!). Rien, pas la queue d’un champignon. Sans doute trop sec.
Au retour de balade, on ne change pas les habitudes, donc goûter. Florence était passée en matinée à l’épicerie bio de Saou où elle avait fait l’acquisition d’une grande bouteille de Kombucha portant le nom suspect de “Le Pa Chat”, avec un sous-titre encore plus suspect “L’alliance de plantes centenairespour préserver nos artères”. Génial, non? Et hop, Florence d’un geste délicat actionne la ferraile qui verrouille le bouchon. Parce que oui, on peut ainsi la refermer. Et à ce moment là, un geyser de kombucha jaillit du goulot, asperge tout autour sans compter , y compris la belle chevelure blonde de l’imprudente. Et c’est ainsi qu’est né le premier shampoing aux probiotiques. Si demain, le cheveux sont tombés, je fais des photos, promis. Bon, d’accord, il a fallu passer la serpillière pour abréger le shampoing prodigué au carrelage. Expérience originale et 100% bio.
21 novembre.
Ce soir, nous sommes arrivés chez Jean-Yves à Saou.
La traversée de la France a été pénible, pour cause de mauvais temps. Pluie, neige et vitesse réduite au programme. Et des températures en berne pour bien démarrer ces nouvelles vacances.
Mais il faut quand même remercier les dieux du vent, de la pluie, de la neige et des étoiles cachées, pour leur protection sans faille. Pas vu un accident, pas davantage de papillon, et ça c’est formidable, car comme cela Enya n’a pas eu peur. Comment ça, Enya voyage avec nous? Non, pas besoin, mais nous avons un petit quelque chose de chacun de vous dans notre cœur, et quand on croise un papillon, le petit quelque chose d’Enya frissonne. Heureusement il n’y a pas non plus de papillon de nuit.
On s’égare. Jean-Yves est très fatigué, la combinaison immunothérapie et chimiothérapie fait des dégâts, mais selon les médecins ça se passe bien. De toute façon, pas le choix, Faut passer au travers. Beaucoup de kilos en moins, un appétit de mouche, mais une suite en principe moins pénible.
Florence n’ayant pas encore apprécié la durée de notre temps de séjour qui conviendrait le mieux à la situation, la question reste ouverte.
N.B. on bien regardé tout au long du trajet si on pouvait découvrir d’autres trampolines volants. Nada. Faut croire que l’effet Stade Brestois gagne les autres sports. Quelle énergie!
18 novembre.
Départ de voyage prévu le 15 octobre, encore raté. Mais tout n’est pas perdu.
Le fourgon a enfin démarré. Incroyable, non? Surtout quand on sait que le garage a comptabilisé 21 heures de recherche de panne.
Et c’est facturé en bitcoin?